Redécouvrez la Révolution française, avec cette étonnante chronologie commentée, illustrée de nombreuses gravures de l'époque.
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4 AOUT 1789 Haut-relief en bronze figurant au pied du monument à la République, Place de la République à Paris.
Ce décret du 11 clôture la série de décrets des 4, 6, 7 et 8 août 1789, qui tous ont eu pour objet de mettre en pratique la fameuse abolition des privilèges décrétée dans des conditions "un peu particulières" lors de la fameuse nuit du 4 au 5 août.
" Art, 1er. L'Assemblée nationale détruit entièrement
le régime féodal. Elle décrète que, dans les droits et devoirs, tant féodaux
que censuels, ceux qui tiennent à la mainmorte réelle ou personnelle, et à la
servitude personnelle, et ceux qui les représentent, sont abolis sans indemnité
; tous les autres sont déclarés rachetables, et le prix et le mode du rachat
seront fixés par l'Assemblée nationale. Ceux desdits droits qui ne sont point
supprimés par ce décret continueront néanmoins à être perçus jusqu'au
remboursement.
" Art. 2. Le droit exclusif des fuies et colombiers est
aboli.
« Les pigeons seront enfermés aux époques fixées par les
communautés ; durant lequel temps, ils seront regardés comme gibier, et chacun
aura le droit de les tuer sur son terrain.
" Art. 3. Le droit exclusif delà chasse et des garennes
ou vertes est pareillement aboli, et tout propriétaire a le droit de détruire
et faire détruire, seulement sur ses possessions, toute espèce de gibier, sauf
à se conformer aux lois de police qui pourront être faites relativement à la
sûreté publique.
«Toutes capitaineries même royales, et toute réserve de chasse,
sous quelque dénomination que ce soit, sont pareillement abolies ; et il sera
pourvu, par des moyens compatibles avec le respect dû aux propriétés et à la
liberté, à la conservation des plaisirs personnels du Roi.
«M. le président est chargé de demander au Roi le rappel des
galériens et des bannis pour simple fait de chasse, l'élargissement des
prisonniers actuellement détenus, et l'abolition des procédures existantes à
cet égard.
" Art. 4. Toutes les justices seigneuriales sont supprimées
sans aucune indemnité, et néanmoins les officiers de ces justices continueront
leurs fonctions jusqu'à ce qu'il ait été pourvu par l'Assemblée nationale à
l'établissement d'un nouvel ordre judiciaire.
" Art. 5. Les dîmes de toute nature, et les redevances
qui en tiennent lieu, sous quelque dénomination qu'elles soient, connues et
perçues, même par abonnement, possédées par les corps séculiers et réguliers,
par les bénéficiers, les fabriques, et tous gens de mainmorte, même par l'ordre
de Malte, et autres ordres religieux et militaires, même celles qui auraient
été abandonnées à des laïques, en remplacement et pour option de portions
congrues, sont abolies, sauf à aviser aux moyens de subvenir d'une autre
manière à la dépense du culte divin, à l'entretien des ministres des autels, au
soulagement des pauvres, aux réparations et reconstructions des églises, et
presbytères, et à tous les établissements, séminaires, écoles, collèges,
hôpitaux, communautés et autres, à l'entretien desquels elles sont actuellement
affectées.
« Et cependant, jusqu'à ce qu'il y ait été pourvu, et que les
anciens possesseurs soient entrés en jouissance de leur remplacement,
l'Assemblée nationale ordonne que lesdites dîmes continueront d'être perçues
suivant les lois et en la manière accoutumée.
« Quant aux autres dîmes, de quelque nature qu'elles soient,
elles seront rachetables de la manière qui sera réglée par l'Assemblée ; et
jusqu'au règlement à faire à ce sujet, l'Assemblée nationale ordonne que la
perception en sera aussi continuée.
" Art. 6. Toutes les rentes foncières perpétuelles,
soit en nature, soit en argent, de quelque espèce qu'elles soient, quelle que
soit leur origine, à quelques personnes qu'elles soient dues, gens de mainmorte,
domanistes, apanagistes, ordre de Malte, seront rachetables ; les champarts de
toute espèce, et sous toutes dénominations, le seront pareillement, au taux qui
sera fixé par l'Assemblée. Défenses seront faites de plus à l'avenir créer
aucune redevance non remboursable.
" Art. 7. La vénalité des offices de judicature et de
municipalité est supprimée dès cet instant. La justice sera rendue
gratuitement. Et néanmoins les officiers pourvus de ces offices continueront
d'exercer leurs fonctions et d'en percevoir émoluments jusqu'à ce qu'il ait été
pourvu par l'Assemblée aux moyens de leur procurer leur remboursement.
" Art. 8. Les droits casuels des curés de campagne sont
supprimés, et cesseront d'être payés aussitôt qu'il aura été pourvu à
l'augmentation des portions congrues et à la pension des vicaires, et il sera fait
un règlement pour fixer le sort de curés des villes.
" Art. 9. Les privilèges pécuniaires, personnels ou
réels, en matière de subsides, sont abolis à jamais. La perception se fera sur
tous les citoyens el sur tous les biens, de la même manière et de la même forme
: et il va être avisé aux moyens d'effectuer le payement proportionnel de
toutes les contributions, même pour les six derniers mois de l'année
d'imposition courante.
" Art. 10. Une constitution nationale et la liberté publique
étant plus avantageuses aux provinces que les privilèges dont quelques-unes
jouissaient, et dont le sacrifice est nécessaire à l'union intime de toutes les
parties de l'empire, il est déclaré que tous les privilèges particuliers des
provinces, principautés, pays, cantons, villes et communautés d'habitants, soit
pécuniaires, soit de toute autre nature, sont abolis sans retour, et
demeureront confondus dans le droit commun de tous les Français.
" Art. 11. Tous les citoyens, sans distinction de naissance,
pourront être admis à tous les emplois et dignités ecclésiastiques, civiles et
militaires, et nulle profession utile n'emportera dérogeance.
" Art. 12. A l'avenir il ne sera envoyé en cour de
Rome, en la vice-légation d'Avignon, en la nonciature de Lucerne, aucuns
deniers pour annales ou pour quelque autre cause que ce soit ; mais les
diocésains s'adresseront à leurs évêques pour toutes les provisions de
bénéfices et dispenses, lesquelles seront accordées gratuitement, nonobstant
toutes réserves, expectatives et partages de mois, toutes les églises de France
devant jouir de la même liberté.
" Art. 13. Les déports, droits de cotte-morte,
dépouilles, vacal, droits censaux, deniers de Saint-Pierre, et autres du même
genre établis en faveur des évêques, archidiacres, archiprêtres, chapitres,
curés primitifs et tous autres, sous quelque nom que ce soit, sont abolis, sauf
à pourvoir, ainsi qu'il appartiendra, à la dotation des archidiaconés et des
archiprêtres qui ne seraient pas suffisamment dotés.
" Art. 14. La pluralité des bénéfices n'aura plus lieu
à l'avenir, lorsque les revenus du bénéfice ou des bénéfices dont on sera
titulaire excéderont la somme de 3,000 livres. Il ne sera pas permis non plus
de posséder plusieurs pensions sur bénéfices, ou une pension et un Bénéfice,
si le produit des objets de ce genre que l'on possède déjà excède la même somme
de 3,000 livres.
" Art. 15. Sur le compte qui sera rendu à l'Assemblée
nationale de l'état des pensions, grâces et traitements, elle s'occupera, de
concert avec le Roi, de la suppression de celles qui seraient excessives, sauf
à déterminer à l'avenir une somme dont le Roi pourra disposer pour cet objet.
« Art. 16. L'Assemblée nationale décrète qu'en mémoire des
grandes et importantes délibérations qui viennent d'être prises pour le bonheur
de la France, une médaille sera frappée, et qu'il sera chanté en actions de
grâces un Te Deum dans toutes les paroisses et églises du royaume.
« Art. 17. L'Assemblée nationale proclame solennellement le
Roi Louis XVI Restaurateur de la liberté française.
« Art. 18. L'Assemblée nationale se rendra en corps auprès du
Roi, pour présenter à Sa Majesté l'arrêté qu'elle vient de prendre, lui porter
l'hommage de sa plus respectueuse reconnaissance, et la « supplier de permettre
que le Te Deum soit chanté dans sa chapelle, et d'y assister elle-même.
