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mercredi 1 janvier 2020

1er Janvier 1789 : Les Etats-Généraux de Cythère ? Vraiment ?

 

Bienvenue en 1789 !

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    Le numéro du 1er janvier 1789 du Journal de Paris, après ses indications relatives à la météo ( -17.3° dans la nuit du 30 au 31), commence par des extraits relatifs aux Belles Lettres.

    L’auteur de l’article s’étonne que la plupart des esprits, pendant l’année 1788, se sont tournés vers des objets fort étrangers à la Poésie. Raison pour laquelle, la Notice des ouvrages de poésie qui termine l’Almanach des Muses est-elle beaucoup moins considérable qu’à l’ordinaire.

    Cependant, précise-t-il, le Recueil lui-même se ressent moins de cette stérilité. Il contient un grand nombre de Pièces importantes par leur étendue & par le talent qui les a produites, telles que les "Etats-Généraux de Cythère", Imitation très élégante du Congrès de Cythère du Comte Algarotti, par Monsieur le Chevalier de Cubière ; (…)

L’ouvrage du Chevalier Barbier Michel Cubières de Palmeseaux est accessible en ligne en cliquant sur l’image ci-dessous !

    Après une "courte" présentation de 11 pages, le texte poétique couvre une petite trentaine de pages. Amusez-vous à le lire. C’est comment dire ? Frais et pittoresque ? Poétique ? Bienvenu au 18ème siècle !

Vignette extraite du bel ouvrage "Etats-Généraux de Cythère"

Etats-généraux de Cythère, et de France

    Michel de Cubière, né en 1752, a laissé de lui dans l’histoire de la littérature, le souvenir d’un poète « léger » et surtout celui d’une véritable girouette politique (ce qui lui permettra de s’éteindre paisiblement en 1820). Il a néanmoins été parfaitement en phase, avec la principale préoccupation du moment, en versifiant sur ses « Etats généraux de Cythère ».

    En effet, tout le monde le sait, les Etats généraux qui vont avoir lieu à Paris en Mai prochain, vont être l’événement de l’année 1789 ! Aucun autre événement ne pourrait surpasser celui-là en importance !...

Pourquoi cette convocation des Etats Généraux par le roi Louis XVI ?

Louis XVI

    Ce 1er janvier 1789, la dette de la France s’élève à 4 milliards et demi. Elle a triplé durant les quinze années passées du règne de Louis XVI. Il faut savoir que les dépenses occasionnées par le soutien de la France aux colons insurgés américains, ont été évaluées à plus de 2 milliards. La guerre d’indépendance américaine a été l’une des causes principales qui ont provoqué la Révolution française.

Budget de l'Etat en 1788

    Le royaume est au bord de la faillite. Ces dernières années, les ministres successifs de Louis XVI ont tenté, en vain, de réformer le royaume. En vain, parce que l’Ancien régime est devenu irréformable, du fait des privilèges anachroniques que détiennent deux corps minoritaires de la société (2%), la noblesse et le clergé (l’Eglise).

Répartition proportionnelle des Français
au sein des trois corps de la société, en 1789.

    Louis XVI a bien essayé de réunir ces deux corps privilégiés à l’occasion de deux Assemblées des Notables, qui ont eu lieu en 1787 et 1788. Mais ces "grands du royaume" n’ont rien cédé. Louis XVI et ses ministres successifs ont également été confrontés à l’hostilité des Parlements. Ces derniers instrumentalisant souvent le peuple en fomentant des émeutes pour les soutenir, quand ils refusaient les réformes du roi.

    Les premiers à bafouer l’autorité royale et à semer les graines de la révolte à venir, furent ces privilégiés de la noblesse et du haut clergé.

Lire mon article : "Les Parlements contre le Roi, 30 ans d'une lutte de l'aristocratie contre l'absolutisme royal"

    Nous serons amenés à reparler des Etats Généraux, leur préparation, leur déroulement, ainsi que leur aboutissement totalement imprévu. Des articles évoqueront plus précisément, au cours de cette chronique de 1789, les problèmes de l’Ancien régime. Néanmoins, le survol de la petite chronologie ci-dessous, vous donnera une meilleure idée de la situation. Elle n'est pas exhaustive et certains des événements qui y sont mentionnés, seront repris et développés dans de prochains articles.

De 1786 à 1788, les nuages s’amoncèlent.

