samedi 27 novembre 2021

Plans de Paris du 14ème au 18ème siècle

 


    D'après mes statistiques, il semble que vous aimiez les galeries d'images. Je pense donc vous faire plaisir avec celle-ci !

    J'ai déjà utilisé plusieurs fois, pour illustrer certains articles, le magnifique plan de Paris dessiné par Bretez entre 1734 et 1739, plus connu sous le nom de plan de Turgot. Je lui ai même consacré un article que vous trouverez en cliquant sur ce lien : "1734 - 1739, Plan de Paris dessiné par Bretez, dit plan de Turgot." Mais là je vous propose toute une série allant de 1383 (même si celui-ci a été dessiné en 1705), jusqu'à 1797 (Après la Révolution 😉 )


    Vous pouvez cliquer sur l'image ci-dessous pour accéder à la galerie, ou cliquer sur le lien suivant : https://photos.app.goo.gl/cRcVex5a59u7naVX7


En plus !

Voici "en plus" quatre liens vous permettant de zoomer sur des versions "Haute Définition" :


Chronologie.

Les images ci-dessous vous donnent les dates de chaque plan :





Cadeau surprise !

En cliquant sur l'image ci-dessous, vous pourrez accéder à une superbe carte interactive sur laquelle vous pourrez découvrir l'histoire des rues de Paris !








mercredi 24 novembre 2021

La Révolution a-t-elle eu un effet bénéfique pour les revenus des pauvres ? Non, dixit Piketty.


    Je me suis rendu compte que certains de mes articles, très longs (trop ?), traitaient de nombreux sujets, qui a eux seuls méritaient chacun un article.

    Voici donc le premier article (court) traitant d'un sujet très particulier, extrait d'un autre article. Celui-ci provient de l'article du 25 Novembre 1789 "Des Anglais admiratifs envoient leurs compliments à l'Assemblée nationale". En évoquant les relations entre la France et l'Angleterre, j'avais été amené à parler des deux révolutions anglaises, puis des évolutions différentes de leurs noblesses respectives et finalement de l'entrée précoce de la noblesse anglaise dans le monde des affaires.
    A la fin de cet article, je finissais par me poser la question suivante :"La révolution a-t-elle eu un effet bénéfique sur les revenus des plus pauvres ?". Le hasard faisait qu'au même moment, je lisais le livre de Thomas Piketty, "Le capital au XXIe siècle" et que j'y avais trouvé une réponse claire grâce à ces trois tableaux :






    La réponse à la question "La Révolution a-t-elle eu un effet bénéfique pour les revenus des pauvres ?", est donc simple, c'est non !

    Si vous voulez plus de détails, lisez le livre de Thomas Piketty à qui j'ai emprunté ces trois graphiques. (J'espère qu'il ne m'en voudra pas)




Voilà ce que j'appelle un article court 😉


    Mais rassurez-vous le capitalisme et la misère, sont traités dans d'autres articles de ce site.







mardi 2 novembre 2021

Les drapeaux des 60 districts parisiens de la Garde Nationale en 1789

District de Saint-Jacques du Haut Pas


    Je vous offre aujourd'hui un petit bijou. Il ne s'agit rien moins que des reproductions des drapeaux des 60 districts de la Garde Nationale en 1789.

    Ces petites merveilles sont regroupées et présentées avec érudition en deux cahiers édités en 1947 par les Editions Militaires Illustrées.


    Cette édition originale a été tiré à 1500 exemplaires, dont 900 sur vélin pur fil Crèvecœur des Papeteries du Marais.

Regardez ci-dessous ce que cela donne :


    Le premier cahier présente l'histoire de ces drapeaux rédigée par le Commandant Henry Lachouque. Le second cahier regroupe les planches dessinées par Gérard Blanckaert. Je dois dire que ces dessins sont d'une qualité peu commune, que mes photos ne peuvent pas rendre complètement. En effet, les parties dorées ou argentées des drapeaux brillent vraiment comme de l'or ou de l'argent !



Des drapeaux disparus dans les limbes du temps

    Il ne reste absolument plus rien de ces prestigieux drapeaux, car ils furent brûlés conformément à la Loi du 22 avril 1792, l'an 4e. de la Liberté, "relative au brûlement des anciens Drapeaux, Étendards & Guidons".