« L'Assemblée nationale s'occupera, immédiatement après la
constitution, de la rédaction des lois nécessaires pour le développement des
principes qu'elle a fixés par le présent arrêté, qui sera incessamment envoyé
par MM. les députés dans toutes les provinces, avec le décret du 10 de ce mois,
pour y être imprimé, publié, même au prône des paroisses, et affiché partout
où besoin sera. »
Par la fenêtre ci-dessous, vous pouvez écouter un podcast de France Culture évoquant ce décret, depuis le site Retronews :
La nouvelle de l’abolition des privilèges n’étant pas encore
parvenue dans tous les recoins du royaume, ou alors ses bienheureux
destinataires n’ayant pas tous été vraiment convaincus, de sérieux troubles
continuent d’éclater çà et là, qui inquiètent grandement les députés de
l’Assemblée nationale, et ce, d’autant plus que certains possèdent de jolis
château qu’ils ne voudraient pas voir partir en fumée.
Il y a donc urgence à rétablir l’ordre ! Raison pour
laquelle le décret sur le rétablissement de la tranquillité publique est à
l’ordre du jour de cette séance de l’assemblée nationale.
« Monsieur Target en donne lecture au nom du comité de
rédaction.
M. Dupont juge convenable qu'on établisse une formule pour
avertir le peuple qu'on agira contre ceux qui fomenteront et participeront à
des mouvements séditieux comme contre les rebelles. Il cite le bill de mutiny
publié en pareil cas en Angleterre, et il réclame l'exécution de formes
semblables dans la proclamation proposée.
M. le duc du Châtelet appuie cette proposition ; il ajoute
qu'elle produit en Angleterre les effets les plus prompts pour dissiper les
attroupements, puisqu'après la promulgation de cette loi cinq personnes
trouvées ensemble sont arrêtées et condamnées à mort.
Un Marquis explique que dans diverses provinces, le peuple,
non content de brûler les chartriers des seigneurs, porte ses excès jusque sur
les personnes. Il propose donc d'ajouter à la proclamation que tous les
habitants d'une paroisse répondront des incendies, à moins qu'ils ne prouvent
que ces désordres ont été commis par des étrangers. »
J’espère que vous aurez apprécié le contenu des 2 dernières
mesures. Si cinq personnes se rassemblent, il faut les condamner à mort, et
tous les habitants d’une paroisse répondront d’un incendie, à moins qu’ils ne
fassent la preuve que celui-ci a été commis par des étrangers. Je vous laisse
juges…
Ce projet de décret comprend également un serment que les
soldats et leurs officiers devront prêter. Ce qui donne lieu à une discussion
au sein de l’assemblée. Nous avons en effet pu constater lors des événements de
juillet que les troupes n’étaient pas toutes fiables, ce qui d’ailleurs, avait
plutôt bien arrangé les députés de ladite assemblée. Mais voici qu’à présent
ceux-ci craignent qu’elles ne deviennent dangereuses.
Un intervenant dont le nom ne figure pas au procès-verbal, a
me semble-t-il, une position intelligente et surtout très critique concernant
ce serment. Écoutons-le :
"Je trouve deux inconvénients à la formule du serment
proposé. Le premier, que le serment devait se prêter devant Je corps entier. Le
second, qu'en ajoutant : sur la réquisition des municipalités, il faut
distinguer celles qui ne sont pas électives, parce que celles qui ne le sont
pas sont dans la dépendance du Roi.
Quelle que soit la formule du serment que l'on fasse faire
aux troupes, ce serment ne doit et ne peut jamais engager ni lier le soldat au
point de le faire agir contre les devoirs de l'homme et du citoyen. Trop
longtemps on a regardé le soldat comme un automate fait pour suivre simplement
l'impulsion qu'on lui donne. Dans le siècle de la philosophie, dans ce siècle
de lumières, où tous les devoirs de l'humanité sont connus, le soldat doit être
regardé comme un homme et comme citoyen.
Où en serions-nous, grand Dieu ! Si les gardes-françaises
n'eussent pas eu assez de raison, assez de philosophie, pour préférer les
devoirs sacrés de l'homme et du citoyen aux lois rigides du code militaire ?
Ils eussent fait main-basse sur leurs concitoyens ; Versailles et Paris eussent
été inondés de sang ; la France serait aujourd'hui le théâtre d'une guerre
civile d'autant plus funeste, que le despotisme aurait voulu écraser et faire
trembler des êtres qui tous voulaient recouvrer leurs premiers droits, les
droits imprescriptibles de la liberté.
Pourquoi donc aujourd'hui vouloir encore lier le soldat
citoyen par une formule de serment qui aurait entraîné les plus grands malheurs
si le soldat s'y était conformé ? Et pourquoi croire lier l'officier par une
formule de serment qu'il saura, quand il lui plaira, faire plier devant ses
intérêts et son ambition ? On peut conclure, et non sans raison, qu'un serment,
n'importe la forme sous laquelle on le fait prêter, est absolument inutile.
Peut-on croire en effet que l'homme méchant, que l'homme traître, se fera un
scrupule de fausser son serment ? Ces être-là, pour qui le crime a des
attraits, et qui sont prêts à sacrifier le sacré et le profane à leurs intérêts
particuliers, à leur passion dominante, ne seront jamais arrêtés par un serment
; au contraire, violer leur parole, trahir leur conscience, est une aiguillon de
plus pour les porter à faire le mal.
L'homme vertueux, n'importe l'état qu'il professe dans la
société, se gardera bien de dépasser le but marqué par les premiers devoirs,
les premiers droits de l'homme et du citoyen. Ainsi, quelque tournure que l'on
donne à la formule du serment qu'on lui fera prêter, son cœur lui dira
toujours, lui criera sans cesse qu'il doit rester immobile, et ne point écouter
la voix impérieuse d'un scélérat qui lui commande le crime.
Le maréchal de Broglie, ce général qui a pour jamais souillé
et terni les lauriers qu'il avait cueillis à la retraite de Prague, est un
exemple frappant de ce que j'avance,
Trop sensé pour avoir accepté le commandement du dernier
camp sans pénétrer les raisons de la cour, il est chargé et sera toujours
chargé, aux yeux des générations présentes ; et futures, de l'exécution de la
conspiration infernale formée contre la patrie.
Ce coupable général, pour sonder les dispositions de ses
soldats leur rappela leur serment ; n'avez-vous pas juré, leur dit-il, fidélité
au Roi ? Je compte sur votre parole. « Nous la tiendrons, répondirent les
troupes ; mais sachez qu'en promettant fidélité au Roi, jamais nous n'avons
entendu nous engager à nous souiller du sang de nos frères. »
Une connaissance des droits et des devoirs de l'homme, mise
à la portée de tous les citoyens, bien sentie d'un chacun, vaudrait infiniment
mieux que toutes les tournures et formules de serment.
L'une, en quelque façon, préviendrait le crime, en apprenant
à l'homme jusqu'où il peut aller et où il doit s'arrêter. Les autres ne sont
que des précautions inutiles contre l'homme subalterne, accoutumé au crime,
auquel il se livre d'autant plus volontiers, qu'il voit un des chefs lui en donner
l'exemple."
Monsieur Barnave écartera cet avis raisonnable en rétorquant
que la proclamation proposée n'est point une loi générale, mais un décret
provisoire relatif aux circonstances. Selon lui, le serment des troupes est
indispensable dans un moment où tous les liens de la subordination paraissent
rompus, où les troupes elles-mêmes pourraient devenir dangereuses. L'arrêté
proposé confie la force aux personnes qui ont joui de plus de confiance, en la
conférant aux tribunaux et aux municipalités.
Ce décret dont vous trouverez le texte en son entier par le
lien ci-dessous, sera bien sûr voté.
Les députés espèrent que le peuple sera tenu en respect par
la publication de ce décret. Nous verrons par la suite qu’ils rencontreront
bientôt un problème de taille avec l’armée, quand l’autorité du roi commencera
à poser question.
En effet, c’était la noblesse qui contrôlait totalement l’armée,
depuis la mise en application de l’Édit de Ségur (du nom du secrétaire d'État
de la Guerre Philippe Henri de Ségur), du 22 mai 1781, qui avait fermé l’accès
aux carrières d'officiers aux roturiers (non-nobles). Il fallait prouver quatre
degrés de noblesse ou d’être officiers de fortune ou fils d’officiers
titulaires de la croix de Saint-Louis pour pouvoir postuler un poste
d’officier. Les historiens désignent cela sous le nom de « réaction nobiliaire
», une sorte de reprise du pouvoir accaparé par le roi depuis Louis XIV.
Une ordonnance du 17 mars 1788 avait encore davantage fermé
l’armée.
Le cours de la révolution changeant peu à peu de direction,
beaucoup d’officiers nobles feront défection, allant jusqu'à quitter le pays
pour constituer une armée contre révolutionnaire.
