Le jeune Louis XVI |
Avertissements :
1/ J'ai trouvé utile de rédiger cet article, à la suite des commentaires
affligeants qui ont suivi la publication sur Facebook le 21 Août dernier, de mon article qui donnait la définition de la liberté retenue par les députés de l'Assemblée constituante. J'avais cru nécessaire de rappeler ce qu'impliquait la liberté dans le cadre d'un contrat social, c'est-à-dire lorsque l'on vit en société, et le devoir de chaque citoyen envers les autres.
2/ La variole ou petite vérole fut une maladie si horrible
que je n'ai pas souhaité insérer dans cet article des exemples des ravages
qu'elle faisait sur le visage et le corps de ses victimes.
3/ Malgré la gravité du sujet et la véracité absolue des
faits rapportés dans cet article, vous décèlerez peut-être quelques traces
d'humour sarcastique vers la fin. Je n'y peux rien, je suis ainsi. Ardent
défenseur des lumières, le retour de l'obscurantisme me terrifie.
L'inoculation eut lieu le 18 Juin 1774
Louis XVI était roi de France depuis seulement un mois et demi. À la suite de la mort de son grand-père, Louis XV, le 10 mai 1774, après une longue agonie, de la variole, déclarée le 26 avril à Marly, la décision avait été prise d’inoculer au jeune roi la petite vérole, c’est-à-dire la variole. L'inoculation eu lieu le 18 juin 1774. Pour avoir une chance de protéger la famille royale, il fallait une couverture immunitaire large. L’inoculation concerna donc les deux frères du roi, Monsieur – le comte de Provence, futur Louis XVIII – et le comte d’Artois – futur Charles X –, ainsi que la comtesse d’Artois. Marie-Antoinette en fut exemptée puisqu'elle avait déjà été inoculée dès 1768 sur ordre de sa mère, l’impératrice-reine Marie-Thérèse.
Bulletin de santé du roi et de ses frères et sœur en date du 24 Juin 1774 Source : Big Royal Pharma |
Extrait de la correspondance entre Marie-Thérèse d'Autriche
et sa fille Marie-Antoinette après l'inoculation.
De Marie-Thérèse à Marie-Antoinette
Schönbrunn, le 1er juillet. Madame ma chère fille, Vous pouvez vous imaginer mes inquiétudes sur la situation du roi. Autant que je suis pour l'inoculation, qui m'a conservé trois fils et six petits-enfants, autant je suis en peine que dans le plus fort des chaleurs et sur les trois frères en même temps on l'entreprend. Dieu en soit loué que vous n'ayez rien contribué à la décision, quoique la plupart des lettres vous l'attribuent ; que vous en étiez enchantée, c'est à sa place ; mais je crains bien que vos inquiétudes auront été des plus grandes. Autant que cette résolution fait honneur au caractère personnel du roi, autant elle fait trembler pour des jours si précieux, qui promettent à la France, à l'Europe un prince dont on attend le bonheur universel.
Marly, le 10 juillet. Madame ma très-chère mère, L'inoculation est entièrement finie ; le roi n'a souffert véritablement que pendant la fièvre, qui l'a fatigué et un peu accablé deux jours. Il sera purgé demain ; je compte que les médecins feront un procès-verbal sur tout ce qui s'est passé. Je l'enverrai à ma chère maman aussitôt qu'il sera fait. Mes frères et ma sœur sont également hors de toute crainte.
Suivent quelques lignes de la main du roi : Je vous assure aussi avec ma femme, ma chère maman, que je suis très bien rétabli de mon inoculation et que j'ai très peu souffert. Je vous demanderais la permission de vous embrasser si mon visage était plus propre.
Une idée venue de la
Chine
L'idée de l'inoculation, comme tant d'autres grandes
découvertes, nous est venue de Chine. C'est probablement au IXe siècle, que des
médecins chinois commencèrent à inoculer. Autrement dit à administrer le virus
de la variole amoindri pour déclencher une réponse immunitaire et protéger de
la maladie. La variole, appelée autrefois la petite vérole était une
maladie terrible qui vous tuait le plus souvent ou vous laissait défiguré.
La Chine du Moyen-Age, un âge d'or. Source Big Chinese Pharma |
Ayant remarqué qu’on n’attrapait jamais deux fois la
variole, les médecins chinois prenaient une personne moins malade que les
autres, prélevaient un peu de pus et le glissaient dans le nez du patient.
Parvenue en Inde, la méthode des Chinois fit son entrée en Europe par l’empire
Ottoman. C’est à Constantinople que Lady Montaigu, noble dame anglaise, découvrit
la méthode et décida d’inoculer son fils et sa fille, qui survécurent. Les
médecins s’y intéressèrent et se déchirent entre pour et contre (étonnant, non
?).
Lady Mary Wortley Montagu et son fils Edward Peints par Jean-Baptiste Vanmour |
Bien que passionné par les sciences, Louis XVI c'était longtemps refusé à l'idée d'être inoculé, mais la mort de son grand-père l'avait fait changer d'avis. Raison pour laquelle
il avait décidé de se faire inoculer au plus vite. On choisit une jeune
blanchisseuse parisienne, de mœurs irréprochables, pour prélever le pus nécessaire
à la vaccination du roi mais aussi de ses frères. La France retient son
souffle. Le risque paraissait immense puisque, si ces trois-là mouraient de la
variole, la France se retrouverait sans autre hériter qu’un enfant de 3 ans, le
fils du frère cadet du roi, puisque Louis XVI n’a pas encore d’enfants. Fort
heureusement l'opération fut un succès. Elle fut fêtée, notamment par des
coiffures extravagantes dites « à l’inoculation ».
Peinture de Paul Manceau (19ème siècle) |
Les Français douteront encore longtemps des bienfaits de la
vaccination. Notamment les religieux, considérant le vaccin comme contre
nature. La vaccination contre la variole ne se répandra enfin à grande échelle
qu’au XIXe siècle. De nos jours, grâce au vaccin, la variole n’existe plus.
Sources (Big Pharma) :
Post Scriptum :