    Cette loi avait été rendue nécessaire par suite des difficultés qui avaient été constatées pour l'application du décret du 30 juin 1791, pour un nouveau modèle de drapeau. A partir de ce décret, chaque régiment à deux bataillons, possèderait dorénavant deux drapeaux différents. Sur le premier, on trouverait les trois couleurs nationales mais on conserverait la croix blanche avec mention du numéro du régiment. Sur le second, figureraient la croix blanche, le numéro du corps et différentes couleurs. Pour tous les drapeaux, la devise, qui existait déjà sous l'Ancien Régime, se généraliserait et s'intitulerait : "discipline, obéissance à la loi".

    L'auteur de la préface, Monsieur Rosset, Syndic du Conseil de Paris en 1947, nous dit se perdre en conjectures sur les motifs qui ont pu animer ce qu'il appelle "le zèle iconoclaste des hommes de 1792" et il fait de cet acte l'un des épisodes "caractéristiques et des plus significatifs du drame de la Révolution naissante". Il semble donc oublier que cette loi avait été signée de la main du roi Louis XVI ! D'un point de vue militaire, cette loi homogénéisait les uniformes et les drapeaux, mettant fin ainsi aux disparités chatoyantes qui contribuaient à semer la confusion sur les champs de bataille, quand dans la mêlé on se savait plus qui était qui. En revanche, je trouve intéressant qu'il qualifie les événements de 1792, de révolution naissante, ce qu'ils furent effectivement.


Le ton est donné, si j'ose dire. 

    Monsieur Rosset n'apprécie guère cette révolution populaire de 1792. Il remercie d'autant plus sincèrement le commandant Henry Lachouque pour cet ouvrage, que celui-ci partage avec lui les mêmes a priori et préjugés. Il le remercie "au nom du Conseil municipal de Paris, toujours attentif, quels que soient les hommes ou les partis qui passent à l'Hôtel de Ville".

    En effet, on comprend très vite ce que le Commandant pense du peuple de Paris ; ces gens qu'à la cour du roi on surnomme les grenouilles, rappelle-t-il. (Lisez mon article à ce sujet).

    Les Parisiens de 1789 en révolte sont qualifiés de : pègre, voyous, ivrognes, valetaille, guenilleux, bonnets gras, motionnaires, crapules, chienlit, greluchons, clercs de basoche, têtes fêlées, catins, souteneurs, galériens évadés, vagabonds sortis de leurs tanières et bien sûr, brigands. (Lire mon article "Peuple ou Populace").

Il résume sa pensée avec une citation tirée d'une comédie de Victorien Sardou (Ragagas) :

"L'émeute, c'est quand le populaire est vaincu… tous des canailles. La révolution, c'est quand il est le plus fort… tous des héros."

 

Un mot sur les uniformes

    Seul un bourgeois pouvait se payer la tenue nécessaire pour entrer dans la Garde nationale. Un uniforme coûtait 117 Livres, auxquelles il fallait ajouter 66 Livres pour l'équipement suivant :

  • 1 chemise de toile,
  • 2 cols en basin blanc
  • 1 col noir
  • 1 mouchoir en coton
  • 1 paire de bas
  • 3 paires de guêtres
  • 1 cocarde
  • 2 paires de souliers de cuir à boucles
  • 1 tire-bouton
  • 1 épinglette
  • 1 havresac en peau de veau
  • 1 boucle de col
  • 1 tournevis
  • 1 sac de toile.

    Pour mémoire, 1 Livre valait 20 sous (ou sols) et 20 sous était le montant du salaire journalier d'un ouvrier parisien (un artisan pouvait gagner jusqu'à 50 sous). L'uniforme et son équipement valait donc 243 Livres, soit 243 journées de travail d'un ouvrier.

(Je ne vous cache pas que j'essaie de trouver d'autres sources, tellement cela me semble exorbitant !)


Accès aux galeries !

    Je suis sûr que certains s'impatientent et veulent voir les gravures ! Il vous suffit de cliquer sur les images ci-dessous pour accéder aux albums. Vous constaterez, qu'à la fin de la première, il y a quelques variantes, car des sources donnaient des versions différentes :




Je continue... 😉

Ce que nous apprend la lecture de ce bel ouvrage.

1/ Concernant le commandant Lachouque, nous sommes faces à un personnage dont les préjugés vis-à-vis de la Révolution étaient courants à l'époque dans le milieu militaire (et le sont probablement encore, hélas, et pas seulement dans l'armée).

    Paradoxalement, ce militaire de carrière, au service de la République, n'aime guère la République et il méprise le peuple. Il est nostalgique de l'Ancien régime, où selon lui tous les Français étaient heureux, et seul le 1er Empire auquel il consacrera de nombreux ouvrages, trouve grâce à ses yeux.