Nous en reparlerons le temps venu. D’ici là, si le sujet
vous intéresse, vous pouvez lire ce document traitant de ladite réaction
nobiliaire :
J'espère que vous pardonnerez l'image humoristique de cet article (volée à Roger Rabbit). Je me suis dit qu'ainsi, j'allais peut-être avoir un ou deux lecteurs de plus ! Mais ne vous méprenez pas, comme d'habitude, vous allez apprendre une ou deux petites choses très étonnantes.
Cet ancien commandant militaire de l'Île-de-France, des
provinces limitrophes et de la garnison de Paris avait visiblement laissé un
mauvais souvenir pour sa gestion quelque peu brutale lors des journées chaudes
qui précédèrent la prise de la Bastille, comme lorsqu'il avait réprimé dans le sang le 28
avril 1789, l’émeute de la fabrique Réveillon, donnant l’ordre à ses Suisses,
"de tirer jusqu’à la mort du dernier homme" Il y eut des centaines de morts...
Répression violente de l'émeute Réveillon le 28 avril 1789. Dans les faits, la Révolution a commencé dès le mois d'avril 1789.
Hélas, le nouveau pouvoir bourgeois en place, tellement
empressé de se réconcilier avec son roi bien aimé, semblait éprouver quelques difficultés
à faire partager son pieux désir de pardon et de réconciliation, avec le reste
de la population !
Avec l'autorisation de Louis XVI, Besenval avait donc une
nouvelle fois quitté Paris, mais reconnu en la bonne ville de Villegruis près
de Provins,
il s'était fait de nouveau arrêter, un peu brutalement, par des citoyens pleins de rancœur.
Certains de ces faquins envisagèrent même de le lyncher !
Arrestation de Besenval
Le grand Necker fut donc obligé d'intervenir une nouvelle fois pour sauver son infortuné
compatriote. Mais Besenval fut malgré tout emprisonné un certain temps, au château de Brie-Comte-Robert avant
d'être déféré devant le tribunal du Châtelet pour crime de lèse-nation.
Il
était en effet accusé d'avoir voulu assiéger Paris et d'avoir médité l'incendie
de la ville et le massacre de ses habitants. Fort heureusement, grâce à une efficace plaidoirie de
Monsieur De Sèze, le bienheureux Besenval (bien évidemment
"innocent" de ces accusations calomnieuses et absurdes) sera
acquitté.
Comment aurait-on pu condamner un homme protégé par le roi, qui de
plus n'avait fait qu'obéir aux ordres de celui-ci ?
La Famille royale se fera d'ailleurs beaucoup de souci pour cet ancien
courtisan de la reine. Madame Elisabeth, sœur du roi dira : "j’espère qu’il
ne lui arrivera rien de fâcheux".
Un homme frappé par une maladie rare en ces temps de disette.
Les historiens royalistes, connus pour leur très grande
sensibilité, nous apprendront que la santé de ce malheureux persécuté s'altéra
durant son emprisonnement. Ils nous précisent même, sans rire, qu'un médecin,
bien évidemment charlatan, aurait été cause de son décès, pour lui avoir
prescrit un régime de truffes, de pâtés et de jambon qui acheva de le tuer. Gageons
qu'il aurait survécu s'il s'était contenté du régime des autres prisonniers
(eau et pains sec).
Ce fier militaire, si détesté des Parisiens qu'il avait
coutume de molester un peu, était malgré tout adoré de tous ceux que pouvait
l'approcher.
"Il s'était tellement fait aimer de la milice
bourgeoise qui le gardait à Brie Comte Robert que, lorsqu'il en est parti pour
être conduit à Paris, chacun de ses gardiens, en le remettant dans les mains
d'autres, a voulu obtenir d'en être embrassé, ce qu'il a fait avec la grâce
qu'il eut toujours et la gaieté d'un homme bien tranquille sur le jugement
qu'on doit porter à sa conduite. En prolongeant la captivité de ce malheureux
homme, ses ennemis savourent davantage leur vengeance et reculent tant qu'ils
peuvent l'époque où, faute de preuves, faute d'un chef d'accusation tant soit
peu raisonnable, il faudra remettre en liberté un brave militaire dont on n'eût
jamais dû punir l'obéissance à des ordres légitimes."
Des Suisses répressifs.
Si vous souhaitez en apprendre plus sur la fonction répressive des troupes suisses à Paris et découvrir qui était vraiment Besenval, je vous conseille vivement la lecture de ce texte de Alain-Jacques Czouz-Tornare
:"Les troupes Suisses à Paris et la révolution 1789 – 1792".
Il est extrait d'un livre présenté par l'illustre Michel Vovelle.
Cliquez sur l'image ci-dessous pour accéder au texte complet :
Concernant le fameux Besenval, je ne puis résister à l'envie de vous donner à lire cet extrait savoureux :
Le comte de la Marck, précieux relais de Mirabeau auprès de
la Cour, a gratifié le suisse Besenval d’un portrait peu flatteur lui
aussi :
"Il n’avait pas l’ambition d’occuper une grande place,
il n’aurait pas voulu être ministre. Lieutenant-Colonel des gardes suisses, son
seul désir était d’en devenir colonel après la mort du comte d’Affry. Mais tout
en ne se souciant pas d’être ministre, il voulait se mêler d’en faire, afin
d’avoir sur eux beaucoup d’influence. En tout il s’amusait de l’intrigue".
Toujours selon le même observateur, Besenval était parvenu à
s’emparer de l’esprit du comte d’Artois, colonel-général des Suisses et
Grisons ; ainsi disposait-il par le moyen du prince, de tout ce qui tenait
aux régiments suisses.
Ce proche de Marie-Antoinette qui lui avait servi en
avril 1779 de garde-malade durant sa rougeole, l’assidu compagnon de
plaisir du comte d’Artois, ce Suisse catholique, franchement athée et franc-maçon,
se transforma à la veille de la Révolution en défenseur d’une tradition contre
laquelle toute sa vie témoignait. Gouverneur militaire de Paris, il ne fut
l’homme de la situation qu’en ce qu’il incarnait toutes les tares de l’Ancien
régime. (C'est moi qui souligne) 😉
"Il n’est bon qu’à être suisse à la porte de
Cythère" disait de lui une dame honorable, tandis qu’un pamphlet en
faisait, à la Cour, le Suisse de la porte du Palais des plaisirs de la Reine.
Alors ? Besenval ? Héros ou crapule ? Ni l'un ni l'autre, juste le produit de son milieu et de cette époque décadente.
Petit cadeau !
Si vous voulez vous détendre un peu en lisant quelques pages d'histoire de France pour les enfants, je vous conseille de consulter ce site spécialisé en ANTOINETTHOLOGIE(Je ne plaisante pas).
Vous y découvrirez une plaisante biographie de Besenval, beaucoup plus bienveillante que la mienne.
Pour la petite histoire, il faut savoir que Facebook a
refusé deux fois en 2020 la publicité (payante) que je souhaitais faire pour cet article,
qui selon eux, enfreint leurs règles ! Je vous laisse juge de la subversivité
de cette publication qui ne fait qu'énumérer des dates d'événements
historiques. Vous comme moi, avez déjà vu passer sur votre fil d'actualité des
publicités de Facebook pour des niaiseries, voire des escroqueries. Cette
attitude de leur part est donc vraiment choquante. Impossible pour moi de faire
connaître ma page si je ne fais pas (à mes frais) un peu de publicité. Quand ils ont finalement accepté après ma troisième relance, la date du 10 août était passée depuis longtemps...
Voici ce "scandaleux" article (qui m'a valu également quelques injures).
Je vous laisse juges... 😉
10 Août 1792, prise du château des Tuileries.
Introduction
Vous aurez peut-être remarqué que la chronologie que je m'efforce de respecter sur ce site, fait que la grande majorité des articles ne concernent pour le moment que l'année 1789.
Je m'efforce malgré tout de rédiger quelques articles un peu en avance, compte tenu de l'importance de certaines dates ultérieures à 1789. La journée du 10 août 1792 est tellement importante que je devais absolument rédiger cet article. Le 10 août 1792 aurait pu être la date de notre fête nationale. Le 10 août 1792, c'est la date de la seconde Révolution française...
Du fait de l'absence provisoire d'articles sur mon site concernant l'année 1792, j'ai pensé qu'il était préférable de réaliser une petite chronologie réduite à quelques dates importantes de 1792, avant de vous parler de la journée du 10 août 1792. Il en manque, bien sûr, et toutes ne constituent pas une conséquence directe ou indirecte de la journée du 10 août. J'ai néanmoins trouvé que c'était indispensable pour donner une petite idée de la situation. Merci pour votre compréhension. 😉
2 janvier 1792, Discours de Robespierre contre la guerre.
5 janvier, discours du Girondin Maximin Isnard en faveur de la guerre.
9 février, les biens des émigrés sont mis sous séquestre.