20 Août 1786

    Charles Alexandre de Calonne, contrôleur général des finances et de fait premier ministre, remet à Louis XVI un mémoire sur le déficit financier du royaume ; il préconise comme indispensable une réforme de l'Etat suivant un plan en trois points plan :

  • Plan fiscal : tendance à l'égalité devant l'impôt et à l'unification ;
  • Plan économique : liberté du commerce des grains, suppression des douanes intérieures ;
  • Plan administratif : création d'assemblées municipales (élues par tous les propriétaires ayant au moins 600 livres de revenu), qui éliraient des assemblées de district, lesquelles éliraient à leur tour des assemblées provinciales ; toutes ces assemblées demeurant d'ailleurs purement consultatives.

    Au lieu de soutenir Calonne et d'imposer son plan de réformes, Louis XVI tergiverse et cherche, pour vaincre la résistance prévisible des parlements, à obtenir le soutien de la Noblesse.

    Calonne dira au roi : 

« Ce qui est nécessaire pour le salut de l’État serait impossible par des opérations partielles, il est indispensable de reprendre en sous-œuvre l’édifice entier pour en prévenir la ruine… Il est impossible d’imposer plus, ruineux d’emprunter toujours ; non suffisant de se borner aux réformes économiques. Le seul parti qu’il reste à prendre, le seul moyen de parvenir enfin à mettre véritablement de l’ordre dans les finances doit consister à vivifier l’État tout entier par la refonte de tout ce qu’il y a de vicieux dans sa constitution. »

Calonne ajoutera en trois ans 653 nouveaux millions aux emprunts précédents. (Source : Mathiez p43).

22 Février 1787

Première Assemblée des Notables

29 Janvier 1787 Convocation
à l'Assemblée des notables

Cette réunion des grands du royaume réunis, durera jusqu'au 25 mai. Elle sera composée de 114 membres désignés par le roi, dont 7 princes de sang, 36 ducs et pairs ou maréchaux de France, 33 présidents ou procureurs généraux de parlements, 11 prélats, 12 conseillers d'Etat, 12 députés des "pays d'Etat", 25 maires ou échevins des principales villes, etc.

Les grands rejetteront toutes les réformes de Calonne (un programme calqué sur celui de Turgot) qui remettent en question leurs prérogatives fiscales. Ils se considèrent comme inaptes à décider la levée d'un nouvel impôt (la subvention territoriale, un impôt foncier qui s'appliquerait à tous les propriétaires, y compris les privilégiés).


31 Mars 1787

    Calonne dénonce l’opposition des Notables aux réformes dans un manifeste qu’il rend public. Ce document expose le contenu de ses réformes jusqu’alors tenues secrètes, pour en appeler à l’opinion publique.

Avril 1787, un certain La Fayette

    Gilbert du Motier, marquis de La Fayette, dit « La Fayette », le héros de la guerre en Amérique, participe à cette première assemblée des notables. Il appartient au bureau présidé par le comte d'Artois, frère du roi. Lafayette saisit l’opportunité qui se présente à lui de produire quelques-unes des réformes qu'il a méditées, (voter la suppression de la gabelle et la mise en liberté des personnes détenues à l'occasion de cet impôt, abolition des lettres de cachet et des prisons d'État, révision des lois criminelles. Il est de ceux qui demandent et obtiennent le renvoi du ministre Calonne.

Eventail - Assemblée des Notables - 1787

Assemblée des Notables, suite et fin.

    La Fayette formule le vœu d'une convocation des États généraux, comme le seul remède efficace aux maux de la situation ; mais ce vœu demeure sans écho. Il fait la motion expresse (mot prononcé pour la première fois) de la convocation de la nation représentée par ses mandataires. Cette idée n’aura pas de suites immédiates mais fera son chemin malgré tout.

L’Assemblée des Notables se termine sur un échec.

Assemblée des Notables

16 Juillet 1787

    Le Parlement de Paris déclare que seule la Nation réunie dans ses Etats Généraux peut consentir un impôt perpétuel.

15 au 18 Août 1787

    Des émeutes populaires éclatent à Paris pour soutenir les Parlements. La négociation entre Loménie de Brienne qui a remplacé Turgot, et les parlements, aboutit à un compromis : le gouvernement envisage de convoquer les États Généraux, mais demande du temps et des moyens financiers pour présenter en 1792 un bilan satisfaisant…

    Au même moment, on commence à traiter la reine Marie Antoinette de "Madame Déficit" et d'"Autrichienne" ; des mannequins de ses favorites sont traînés au ruisseau. L’affaire dite, du collier de la reine, en 1785, a contribué à un retournement de l'opinion publique contre la reine.

