Redécouvrez la Révolution française, avec cette étonnante chronologie commentée, illustrée de nombreuses gravures de l'époque.
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"Yippee !" Aujourd’hui 4 juillet, c’est la fête nationale aux USA. Nos amis américains fêtent la déclaration d’indépendance des 13 colonies britanniques vis-à-vis de la Grande Bretagne, votée le 4 juillet 1776. Bonne fêtes les amis !
Mais bon, connaissez-vous vraiment la raison de cette déclaration d’indépendance américaine ?
La proclamation du roi fou...
Peu de gens ont entendu parler de la proclamation de 1763 par le roi de Grande Bretagne George III d'Angleterre, surnommé le roi fou. Pourtant, celle-ci fut lourde de conséquences…
Portrait de George III en 1762.
Cette proclamation royale fut délivrée le 7 octobre 1763 par le roi George III à la suite de l'acquisition par la Grande-Bretagne de territoires français, après la fin de la Guerre de Sept Ans (1756-1763)
Cette guerre de Sept Ans fut le premier conflit européen qui puisse être qualifié de guerre mondiale. Connue pour ses combats en Amérique du Nord sous le nom de French and Indian War, elle avait opposé la Grande-Bretagne à la France et à l'Espagne et elle avait vidé les caisses de la Couronne britannique. À l'issue du conflit, la dette britannique liée à la guerre s'élevait à 317 000 000 £. Lord Jeffery Amherst, Commandant en chef des forces royales en Amérique du Nord, estimait à 10 000 le nombre de soldats nécessaire au maintien de la paix dans les territoires nouvellement acquis. Le gouvernement décida donc de garder dans les colonies une armée de plusieurs milliers d'hommes, dont le coût de maintien avoisinait les 300.000 £ annuels. Alors que les treize colonies étaient prospères, la Grande-Bretagne subissait une crise économique. Londres décida qu'une partie des frais de guerre et du maintien des troupes serait supportée par les colons américains.
La proclamation royale de 1763 avait trois principaux objectifs : organiser l’empire colonial britannique en Amérique du Nord et pacifier les relations avec les Amérindiens surtout après la révolte de Pontiac afin d'éviter la spéculation foncière.
27 avril 1763, Pontiac, le chef des Indiens outaouais appelle ses compatriotes à se soulever contre les Britanniques.
La Proclamation visait également à apaiser les craintes indiennes vis-à-vis d’une arrivée massive de paysans blancs sur leurs territoires. « La Frontière » attirait les migrants en quête de terres comme les Écossais suivis par les Allemands. L'épuisement des sols à l'est des Appalaches et la pression démographique accentuèrent la faim de terre des colons.
Cette proclamation avait donc pour but d'organiser les vastes et nouvelles terres britanniques de l'Amérique du Nord, et de stabiliser les relations avec les Amérindiens en réglementant la traite des fourrures, la colonisation et l'achat des terres à la frontière occidentale. La proclamation royale de 1763 avait aussi pour but d'assimiler les colons francophones, pour faire du Québec une vraie colonie britannique. Elle est également connue sous les appellations anglaises « Indian Bill of Rights » ou « Magna Carta for Indian affairs ».
Coup d'arrêt à la conquête de l'Ouest !
La Proclamation de George III interdisait aux habitants des treize colonies de s’installer et d’acheter des terres à l’ouest des Appalaches. La Couronne se réservait une partie du bois américain ainsi que le monopole dans l’acquisition des terres indiennes ; elle garantissait la protection des peuples indiens. Londres avait prévu la construction de forts britanniques le long de la limite de colonisation ; ce dispositif devait permettre le respect de la Proclamation mais aussi favoriser le commerce des fourrures avec les Indiens. Le gouvernement britannique estimait que ces avant-postes assuraient la défense des treize colonies et que leur financement revenait donc aux colons.
La Proclamation royale de 1763 souleva le mécontentement des colons américains qui s’étaient déjà implantés dans ces territoires indiens. Ils devaient rendre la terre et revenir dans les treize colonies.
Vous comprenez pourquoi on appela George III le roi fou ?...
Caricature du londonien Matthew Darly "Pauvre vieille Angleterre s'efforçant de récupérer ses méchants enfants américains"
Révolte fiscale
Alors oui, bien sûr, on vous raconte que les colons américains se sont révoltés contre les méchants anglais qui imposaient, entre autres, une insupportable taxe sur le thé ou les journaux. Vous avez tous entendu parler du Boston Tea Party de décembre 1773, lorsque des colons (déguisés en indiens !?) se révoltèrent et jetèrent à la mer la cargaison de thé de trois navires anglais venus des Indes. Ces contraintes fiscales étaient effectivement en violation avec la loi anglaise qui stipulait qu'aucun citoyen britannique de devait payer un impôt qui n'ait été consenti par lui-même ou ses mandataires, et les colons n'avaient effectivement pas de représentants au parlement anglais.