1er mars 1792, Mort de Léopold II d’Autriche, son fils François lui
succède. Il est beaucoup plus violemment contre-révolutionnaire que son père. Léopold II, n’avait pas voulu se mêler des affaires françaises et était exaspéré par les émigrés français. Il avait même éconduit de
façon brutale le comte d'Artois. En 1791 il avait cependant été irrité par le
traitement infligé à la famille royale par suite de leur fuite arrêtée à Varennes et
il avait lancé un appel à tous les souverains d’Europe. Mais il était alors plus
préoccupé par les relations de son empire avec la Turquie que par la Révolution
française.
2 mars 1792, Dans une lettre adressée à Mercy-Argenteau, Marie-Antoinette
évoque la cherté du pain, la disparition du numéraire, la banqueroute
menaçante.
3 mars 1792,Le 3 mars 1792, Le maire
d’Etampes Simonneau, un riche tanneur, est tué sur le marché aux grains parce qu'il refusait de fixer un prix sur les produits de première nécessité. Alors
que l’Assemblée nationale en fait un martyr de la loi, le curé Pierre Dolivier et
quarante citoyens de la région d’Étampes l’accusent d’avoir provoqué ces
funestes événements en refusant l’apaisement des rumeurs, en faisant un usage
provocateur de la loi martiale, en spéculant sur les prix. Ils rédigent une
pétition qui décrit l’indignité de la condition paysanne, l’effroi provoqué par
la répression. Toute la bourgeoisie d’ordre va aussitôt en faire le martyr de
la loi et de la propriété. Le Girondin Roland déclare : « Tout ce que
l’Assemblée peut faire en matière économique, c’est de déclarer qu’elle
n’interviendra jamais. »
15 mars 1792, Création d’un ministère girondin autour de Roland, Clavière
et Dumouriez. Dumouriez est chargé du portefeuille des affaires
étrangères.
16 mars 1792, Mallet du Pan dans le « Mercure de France » écrit : "Le jour
est arrivé où les propriétaires de toutes classes doivent enfin sentir qu’ils
vont tomber à leur tour sous la faux de l’anarchie".
23 mars 1792, les Girondins sont rappelés au gouvernement par Louis XVI en raison du fait, qu'à l'instar du roi mais pour des raisons
opposées, ils aspirent à la guerre contre l'Autriche.
Les Girondins voient dans cette guerre le moyen
de séparer le roi des autres monarques et des émigrés, du moins dans
l'hypothèse d'une victoire (ainsi que celui de s'enrichir par le pillage de
guerre et renflouer ainsi les caisses de l'Etat).
Le roi, quant à lui, aspire à la défaite de ses troupes et au rétablissement de ses droits par les
étrangers. Robespierre et la Montagne sont opposés à cette guerre dont ils mesurent les dangers. Robespierre est depuis toujours un opposant farouche à la guerre hors des frontières. Le 23 mai 1790 il avait fait voter par la constituante :
"La nation française déclare solennellement qu'elle ne fera plus jamais de
guerre d'agression."
A partir de décembre 1791 jusqu'au 10 février 1792, Robespierre prononça plus de 8 discours contre la guerre. Vous pouvez lire celui prononcé devant le Club des Jacobins, le 18 décembre 1791 (En cliquant sur le lien).
« M. Dumouriez (…) a le projet
de commencer ici le premier par une attaque de la Savoie et une autre par le
pays de Liège. C’est l’armée de La Fayette qui doit servir à cette dernière
attaque. Voilà le résultat du Conseil d’hier. »
20 avril 1792. Après avoir constitué un ministère Girondin, le roi annonce
à l’assemblée législative qu’il déclare la guerre de la nation française un roi
de Bohême et de Hongrie, (c’est-à-dire au neveu de sa femme). Cette expression
désigne le Saint-Empire et les possessions de la maison d'Autriche. L'empereur
élu, appartient à la maison d'Autriche, il règne sur le Saint-Empire, il est
également roi de Bohême et de Hongrie et a comme allié la Prusse, dont la
partie située hors de l'Empire est un État indépendant.
Déclaration de guerre.
Des généraux peu fiables.
Le 29 avril 1792, le général Théobald Dillon(Irlandais), est exécuté par ses soldats parce qu’il a ordonné la
retraite devant l'ennemi. Un ordre du général Dumouriez fait sortir Dillon de la
Place de Lille à la fin d'avril, avec ordre de marcher sur Tournai avec dix
escadrons, six bataillons, et six pièces de canon. Les instructions de
Dumouriez lui prescrivent de montrer sa troupe, afin de provoquer un
mouvement en Belgique, et Dumouriez lui recommande expressément de n'entamer
aucune action.
Rien ne se passe comme prévu. Les deux armées se retrouvent
soudains face à face et hésitent. Les Autrichiens tirent quelques coups de
canon. Dillon, ordonne la retraite en la faisant protéger par ses escadrons.
L'infanterie se retire, mais les cavaliers croyant à une trahison,
bouleversent la troupe en se repliant. Les Autrichiens ne les poursuivent
pas et regagnent Tournai.
De retour au camp, la troupe s'en prend à ses officiers
qu'elle considère comme des traîtres pour ne pas avoir engagé le combat. Dupont,
l'aide-de-camps est tué d'une balle dans le front, le frère de celui-ci
Dupont-Chaumont reçoit plusieurs balles dans ses habits (les balles de pistolets
perçaient difficilement la grosse laine des uniformes). Le colonel du génie Berthois, est pendu aux créneaux de la ville avec un autre
officier. Dillon, blessé à la tête d'un coup de pistolet tiré à bout
portant, tente de s'enfuir en voiture (vous en savez un peu plus à présent sur
l'inefficacité des balles de pistolets). Il est extirpé de la carriole, puis
massacré à coup de sabres et de baïonnettes. Plus tard dans la nuit, son
cadavre est jeté dans un grand feu.
Assassinat de Dillon
Ce triste événement fut révélateur de la profonde méfiance que
les soldats français éprouvaient envers leurs officiers. Rappelons que depuis l’édit de Ségur en 1781, les postes d’officiers étaient exclusivement réservés à la noblesse.
Cette méfiance se révélera justifiée plus tard par les trahisons de Lafayette, Dumouriez et de quelques autres.
La Fayette trahira en effet sa patrie dans la nuit du 19 au
20 août 1792. En pleine guerre, il choisit de
fuir sa responsabilité de général en chef de l'armée du Nord, en franchissant les lignes ennemies avec son état-major, et après avoir même vainement cherché à soulever ses
troupes contre l'Assemblée nationale !
Dumouriez fera bien pire en mars 1793 ! Il concevra le
projet, en accord avec les Autrichiens, de marcher sur Paris avec les débris de
ses vieilles troupes, de dissoudre la Convention nationale et de
faire proclamer roi son jeune lieutenant, le duc de Chartres, qui, le deviendra en 1830 sous le nom
de Louis-Philippe 1er. En conséquence il eut, le lendemain même de la bataille
de Neerwinden, une entrevue secrète à Louvain avec le colonel Mack, chef
d'état-major du prince de Cobourg, général des Armées autrichiennes.
Arrestation des députés de la Convention par Dumouriez
29 avril 1792, Le curé Pierre Dolivier
présente aux jacobins, puis à l’Assemblée législative le 1er mai, un texte
expliquant les causes des violences contre Simonneau le Maire d’Étampes, qui ne
rencontre aucun succès : son radicalisme fait peur. Dolivier rédige une
pétition qui est signée par des citoyens d'Étampes. Le texte dépasse le cadre
de l’affaire Simonneau. Deux conceptions de l’économie s’affrontent ; une économie totalement libre ou une économie encadrée par l'Etat. Seul
Robespierre, qui avait pris le parti des habitants d'Étampes, oser défendre
Dolivier aux Jacobins, et publier sa pétition dans son journal, Le Défenseur de
la Constitution.
5 mai 1792 l’Assemblée Législative
porte les effectifs de l'armée à 214 bataillons de 800 hommes, soit plus
de 170 000 hommes (171 200 exactement).
12 mai 1792, Antoine Chrysostome Quatremère de Quincy, député du
département de Paris à l'Assemblée législative fait décréter le 12 mai 1792,
malgré une vive opposition de la Montagne, une fête pour honorer la mémoire de
Jacques Guillaume Simonneau, le maire d'Étampes.
17 mai 1789, le ministère Girondin prend connaissance des intrigues des Feuillants et de Lafayette qui communiquent avec l'Empereur et promettent explicitement de marcher sur Paris et de faire fermer le club des Jacobins. Ils savent également que Lafayette refuse de conduire ses armées à la guerre. Lafayette et les Feuillants invitent le roi à la résistance. Les Girondins préfèrent cacher ces manœuvres et négocient avec Lafayette.