19 Septembre 1787

    Une séance royale a lieu au Parlement pour l'enregistrement de l'édit (prorogation de l’impôt des deux vingtièmes) et du lancement d'un emprunt. Le Parlement réclame les Etats Généraux pour 1789. Le roi répond par l'ordre pur et simple d'enregistrer. Le Duc d'Orléans proteste ; Louis XVI lui répond : "C'est légal parce que je le veux". Le Parlement annule l'enregistrement comme illégal. Le ministre Loménie de Brienne fait arrêter deux conseillers (Fréteau et Sabatier) par lettre de cachet. Le duc d'Orléans que la foule avait porté en triomphe, est exilé à Villers-Cotterêts.

3 Mai 1788

    Avec la subvention territoriale, qui ne serait pas seulement payé par le Tiers-Etat mais aussi par les autres Ordres, Louis XVI entend instaurer l'égalité de tous devant l'impôt. Le Parlement de Paris refuse catégoriquement d'enregistrer la loi, la rendant donc inapplicable. Dans ce cas, le roi est obligé de faire un lit de justice afin de les forcer à obéir.

    Le Parlement publie une « déclaration des droits de la Nation » et réclame à nouveau la convocation des états généraux en espérant qu'ils contraindront le roi à respecter les exemptions fiscales des privilégiés.

6 mai 1788

Le capitaine des gardes arrête en pleine séance les conseillers d’Epremesnil et Montsabert.

Arrestation de d'Eprémesnil, Goislard de Veny et Girardet.
Jean Jacques Duval d'Eprémesnil et Anne Louis Goislard de Montsabert
étaient 2 conseillers au Parlement de Paris.


8 mai 1788

    Par un lit de justice tenu à Versailles, Louis XVI impose les réformes judiciaires et politiques, tandis que les gouverneurs de province tiennent des lits de justice dans toutes les cours souveraines. 47 tribunaux de grand bailliage, remplacent les Parlements. Ils doivent appliquer un nouveau code d’instruction criminelle qui supprime la « question préalable », torture précédant l'exécution afin d'obtenir le nom des complices du condamné. L’enregistrement des lois passe à une cour plénière dont les membres sont choisis par le roi. Elle se réunit le 9 mai, mais de nombreuses personnalités refusent d’y siéger. Les Parlements résistent à leur mise en vacance et sont soutenus par des émeutes populaires à Paris (19 juin), Toulouse et Rennes.

    L’assemblée du clergé, réunie en mai, refuse d’entériner les réformes du 8 mai et condamne l’octroi de droits civils aux non-catholiques.

7 Juin 1788

    Le duc de Clermont-Tonnerre, Lieutenant général du Dauphiné, confie à des patrouilles de soldats des lettres de cachet à remettre aux parlementaires dauphinois pour leur signifier un exil sur leurs terres ; Le tocsin sonne. La population est rameutée par les auxiliaires de justice, fâchés de perdre le Parlement, qui représente une grande partie de leurs ressources. Des Grenoblois s'emparent des portes de la ville, d'autres, montés sur les toits, jettent des tuiles et divers objets sur les soldats. L'hôtel du gouvernement est pillé et vers la fin de l'après-midi, les émeutiers, maîtres de la ville, réinstallent les parlementaires à l'intérieur du palais du parlement. Il y aura eu trois morts. Cet événement s’inscrira dans les mémoires sous le nom de « Journée des Tuiles ».

14 Juin 1788

    Les notables grenoblois des trois ordres se réunissent à l'Hôtel de Lesdiguières et demandent le rappel des magistrats et la convocation des États de la province et des États généraux du Dauphiné.

5 Juillet 1788

    Loménie de Brienne promulgue un arrêté du Conseil d’État annonçant la convocation des États Généraux. Il institue en pratique la liberté d'expression.

15 Juillet 1788

    La Fayette est démis de son grade pour ses protestations contre la politique royale.

À l'initiative de Gouy d'Arsy et de Moreau de Saint-Méry, neuf grands propriétaires de Saint-Domingue résidant en France et souhaitant représenter la colonie aux États Généraux se forment en Comité des colons de Saint-Domingue ou Comité colonial. Ces commissaires demandent aux Domingois de ratifier leur nomination à la représentation de l'île aux États Généraux. Source : Les traites négrières.