    Si le commandant Lachouque s'intéresse autant aux magnifiques drapeaux des 60 districts de Paris, c'est parce que ce sont encore des drapeaux de l'ancien régime, les tout derniers. Leur iconographie mêle quelques nouveaux symboles (Liberté, par exemple), aux anciens qui demeurent ceux de l'héraldique monarchique et religieuse de l'Ancien régime..

    Quoi qu'il en soit, le récit des événements fait par le commandant Lachouque, n'en est pas moins d'un grand intérêt à lire. Ses préjugés, inhérents à chaque homme, ne l'empêchent pas de nous apprendre nombre de détails intéressants. Mais il est vraiment nécessaire de les croiser avec d'autres sources.

    Que s'est-il d'ailleurs réellement passé durant ces journées chaudes de Juillet 89 ? Il cite Lafayette qui aurait répondu à cette question le 24 Juillet 1789 : "On ne le sait pas on ne le saura jamais, car une main invisible dirige la populace".

    Qu'importe si d'autres ont vu parfois sortir cette main du Palais Royal ou de quelque autre endroit encore plus embarrassant !?


2/ D'un point de vue historique, on comprend ce que l'on peut déjà pu deviner à la lecture de mes articles concernant les journées révolutionnaires de Juillet 1789 ; à savoir, que la garde bourgeoise de 48.000 hommes créée à l'Hôtel de Ville de Paris le 13 Juillet 1789 à midi, devenue Garde nationale le 15 Juillet, avait plus pour objectif de protéger la Bourgeoisie du peuple, que le peuple de la dizaine de régiments qui menaçaient Paris ! (1)

(1) Royal Dragons à Paris, Royal Allemand à la Muette, Royal Cravatte à Charenton, Régiment Suisse de Reyrac à Sèvres, Régiment suisse de Salis-Samade à Issy, Régiment de Provence et de Vintimille à Saint-Denis, Berchémy-Hussards à l'Ecole Militaire et Régiments de Bouillon et de Nassau à Versailles, avec les Hussards de Lauzun.

    En effet, c'est bien la peur du peuple qui a motivé les Electeurs de Paris à former une milice bourgeoise. Comme le précise Lachouque, "ils sont les "Elus du peuple" depuis le dimanche 26 avril dernier". Oui, mais de quel peuple ? Probablement pas de celui que la faim accable.

    Il précise : "Dans les soixante districts de la capitale, "le Roi ayant reconnu leur pouvoir électif", ils ont choisi "librement les députés du Tiers aux Etats Généraux", après quoi ces électeurs auraient dû se séparer, mais, "soit pour donner leurs instructions à leurs députés, soit par ce besoin de se réunir et de s'agiter, qui est toujours dans le cœur des hommes", ils ont continué à tenir séances à l'archevêché.

    Ces grands électeurs du Tiers Etat prendront bientôt le nom (inspiré du mot anglais "Commons") de Commune de Paris. Ils éliront par acclamation Bailly, comme Maire de Paris et ils nommeront Lafayette Commandant de la Garde nationale. Le peuple n'aura pas vraiment à donner son avis. (Voir ma chronique des journées de juillet et août 1789).

    Du côté de l'Assemblée nationale constituante, les députés n'auront pour seul désir que de faire la paix avec ce roi qu'ils aiment tant et de mettre fin aux troubles qui les ont pourtant bien aidés à prendre le pouvoir. La Garde nationale leur servira en quelque sorte de bras armé. Celle-ci sera en effet plus souvent utilisée pour réprimer les émeutes que pour tourmenter les ennemis de la Révolution.

    Plus le temps passera, plus les Parisiens se défieront de cette Garde nationale commandée par le tout-puissant général Lafayette.

    Rappelons que le 17 Juillet 1791, la Garde nationale commandée par Lafayette fera feu (50 morts), sur une délégation venue déposer au Champs de Mars une pétition demandant la destitution du roi ; roi qui le mois précédent s'était enfuis, avait été rattrapé à Varennes, puis avait été pardonné et avait même vu sa pension augmentée !