18 mai 1792, Les chefs militaires réunis à Valenciennes déclarent
impossible une offensive.
"La Gironde battait de l’aile. Elle avait reçu deux
coups : à la frontière, par le premier échec d’une guerre qu’elle avait
conseillée ; — aux Jacobins, par la victoire de Robespierre sur Brissot.
Elle se releva par un coup de foudre, qui frappa directement la Cour,
indirectement ceux qui, comme la Cour, avaient été les partisans de la paix,
par conséquent Robespierre. La machine était bien montée, avec une entente
habile des besoins d’imagination qu’avait cette époque, émue, inquiète,
crédule, tout affamée de mystère, accueillant avidement tout ce qui lui faisait
peur. C’était la dénonciation à grand bruit d’un comité autrichien, qui,
trente ans durant, avait gouverné la France et ne voulait aujourd’hui pas moins
que l’exterminer.
Le premier coup de tambour pour attirer l’attention, coup
rudement retentissant, donné fort, à la Marat, le fut par le Girondin Carra
dans les Annales patriotiques. Le comité autrichien, disait-il, préparait
dans Paris une Saint-Barthélemy générale des patriotes. Montmorin, Bertrand,
étaient nominalement désignés ; grand émoi : le juge de paix
du quartier des Tuileries n’hésite pas à lancer un mandat d’amener contre
trois représentants du témoignage desquels Carra s’était appuyé.
Ainsi audace pour audace. La Cour avait organisé cette
redoutable garde, dont on a parlé plus haut ; elle pensait avoir aussi une
notable partie de la garde nationale. La nouvelle du revers de Flandre avait
été saluée de tous ces aristocrates par des cris de joie. L’Assemblée, battue à
Mons, à Tournai, ne leur faisait plus grand’peur ; ils la méprisaient au
point d’oser lancer contre elle un simple juge de paix, un tout petit magistrat
du quartier des Tuileries.
Ils perdirent confiance, quand Brissot (le 23 mai) ramenant
la dénonciation à des termes plus sérieux, parmi quelques hypothèses, articula
les faits certains que la publication des pièces et le progrès de l’histoire
ont décidément confirmés. Il établit que les Montmorin et les Delessart,
véritables mannequins, étaient dirigés par le fil que tenait M. de
Mercy-Argenteau, l’ancien ambassadeur d’Autriche, alors à Bruxelles ; lui
seul en effet eut toujours pouvoir sur la reine. D’autre part, Louis XVI avait
son ministre à Vienne, au su de toute l’Europe, M. de Breteuil.
Appuyé sur de nombreuses pièces, systématisant et liant des faits isolés,
Brissot montra le comité étendant sur la France un réseau immense d’intrigues,
la travaillant au moyen d’une puissante manufacture de libelles. Une des pièces
citées était curieuse ; c’était une lettre de notre envoyé à Genève,
qui se déclarait autorisé par le roi à prendre du service dans l’armée du comte
d’Artois. Brissot concluait à l’accusation de Montmorin et voulait qu’on
interrogeât Bertrand de Molleville et Duport-Dutertre. Pour Bertrand, ses Mémoires nous
prouvent aujourd’hui qu’il n’y a jamais eu de défiance mieux méritée."
La Police secrète royaliste ou le Comité autrichien.(Source Wikipedia) 😉
C'est effectivement Bertrand de Molleville, avec aussi RivaroletArnaud
de Laporte, qui coordonnèrent l'effort des royalistes pour calmer la fureur
de la révolution et servir leur roi. Plus de 1500 personnes (auteurs, chanteurs
et lecteurs publics) furent employées à cet effet pour lesquels ils dépensèrent
plus de 200 000 livres par mois. En ce temps, Arnaud
de Laporte, créa un club appelé "Le National" au Carrousel. Les
appartements au Louvre occupés par La Porte furent le centre de stratégie où le
roi et ses fidèles discutaient et lançaient leurs efforts.
Cette police secrète royaliste, surnommée donc « comité
autrichien », avait surtout comme but de payer des ouvriers du faubourg
Saint-Antoine pour s’emparer des tribunes, comme le faisaient les
révolutionnaires et faire applaudir et crier pour le roi. Dans le courant de
juin, Bertrand de Molleville avait présenté à Louis XVI un
plan conçu par un sieur Buot, juge de paix, que ce prince lui avait adjoint
comme agent principal. Ce projet n'eut d'autre résultat que la mort de son
auteur.
Bertrand de Molleville essayait de surveiller les démarches
des partisans de la révolution et voulait procurer à la cour un peu plus
d'influence sur la garde nationale, et les habitants de Paris
les plus politisés. Deux mois après, Bertrand de Molleville fut dénoncé
au Club des Jacobins, comme un des principaux
membres du comité autrichien. Il adressa dans cette occasion, au tribunal de
police correctionnelle, une plainte à laquelle le funeste sort d’Étienne de La
Rivière empêcha de donner quelque suite. Ce juge de paix avait admis la plainte ; mais on lui reprocha à lui-même des poursuites illégales contre plusieurs
députés, et un décret d'accusation fut lancé contre lui.
Bertrand de Molleville continua néanmoins à faire tout ce
qu’il put en faveur de son roi. Il fut l’un des derniers hommes politiques à se
rendre régulièrement au palais des Tuileries. Mais il ne fit ainsi que
compromettre le roi en croyant le servir.
Le 29 mai 1792, le jour du licenciement de la Garde constitutionnelle du Roi,
Antoine François Bertrand de Molleville demanda au roi d'aller à l'Assemblée
avec 100 gardes, et d'y dénoncer ce texte de lois : "Je viens
remplir ce devoir, et vous représenter l'irrégularité du décret qui ordonna le
licenciement de ma garde constitutionnelle..."
Après la journée du 20 juin 1792, il soumit à Louis XVI un plan pour assurer sa sortie
de Paris ; mais une indiscrétion en empêcha l'exécution. Molleville avait
inutilement épuisé la liste civile pour payer des clubs royalistes, des
orateurs de tribunes, des orateurs de groupes, de prétendus séducteurs qui ne
séduisaient personne et gardaient pour eux les fonds de la cour. L'argent n'achète par tout...
27 mai 1792, l'Assemblée législative Girondine décide de faire arrêter les prêtres catholiques réfractaires, considérés comme des agents ennemis. Louis XVI refuse. Il suffit de la dénonciation de vingt citoyens pour qu’un prêtre soit condamné à la déportation. Le but des Girondins, selon la phrase d’Isnard, c’est : « Le dénouement de la révolution doit être l’exclusion du christianisme ».
29 mai 1792, L'Assemblée législative ordonne la dissolution de la garde royale.
Le dimanche 3 juin 1792, lors d'une cérémonie nationale,
consacrée au respect de la loi, on accroche aux voûtes du Panthéon de Paris
l'écharpe tricolore du maire d'Étampes, mort le 3 mars 1792, victime de son
dévouement à la Patrie. A l’occasion de cette fête, les Girondins font
remplacer la devise inventée par Robespierre « Liberté, égalité,
fraternité », par « Liberté, égalité, Propriété ».
Un mot sur le couple royal avant le 10 aout.
La reine ?
Vergniaud et Brissot avaient accusé la reine de diriger le "comité autrichien". C'est peu probable, mais il n'empêche que l'on découvrira plus tard dans la correspondance de Marie Antoinette, que celle-ci avait envoyé le 14 décembre 1791 un billet à son amant Fersen dans lequel elle avait écrit :"L'armée de Luckner va faire mouvement, avertissez qui de droit."
Le roi ?
Comme à son habitude, Louis XVI menait double jeu. Il venait d'adresser un courrier à Breteuil, lui disant :"L'état physique et
moral de l'armée française est tel qu'elle ne peut même pas faire 6 mois de
campagne." On pourra donc douter de son enthousiasme quant à cette guerre qu'il venait de déclarer.
Sa fuite le 20 juin 1791 et son piteux retour le 25 juin 1792, à la suite de son arrestation à Varennes, n’avait guère amélioré son image auprès des
Français. Les Girondins avaient prétendu qu’il avait été enlevé ! Mais le peuple
n’avait pas été dupe et peu à peu, l’idée que l’on pouvait se passer de ce roi si peu fiable, avait fait son chemin.
Les événements se précipitent.
8 juin 1792, L’Assemblée
législative décide de créer une armée de 20 000 volontaires fédérés destinée
à défendre Paris.
10 juin 1792, le ministre Roland adresse un courrier au
roi pour le mettre en garde contre ses vétos successifs qui exaspèrent la
population.
Véto du 27 avril 1792
11 juin 1792, Veto du roi sur la loi condamnant les prêtres réfractaires et sur la
formation du camp des Fédérés.