21 Juillet 1788

    Réunion des états généraux du Dauphiné au château de Vizille, propriété de grands industriels, les Périer. Les Dauphinois, qui réclament le rétablissement de leurs États provinciaux, envoient leurs délégués au château de Vizille. L’assemblée que le commandant militaire n’ose dissoudre, décide sous les conseils des avocats Mounier et Barnave que désormais le tiers état aura une représentation double et qu’on votera aux états non plus par ordre mais par tête. Elle se déclare représentative et réclame la convocation des États du Dauphiné. De nouveaux États se réuniront en septembre.

5 Août 1788

Loménie de Brienne annonce la convocation des états généraux.

8 Août 1788

    Un arrêt du 8 août 1788 fixe la tenue des Etats Généraux au premier mai 1789 (à l’exception des colonies). A cette occasion, des cahiers de doléances doivent être présentés au roi, conformément à une tradition héritée du XVIe siècle. Selon l’article 24 du règlement du 24 janvier 1789, « tous les habitants composant le Tiers-Etat des villes ainsi que ceux des bourgs, paroisses et communautés de campagne seront tenus de s’assembler à l’effet de rédiger le cahier de leurs plaintes et doléances ».

    À la demande de Gouy d'Arsy et du Comité colonial, un Comité provincial du Nord de Saint-Domingue se constitue officieusement. Il se réunit officiellement le 27 janvier 1789, tandis que ceux de l'ouest et du sud le font les 25 janvier et 9 mars 1789. Ces assemblées provinciales élisent, pendant le premier trimestre de 1789, une députation de 37 membres où figurent 8 des 9 membres du Comité colonial de France. Ces comités prendront l'appellation d'Assemblées provinciales, d'où les gens de couleur libres sont exclus. Source : Les traites négrières

16 Août 1788

Proclamation de la banqueroute financière de l'État. Suspension des paiements de l’état pour 6 semaines.

25 Septembre 1788

    Le Parlement de Paris prend un arrêt aux termes duquel les états généraux doivent être « régulièrement convoqués et composés suivant la forme observée en 1614 » (vote par ordre) autrement dit avec trois ordres très inégalitairement représentés.

6 Novembre 1788

    Début à Versailles d'une seconde assemblée des notables de France convoqués par le roi, pour traiter les questions préliminaires relatives à l’organisation des Etats Généraux. L’Assemblée recommande le vote par ordre et refuse le doublement du Tiers Etat. Elle sera congédiée le 12 décembre, sans avoir rien fait d'important.

26 Décembre 1788

    À l'occasion de la convocation des États Généraux, les chefs de Saint-Domingue invitent les colons à leur exposer leurs requêtes par lettres à la condition de ne pas porter plus de cinq signatures, mais interdisent la réunion de toute assemblée illicite. Les Blancs ne tiendront pas compte de cette dernière prohibition et désigneront trois Assemblées provinciales (nord, ouest, sud) et une Assemblée coloniale. Source : Les traites négrières.

27 Décembre 1788

    Louis XVI arrête, dans son conseil privé, que le Tiers-Etat aura autant de représentants aux états-généraux que la noblesse et le clergé réunis

    Cela ne peut que plaire au clairvoyant Necker qui déclare : "Il y a une multitude d'affaires dont elle seule (elle, la nouvelle classe bourgeoise) a instruction", c'est-à-dire connaissance. Quelles affaires ? Les transactions commerciales, les manufactures, le crédit public, l'intérêt et la circulation de l'argent. C'est-à-dire qu'un état bien ordonné doit admettre la participation des plus éminents citoyens." Source : Les 2 Révolutions françaises, Henri Guillemin, p15.

29 Décembre 1788

Réunion des États provinciaux d’Artois.

Marseille réclame l’augmentation du nombre des élus du tiers état et le vote par tête aux États généraux.

A Rennes, la cinquantaine de députés du Tiers État breton fait savoir qu’elle refuse de délibérer avec les députés des deux autres ordres, la noblesse et le clergé, tant que leurs revendications ne sont pas entendues. Ces députés demandent notamment à avoir autant de représentants que les deux autres ordres, qui détiennent tout le pouvoir. La noblesse refuse, le ton monte, l’agitation est telle que le roi va suspendre les États de Bretagne. Source : FranceTV info (eh oui!)


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En parcourant les 4 pages de ce numéro du "Journal de Paris", vous constaterez l'étonnante place laissée à la culture, chronique littéraire, poésie, programmes des théâtres. Le XVIIIe siècle...

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Alors d'après-vous, les Etats-Généraux, l'évènement de l'année 89 ? Vraiment ? 😉