    Le 29 septembre 1791, l'Assemblée constituante votera une loi sur la Garde nationale, approuvée par le roi le 14 octobre 1791. Cette loi s'inscrira dans la logique de la nouvelle constitution censitaire du 3 Septembre 1791, divisant les citoyens en différentes classes, les citoyens passifs n'ayant pas le droit de vote, et les actifs ayant le droit de vote, mais eux-mêmes divisés en 3 catégories dont seuls les citoyens actifs pouvant justifier d’une imposition directe d’au moins un marc d’argent, soit cinquante livres (c'était beaucoup) et posséder une propriété foncière, pouvaient se faire élire. Ne seront tolérés dans la Garde nationale que les citoyens passifs qui auront servi sans interruption depuis le début de la Révolution et qui seront jugés « bien intentionnés ». Hormis ces exceptions, seuls les citoyens actifs pourront être incorporés, c'est-à-dire, la bourgeoisie. (Voir mon article sur le Marc d'argent). 

    

1792

    C'est en 1792 que la Garde nationale prendra progressivement partie pour le peuple, du fait de l'aggravation de la situation, suite à la déclaration de guerre à l'Autriche du 20 Avril ; guerre souhaitée par les Girondins et par Louis XVI, mais pas pour les mêmes raisons (les uns souhaitant la victoire et l'autre souhaitant la défaite).

    En Août 1792, les armées prussiennes et autrichiennes marcheront sur Paris sans pouvoir être arrêtées, conduite par le Maréchal Brunswick, qui dans le manifeste qu'il rédigera le 25 Juillet, menacera de livrer la ville de Paris à une exécution militaire et à une subversion totale.

    Devant un si grand péril 4000 gardes nationaux seront réquisitionnés pour défendre la frontière et rejoindre l'armée du Rhin, commandée par le Général Alexis Magallon de la Morlière.

    Le 11 juillet 1792, face aux défaites militaires et aux menaces d’invasion (des Prussiens du duc de Brunswick et des émigrés du prince de Condé), l’assemblée législative déclarera "la Patrie en danger" et la levée de 50 000 volontaires parmi les gardes nationales.

    Le 30 Juillet 1792, un décret prendra des mesures contre les citoyens actifs qui se désengagent de la Garde nationale ou se font remplacer.

    Le 1er Août 1792, un décret ouvrira l'accès à la Garde nationale aux citoyens passifs.

    Le 10 Août 1792, devant la menace ennemie, les Parisiens s'insurgeront et chasseront le roi de son Palais des Tuileries ; une insurrection à laquelle prendra part la Garde Nationale.

10 Août 1792, prise des Tuileries

    Suite à l'insurrection du 10 Août 1792, les décrets des 11 et 12 août 1792 modifieront les règles et le corps électoral. "La distinction des Français entre citoyens actifs et non-actifs sera supprimée, et pour y être admis, il suffira d’être Français, âgé de vingt et un ans, domicilié depuis un an, vivant de son revenu et du produit de son travail, et n’étant pas en état de domesticité."

    La loi du 19-21 Août 1792 légalisera la réduction des soixante bataillons correspondants aux soixante districts parisiens, à quarante-huit ; ce qui correspondait au nombre des sections de la Commune.

Septembre 1792, Pont Neuf de Paris,
départ de la Garde nationale vers le front.
Tableau de Léon Cogniet

    À la fin de l’été, la situation militaire deviendra dramatique. Longwy capitulera le 23 août devant les Prussiens, Verdun se rendra. Le 26 août, l’assemblée approuvera alors, sur la proposition de Danton, une nouvelle levée de 30 000 hommes.

    Le 21 Septembre 1792, lendemain de la victoire de Valmy, ou la progression des armées étrangères sera enfin stoppée, la France deviendra une république.

20 Septembre 1792, Victoire de Valmy


    En résumé, on avait besoin d'armer le peuple pour défendre la France, raison pour laquelle la Garde nationale s'ouvrit à tous les citoyens...

La Garde nationale sera intégrée sous le commandement militaire de Paris en 1795.


    La Garde nationale aura une dernière fois son heure de gloire à Paris en 1871 lors de la Commune de Paris, quand elle sera la dernière à s'opposer aux troupes prussiennes, pour finir par se faire massacrer par les troupes versaillaises de Thiers (Plutôt le Kaiser que la Commune!). Mais ça, c'est une autre histoire...

Le Peuple et sa Garde nationale en 1871.


Merci pour votre lecture,


Bertrand Tièche, alias le Citoyen Basset !


Post Scriptum :

Je vous conseille la lecture de cet article de Florence Devenne publié en 1990 dans lequel j'ai trouvé des infos intéressantes :
"La garde Nationale ; création et évolution (1789-août 1792)".