11 juin 1792, un combat a eu lieu à quelques
kilomètres au nord de Maubeuge entre l'avant-garde de l'armée de La Fayette (cantonnée à Maubeuge) et un corps
d'Autrichiens venus de Mons. Les Autrichiens, dix fois supérieurs en nombre infligent de lourdes pertes à l'armée française. Le commandant de l'avant-garde française,
le maréchal de campJean-Baptiste Gouvion, estété tué d'un
coup de canon et de nombreux volontaires du bataillon de la Côte-d'Or périssent. Lafayette était resté à Maubeuge, sans intervenir.
12 juin 1792, Le roi renvoie les
ministres girondins et nomme les Feuillants pour les remplacer. Un des Feuillants, Adrien Duport conseille au roi d'instaurer une dictature après avoir dissout l'Assemblée.
13 juin 1792, L’Assemblée
législative exprime les regrets de la nation à la suite du renvoi des Girondins.
15 juin 1792, Dumouriez
démissionne du nouveau ministère.
19 juin 1792, Dumouriez se
présente aux Jacobins, coiffé d’un bonnet rouge, embrasse Robespierre et promet "à ses frères et amis de triompher ou de mourir avec eux".
Lettre des Jacobins de Marseille au maire de Paris contre le
monarque français et sa "liste civile corruptrice"
20 juin 1792, Les Girondins irrités par l'usage abusif du droit de véto se sont lancés dans une campagne véhémente contre le roi. Le 20 juin, une foule de Parisiens venus des Faubourgs (10 à 20 000
manifestants selon Roederer), encadrée par des gardes nationaux et de ses
représentants, dont le brasseur Santerre pénètre dans l'assemblée, au
sein de laquelle Huguenin lit une pétition demandant le retrait d’un
énième véto du roi. Puis la foule en colère envahit le palais des
Tuileries.
Le Maire de Paris, Jérôme Pétion, tente d'empêcher les manifestants d’envahir le palais des Tuileries et les appartements royaux, mais il est accusé par le roi et le directoire du département d'avoir favorisé l'émeute et facilité, par son absence de réaction, l'invasion des Tuileries.
Entrée des Sans-culottes à l'Assemblée
Le roi est pris à partie par les émeutiers et affronte le défilé de la foule pendant deux heures durant. Il accepte de coiffer le bonnet phrygien et de boire à la santé de la Nation Legendre
lui aurait dit : « Monsieur, vous êtes un perfide, vous nous avez toujours
trompés, vous nous trompez encore ». Malgré cela, Louis XVI refuse de retirer son veto comme de rappeler les ministres girondins, en invoquant la loi
et la constitution.
Cette journée du 20 juin aurait pu tourner au drame, tant la colère des
Parisiens était grande. Une estampe célèbre représente la sœur du roi,Mme Elisabeth confrontée à des sans-culottes dans une salle du château des Tuileries. Elle porte en
légende l’échange suivant entre les différents acteurs :
« Des scélérats crient : où est la Reine ? Nous voulons sa tête ! La
princesse Elisabeth qui n’avait pas voulu quitter son frère dans ce danger se
tourne vers ces assassins, présente sa poitrine à leurs poignards, et leur dit
avec fermeté. La voici la Reine. — Non, non, s’écrient deux ou trois fidèles
serviteurs qui l’accompagnaient, ce n’est pas la Reine, c’est Madame Elisabeth
— Eh ! Messieurs, de grâce, leur dit la princesse, ne les détrompez pas,
ne vaut-il pas mieux qu’ils versent mon sang que celui de ma
sœur ?… »
Le général Dumouriez a été vu par Mathieu Dumas au milieu de la foule des émeutiers, coiffé d'un chapeau à larges bords, enveloppé d'une longue redingote et montrant le château d'un geste menaçant.
21 juin 1792, Louis XVI convoque Pétion, le Maire de Paris, pour lui demander quel est l'état de la ville au lendemain de la journée d'émeute aux Tuileries, et il le reçoit très mal.
28 juin 1792, La Fayette se présente à l'Assemblée après avoir quitté son armée, afin de réclamer des mesures contre les Jacobins. Ces derniers se méfient de lui (depuis octobre 1789). Ils craignent un coup d'état de la part du général et ils lui suscitent nombre de problèmes dans son armée. La Gauche de l'Assemblée ne réussit pas à obtenir un blâme pour cet acte d'indiscipline, mais le général n'obtient de soutient ni de la part de la Cour qui se méfie de lui, ni de la part de la garde nationale dont il avait été le commandant général.
9 juin 1792,La Fayette propose au roi de se mettre sous sa protection à Compiègne, où il a massé ses troupes. Louis XVI, toujours aussi peu clairvoyant refuse. Lafayette ayant raté son projet de coup d'état, il quitte Paris pour rejoindre son armée. Son effigie sera brûlée au Palais Royal.
2 juillet 1792, A l'Assemblée législative, les Girondins décident de contourner le Veto royal en appelant les fédérés à Paris pour le célébrer 14 juillet. Départ du
bataillon marseillais qui arrivera le 30 à Paris.
(Les Fédérés seront encouragés à rester à Paris après le 14
juillet afin de faire pression sur le roi. Leur comité se réunit régulièrement
chez le menuisier Duplay, rue Saint Honoré, où loge Robespierre qui est très
actif auprès d’eux pour leur trouver des logements chez les patriotes parisiens
et ainsi les lier au peuple de Paris.)
6 juillet 1792, Jérôme Pétion est suspendu de ses fonctions
de Maire de Paris par le département et remplacé par Philibert Borie, mais
cette mesure accroît sa popularité ; les sections s'arment pour réclamer
son retour, et Pétion sera le héros des célébrations du 14 juillet 1792.
L'Assemblée législative décide alors de le rétablir dans ses fonctions.
8 juillet 1792, L'Assemblée
législative rend obligatoire le port de la cocarde tricolore pour les hommes.
(Elle sera obligatoire pour les femmes, le 21 septembre 1793).
10 juillet 1792, Démission des
ministres feuillants du gouvernement.
11 juillet 1792, Face aux
défaites militaires et aux menaces d’invasion (des Prussiens du duc de
Brunswick et des émigrés du prince de Condé), l’assemblée législative déclare
« la Patrie en danger » et la levée de 50 000 volontaires
parmi les gardes nationales. 15.000 Parisiens s'enrôlent !
14 juillet 1792, Louis XVI prête serment sur l'autel de la patrie, lors de la célébration de la prise de la Bastille. Mais l'ambiance a dramatiquement changé. On y brûle les armes des familles émigrées. Plus personne ne crie "Vive le roi" et certains participants ont écrit à la craie sur leurs chapeau "Vive Pétion".
Que valait vraiment ce serment de Louis XVI ?
Souvenons-nous que le 12 octobre 1789, Louis XVI écrivait
secrètement à son cousin le roi d’Espagne : « J’ai choisi Votre
Majesté, comme chef de la seconde branche pour déposer en vos mains la
protestation solennelle que j’élève contre tous les actes contraires à
l’autorité royale, qui m’ont été arrachés par la force depuis le 15 juillet de
cette année, et, en même temps, pour accomplir les promesses que j’ai faites
par mes déclarations du 23 juin précédent. »
Le 7 juillet 1791, Louis XVI avait donné les pleins pouvoirs
à ses frères, les comtes de Provence et d'Artois pour négocier en son nom avec
les cours d'Europe. (Klinckowström, le petit neveu de Fersen, 1:145).
17 juillet 1792, Une nouvelle pétition demande la déchéance du roi.
22 juillet 1792, l'assemblée législative déclare la
patrie en danger, sur l'annonce officielle de l'approche d'une armée prussienne
de 62.000 hommes.
Proclamation de la Patrie en Danger
Enrôlement de volontaires
22 juillet 1792, Un jugement est rendu à Versailles, qui
condamne à la peine de mort les nommés Gérard Henri, ancien garde-chasse à
Étampes, et Baudet Gabriel, charretier à Étampes, ancien carabinier. Des gardes
nationaux marseillais et parisiens dirigés par Claude Fournier-L'Héritier dit
Fournier l'Américain, séjourneront à Étampes et libèreront les prisonniers.
Le 23 juillet 1792, une nouvelle pétition demande la
déchéance du roi.
Le 25 juillet 1792, Brunswick, le chef de l'armée prussienne,
commet l’erreur de menacer Paris d’une destruction totale dans le manifeste qu’il fait publier ; manifeste probablement rédigé par un noble
émigré, le Marquis de Limon, prôné par le conte de Fersen(ami de la reine). Cela ne fait qu'attiser la colère grandissante des Parisiens, dont les fils sont envoyés sans chaussures et en guenilles défendre la frontière, armés de simples piques !