En 1774, les représentants des colonies, réunis en congrès, affirmèrent dans une déclaration solennelle le droit de tous les peuples de participer à l'élaboration des lois les concernant (à l'exception bien sûr des Amérindiens et des Afro-Américains.)
Quelle liberté ?
On nous présente la révolte de ces colons en 1775 comme un combat pour la liberté. Mais de quelle liberté s’agissait-il selon vous ? La liberté des esclaves dans les plantations ? La liberté des Indiens qui allaient ensuite subir un vrai génocide ? Pas vraiment. La liberté dont il était question, c’était juste la liberté de commercer, celle que réclameront les révolutionnaires Girondins, ceux qui souhaitaient que la devise de la France soit « Liberté égalité propriété ». Ah bon ? Vous êtes déçus ? Désolé.
Si on parlait du Canada ?
Beaucoup l'ignorent, mais en 1775, deux armées américaines,
voulant affaiblir la position des Britanniques en Amérique du Nord, envahirent
le Canada. L'une avança le long du lac Champlain, prit Montréal et marcha sur
Québec. Elle y rejoint une seconde armée arrivée difficilement par voie
terrestre à travers le Maine. Le 31 décembre 1775, une force de soldats
réguliers britanniques et de miliciens francophones et anglophones infligèrent
une cuisante défaite aux assaillants. Les Américains demeurèrent à l'extérieur
de Québec, souffrant du froid, de la faim et de maladies. En mai 1776, des
troupes régulières britanniques et des troupes engagées dans les provinces
allemandes de Brunswick et de Hess-Hanau arrivèrent en renfort par mer, et les
Américains se retirèrent. (Source Musée canadien de la guerre. et History Map)
Mais ils n’en avaient pour autant pas fini avec les
Canada puisque les USA tentèrent de l’envahir de nouveau en 1812. Ils
échouèrent mais ils eurent plus de succès en 1848 contre le Mexique dont ils annexèrent
la moitié du territoire, du Texas à la Californie.
Washington et La Fayette à Valley Forge
Et la France dans tout cela ?
Ah oui, j’oublie de vous dire qu'à partir de 1777 la France aida, en hommes, en argent, en fusils et canons, lesdits américains durant toute cette guerre qui ne se termina qu'en 1783. Comment pouvait-il en être autrement, après la défaite de la France face à l'Angleterre à la fin de la terrible guerre de sept ans ? L’aide de la France fut tellement considérable qu’elle causa la ruine de nos finances. Face à l’opposition des nobles et du clergé qui refusèrent toutes les propositions de réformes fiscales lors des « Assemblées des notables » organisées en 1787 et 1788, le roi Louis XVI accepta la proposition du Tiers Etat d’organiser des Etats Généraux. La suite, vous la connaissez...
Mais ne soyons pas ingrats, ils nous ont quand même sacrément aidés lors des deux précédentes guerres mondiales. De nombreux cimetières sont là pour un témoigner.
Liberté, terreur, légendes dorées ou noires...
Ne faisons pas trop de mauvais esprit à l'encontre du discours de liberté de nos amis américains. Nous savons trop bien comment s'éteindront les rêves de liberté de la Révolution française. L'Histoire sert aussi, quoi qu'on en dise, à raconter de belles histoires qui font rêver les gens. Des mythes fondateurs et autres légendes dorées, qui lorsqu'ils sont partagés par un même peuple, constituent le ciment du contrat social.
Les Américains sont particulièrement doués pour la glorification de leur histoire, comme de leur culture en générale. Ils appellent cela le soft power. Contrairement à notre Révolution, leur Révolution a été écrite par les vainqueurs. Raison pour laquelle leur révolution, largement aussi sanglante que la nôtre n'est pas entachée d'une légende noire. Leurs historiens sont horrifiés par notre Terreur qui ne dura que 17 mois. Mais comment appeler le génocide des Indiens, l'esclavages des africains et la ségrégation raciale dont les lois ne furent abolies qu'en 1964 ? Sinon une forme de Terreur qui dura près de deux siècles ?
Regardez cet extrait du magnifique film Barry Lyndon de Stanley Kubrick qui représente une bataille durant cette guerre en Amérique.
Alors bonne fête amis Américains !
Je ne me moquais donc pas lorsque je souhaitais une bonne fête à nos amis américains. L'histoire n'a jamais été une discipline simple. Elle fait partie des sciences humaines. Elle est donc souvent sujette à interprétations.
Et tout ce qui est prétexte à se rassembler et faire la fête est une bonne chose !
Merci de votre lecture.
Bertrand Tièche, alias le Citoyen Basset.
Post Scriptum :
Tous les Américains n'ont pas la même vision de cette guerre d'indépendance. Je vous conseille le lire cet article sur ce site au nom bien surprenant "JACOBIN" : Défense de la Révolution américaine.
Si vous souhaitez une lecture plus traditionnelle, avec des Anglais méchants et des Indiens cruels, je vous propose cet excellent article, très détaillé du site HistoryMaps.
Cet article a été publié initialement sur ma page Facebook :