Le 26 juillet 1792, le Girondin Brissot demande la déchéance du roi et
l’instauration du suffrage universel.
Le 29 juillet 1792, Robespierre fait un discours aux
Jacobins pour demander la déchéance du roi.
Le 30 juillet 1792, la garde nationale devient accessible
aux "citoyens passifs". Elle n’est donc plus réservée à la seule
bourgeoisie. N'y voyez pas là un élan démocratique mais plutôt la crainte devant l'arrivée des formidables armées prussiennes et autrichiennes.
Le soir du 30 juillet 1792, lors du dîner des Marseillais qui venaient d'arriver à Paris, ceux-ci se confrontent violemment aux grenadiers du roi.
Combat lors du dîner des Marseillais
Terrible mois d'août !
Voici le mois d’aout 1792, la situation militaire est
terrible, la France est envahie par les forces armées des Autrichiens et de
leurs alliés Prussiens. L’armée française essuiera revers sur revers jusqu’en
septembre, où elle réussira à infliger une défaite à ses ennemis, le 20 septembre à Valmy. (Le lendemain, la royauté sera abolie et le 22 la république sera proclamée.)
1er août 1792, le manifeste de Brunswick est connu à Paris. Le journal Le Moniteur le publiera le 3 août.
Le 2 août 1792, Le bataillon marseillais demande à l’Assemblée la déchéance du roi.
Le 3 août 1792, quarante-sept des quarante-huit sections parisiennes se prononcent pour la déchéance du roi. Le Maire de Paris, Jérome Pétion de Villeneuve est chargé de porter l'adresse des commissaires des 48 sections exigeant la déchéance du roi.
Le 8 août 1792, l'Assemblée absout Lafayette.
Le 9 août 1792, L'Assemblée n'ose pas aborder la pétition qui a été déposée par 47 sections parisiennes demandant la déchéance du roi et elle se sépare sans débat à 19 heures.
Danton rentre dans la soirée du 9 août de sa maison d'Arcis sur Aube.
Aucune figure politique ne va réellement participer à l'insurrection populaire qui va avoir lieu le lendemain 10 août. Pas même Danton que les historiens appellent souvent l'homme du 10 août et qui ne fera que récupérer le mouvement.
Ce 10 août 1792, Louis XVI a atteint un point de non-retour. Par ses hésitations, erreurs et même ses trahisons, il a fini par perdre non seulement l'amour, mais aussi la confiance du peuple. Le moment de bascule aura probablement été sa tentative de fuite le 20 juin 1791 et son arrestation à Varennes. Avant même son retour à Paris, une pétition avaient été signée de 30.000 noms demandant l'établissement de la République...
Dès les premiers jours d'août tout était disposé pour
l'insurrection. Pétion, le maire de Paris, laissera faire par son inaction et son silence. Santerre et Westermann, qui devaient tous deux
se faire une réputation de révolutionnaires, vont prendre la tête des insurgés.
Les sections étaient prêtes à marcher. Elles avaient reçu
des armes et de la poudre (qui leur a fourni ?) ; le plan de l'attaque des Tuileries était fait, les
faubourgs avertis, et au premier signal le peuple de Paris devait envahir le
palais du roi. Pour dernier ajournement, la section des Quinze-Vingts, avait
arrêté :
"que si le corps législatif ne prononçait pas le 9 la
déchéance du roi ; si justice et droit n'étaient pas faits au peuple, à minuit
le tocsin sonnerait, la générale battrait, et tout se lèverait à la fois."
Roederer (Procureur
Syndic du Département de Paris) rapporte que Jérôme Pétion de Villeneuve,
le maire de Paris, avait fait le point sur la situation à deux heures du matin
avec le roi.
Dans la nuit les sections parisiennes avaient envoyé à l'Hôtel de Ville des commissaires révolutionnaires qui avaient déposé la municipalité légale et fondé une Commune insurrectionnelle. Le marquis de Mandat, commandant de la garde nationale fut exécuté.
Au matin du 10 août, le
premier cortège en route vers les Tuileries est celui des ouvriers des
faubourgs Saint Antoine et Saint Marceau. Il arbore en tête un drapeau rouge sur
lequel est écrit : "Loi martiale du peuple souverain contre la
rébellion du pouvoir exécutif." Ce drapeau rouge constitue une revanche contre le drapeau rouge arboré par la garde nationale lorsqu'elle avait tiré sur la foule venue déposer une pétition pour la destitution du roi, lors de la journée du 17 juillet 1791.
Il est rejoint en
route par de nombreux Parisiens disposant de quelques pièces de canons et
d’armes. Le défilé arrive par la
place du Carrousel. Un second cortège, celui du faubourg Saint-Marcel stationne de l’autre côté, près du fleuve
aux abords de la résidence royale des Tuileries.
Dans la salle du manège située à proximité du château des
Tuileries, la séance de l’Assemblée nationale législative avait débuté à sept
heures du matin. Peu de députés sont présents lorsqu’éclatent les premiers
coups de feu à neuf heures trente. La fusillade cesse à onze heures du matin. (On apprend dans le compte rendu de séance, par
l’intervention de M. Roederer, les informations relatives aux événements.)
La cour, avertie du complot qui se tramait, s'était mise en
mesure de repousser une éventuelle insurrection par la force. Louis XVI avait précédemment fait rappeler les gardes suisses stationnés à Rueil et à Courbevoie. Ce matin du 10 août, le roi avait passé en revue les troupes qui défendaient le château des Tuileries, mais il avait reçu peu
de témoignages d'affection au cours de cette inspection.
C’était Antoine Jean Galiot Mandat de Grancey, le commandant
général de la Garde nationale qui était chargé
de la défense des Tuileries. Mais, ne disposant que de peu de gardes à son
service, il avait prévu de défendre les cours du château où il avait posté des
Suisses et des grenadiers. Roederer
avait précisé aux gardes suisses qu’en cas d’attaque, ils pouvaient se défendre
conformément à loi. Mandat avait
également massé des gardes nationaux dans le jardin et placé des canons
au niveau du Pont-Neuf et de l'Arcade Saint-Jean, derrière l'hôtel
de ville de Paris, pour arrêter
les émeutiers à leur descente des faubourgs. La mort de Mandat en
laissant les défenseurs du château sans chef, eut surement des conséquences sur
l’issue des affrontements.
La nouvelle de la mort de Mandat avait changé les projets de la cour qui demeurait incertaine sur les mesures qu'il fallait prendre.
Les canons des assaillants étaient déjà pointés sur le
palais et environ trente mille hommes et femmes marchaient en colonnes serrées
contre les entrées principales, que les résolutions de Louis XVI n'étaient toujours
pas arrêtées.
Le danger augmentait à chaque minute car une partie des
gardes nationaux manifestaient leurs sympathies pour ceux qu'ils étaient
chargés de repousser ; et, dans le cas d'une attaque victorieuse, les quelques
serviteurs encore fidèles au roi pouvaient bien mourir à ses côtés, mais non
point protéger sa vie.
Dans cette périlleuse extrémité, Roederer, procureur-syndic
du conseil départemental, voyant le désordre qui régnait au château où il
s'était rendu, et jugeant des dangers que courait la famille royale, propose au
roi de se confier, lui et sa famille à l'Assemblée législative. C'était l’ultime
chance de salut ; car, si le peuple l'emportait, il était douteux qu’il
épargnât un roi devenu suspect à la nation.
La reine résiste vivement d'abord, par fierté, à la
proposition de Roederer. "Madame", lui dit Roederer, " vous
exposez la vie de votre époux et celle de vos enfants, songez à la
responsabilité dont vous vous chargez." Elle se décide alors à suivre le
roi à l'Assemblée nationale. "Monsieur, dit-elle à Roederer, vous répondez
de la vie du roi et de mes enfants. Madame, reprit le procureur syndic, Je
réponds de mourir à leur côté, mais je ne promets rien de plus."
Le roi et sa famille traversent le jardin des Tuileries,
uniquement séparés de la foule par un ruban tricolore tendu comme une barrière
aux abords de l'avenue des Feuillants. Informée de l’arrivée de la famille
royale, l'Assemblée législative envoie une députation au-devant du roi afin de
l'introduire dans la salle des séances, lieu d'asile réputé inviolable.
Une foule immense se presse curieusement sur les pas de
Louis XVI. A un instant où elle forme une barrière presque impénétrable, un
grenadier de haute taille, d'une figure farouche, s'empare du dauphin, le prend dans ses bras et l'enleve ; la reine jette un cri. "Ne craignez rien", dit
le soldat, "je ne veux pas lui faire de mal," et il porte l’enfant sur le
bureau. Louis XVI, sa jeune fille, la reine Marie Antoinette, madame Élisabeth,
sœur du roi, peuvent enfin pénétrer dans l'Assemblée accompagnés de Roederer et
de deux ministres.
Le roi s'adresse en ces termes à l'Assemblée :
"Je viens pour éviter un grand crime ; je me
croirai toujours en sûreté lorsque je serai parmi les représentants de la
nation."
Vergniaud répond :
"Sire, vous pouvez compter sur la fermeté, de
l'Assemblée législative ; ses membres ont juré de mourir en défendant les
droits du peuple et des autorités constituées."
L'Assemblée accueille le roi et sa
famille chassés et poursuivis par l'émeute, avec un silencieux respect, mais
sans lui témoigner aucune sympathie.
Louis s'assis à côté du président. Mais très vite une
discussion s’engage sur le fait que sa présence empêche toute délibération
conformément à la constitution de 1791 qui stipule que le roi ne peut assister aux délibérations de l’Assemblée législative. Il lui est alors demandé
de se tenir à distance afin de respecter la prescription de la Constitution de
1791 selon laquelle le roi ne peut assister aux délibérations de l’Assemblée
législative. Dans un premier temps Louis s’assit à l’autre bout de la salle et
les « grandes dames » ainsi que les ministres s’installent aux fauteuils
des ministères. Puis il leur est demandé de s’installer dans la tribune du logographe
chargé de recueillir les débats, soit une petite loge séparée de la salle par
des barreaux.
Roederer expose la situation inquiétante des Tuileries,
quand tout à coup on entend le bruit du canon : une consternation profonde
régne alors dans la salle. Le roi intervint alors en disant : « Je
vous avertis, que je viens de défendre aux Suisses de tirer. »
Mais les décharges de l'artillerie continuent, une vive
mousqueterie s’en suit bientôt ; on se bat au château. L’histoire nous
dit (comme souvent en pareil cas) que par un malentendu inexpliqué, un coup de
fusil parti sans que l’on sache de quel côté et que cela donna le signal de l’affrontement
général. Les assaillants se rendent rapidement maîtres du Château des Tuileries.
La colère du peuple se concentre sur les gardes suisses qui sont accusés d’avoir
commencé le combat et les émeutiers ne font aucun quartier aux 600 gardes
suisses. Pour les Parisiens, ces gardes suisses qui parlent tous Allemand
pour la plupart, sont considérés comme une troupe étrangère. Le combat est sanglant.
Beaucoup d’assaillant sont armés de piques, de fourches et de sabres. Dans le
tumulte une voix s’écrie « Grâce aux femmes, ne déshonorez pas la nation. »
A l’Assemblée toute proche,
Alexis Thuriot, député de la Marne et proche de Danton prend partie pour les sections
parisiennes. Suit une courte intervention du député Bazire qui s’inquiéte de La Fayette. C’est alors que se présente une délégation de la commune
insurrectionnelle, composée de Messieurs Huguenin, Léonard Bourbon, Tronchon,
Derieux, Vigaud et Bullier, députés des commissaires des sections. Ces derniers
s’étaient réunis au préalable à la maison commune. Huguenin s’exprime ainsi :
« Ce
sont les nouveaux magistrats du peuple qui se présentent à votre barre. Les
nouveaux dangers de la patrie ont provoqué notre nomination ; les circonstances
la conseillaient, et notre patriotisme saura nous en rendre dignes. Le peuple
las enfin depuis quatre ans éternel jouet des perfidies de la cour et des
intrigues, a senti qu'il était temps d'arrêter l'Empire sur le bord de l'abîme.
Législateurs, il ne nous reste plus qu'à seconder le peuple ; nous venons ici,
en son nom, concerter avec vous des mesures pour le salut publique ; Pétion,
Manuel, Danton, sont toujours nos collègues. Santerre est à la tête de la force
armée. (Applaudissements.)
Que
les traîtres frémissent à leur tour ! Ce jour est le triomphe des vertus
civiques. Législateurs, le sang du peuple a coulé ; des troupes étrangères qui
ne sont restées dans nos murs que par un nouveau délit du pouvoir exécutif, ont
tiré sur les citoyens. Nos malheureux frères ont laissé des veuves et des
orphelins. Le peuple qui nous envoie vers vous, nous a chargés de vous déclarer
qu'il vous investissait de nouveau de sa confiance ; mais il nous a chargés en
même temps de vous déclarer qu'il ne pouvait reconnaître, pour juger des
mesures extraordinaires auxquelles la nécessité et la résistance à l'opposition
l'ont porté, que le peuple français, votre souverain et le nôtre, réuni dans
ses assemblées primaires. (Applaudissements.) »
(Source Archives
Parlementaires - Université Stanford et BNF Tome 47 pages 641 et 642 ; séance du matin du 10 août. (Orthographe d'époque))
Puis des groupes de citoyens viennent
déposer au sein de l’Assemblée de l’argent, des bijoux, papiers et toutes sortes
de biens saisis dans le château des Tuilerie. L’Assemblée décrète que toutes ces
biens relèvent du ressort de la maison commune. Des citoyens sont ensuite
admis à la barre. L’un d'eux s'exprime ainsi : « Le calme paraît se
rétablir dans la capitale ; mais les flammes qui consument le château des
Tuileries s'augmentent de plus en plus. Les citoyens qui l'environnent, à qui
j'ai représenté qu'il était inutile de s'en prendre au monument, sont disposés
à secourir les pompiers s'ils s'approchaient. Nous prions l'Assemblée de donner
des ordres aux officiers pompiers, de garde ici, d'aller à leur corps de garde
pour donner l'ordre à ceux qui y sont, de venir au secours du château ».
L'Assemblée chargea son Président de donner les ordres les plus prompts aux
pompiers et décréta que la municipalité ou les commissaires des sections,
réunis à la commune, prennent « sur-le-champ les mesures les plus actives
pour arrêter l'incendie »...
François Lamarque, à l’origine
d’une demande de déchéance du roi le 9 août intervint au nom de la commission
extraordinaire des Douze. Il y lit cette courte Adresse de l'Assemblée
nationale aux Français :
« Depuis longtemps de vives inquiétudes agitaient tous les départements ; depuis
longtemps le peuple attendait de ses représentants des mesures qui pussent la
sauver. Aujourd'hui les citoyens de Paris ont déclaré au Corps législatif qu'il
était la seule autorité qui eût conservé leur confiance. Les membres de
l'Assemblée nationale ont juré individuellement, au nom de la nation, de
maintenir la liberté et l'égalité, ou de mourir à leur poste : ils seront
fidèles à leur serment. L'Assemblée nationale s'occupe de préparer les lois que
des circonstances si extraordinaires ont rendu nécessaires. Elle invite les
citoyens, au nom de la patrie, de veiller à ce que les Droits de l'homme soient
respectés et les propriétés assurées. Elle les invite à se rallier à elle, à
l'aider à sauver la chose publique, à ne pas aggraver, par de funestes
divisions, les maux et les dangers de l'Empire (Applaudissements.) ».
Après que les vainqueurs fussent venus en masse annoncer à
l'Assemblée la défaite des Suisses et qu’ils eurent appris au roi que sa cause
était perdue aux Tuileries, l'Assemblée législative rendit le décret célèbre
par lequel Louis XVI était provisoirement suspendu de la royauté.
Louis XVI et la famille royale furent
détenus au couvent des Feuillants.
Un plan d'éducation fut ordonné pour le prince royal.
Une Convention nationale fut convoquée et Danton fut nommé
ministre de la Justice.
La seconde révolution française venait de commencer !
Il ne s’agissait plus d’une révolution conduite uniquement par la bourgeoisie, comme en 1789. Pour la première fois dans l'histoire de France, le Peuple parvenait aux marches du pouvoir. Il s'agissait cette fois d'une révolution "populaire" (avec tout ce que peut exprimer de hideux ce mot chez certains).
Peut-être comprenez-vous mieux à présent pourquoi cette date est généralement passée sous silence de nos jours ?
Cette révolution accouchera en septembre d’une belle enfant, la première république.
Cette révolution saura vaincre l’année suivante les 11 armées étrangères envahissant le pays.
Cette révolution abolira l’esclavage, instaurera le suffrage universel et bien d’autres choses dont nous profitons encore.
Cette révolution se terminera le 28 juillet 1794 et tout reviendra ensuite dans le "bon ordre", inutile de vous préciser lequel. (Cela dit sans porter de jugement de valeur. Il ne s'agit là que de ce que j'appelle, "la mécanique humaine".)
BONUS
Merci d'avoir lu ce très long article. Pour vous récompenser, voici un extrait de film et un livre témoignage.