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Une représentation de la noblesse. "Le dîner d'huitres" (1735) Jean-François de Troy |
Il semble que la noblesse ait commencé de comprendre qu'elle allait peut-être devoir céder un peu sur ses privilèges. Cela faisait déjà plusieurs années que le roi et ses ministres des finances successifs, tentaient de supprimer les exemptions pécuniaires de celle-ci, ces privilèges fiscaux que le peuple appelait "Les Abus".
On aurait pu croire qu'après cette renonciation par le Clergé puis la Noblesse, les États généraux allaient se terminer. Mais un autre enjeu était devenu prépondérant, celui de la représentation nationale. Nous allons voir également au cours de la séance de ce jour que des contradicteurs vont conditionner cette décision à l'établissement de nouveaux principes constitutionnels. La route va être longue jusqu'à la nuit du 4 Août...
Le Clergé venait de donner l'exemple le 20 Mai.
C'est le comte d'Antraigues qui va porter ce jour cette proposition.
Un mot sur le comte d’Antraigues.
Cet homme épris des idées de son temps avait également publié en 1788 un « Mémoire sur les États généraux, leurs droits et la manière de les convoquer », dans lequel il reconnaissait le Tiers-état comme étant le Peuple, et ce peuple, l’État lui-même ! :
« Le Tiers-état est le Peuple et le Peuple est le fondement de l'État ; il est en fait l'État lui-même… C'est dans le Peuple que réside tout le pouvoir d'une nation et c'est pour le Peuple qu'existent tous les états. »
Il avait même renié sa propre classe en écrivant :
« La noblesse héréditaire est le plus grand fléau que Dieu, dans sa colère, ait répandu sur les humains. »
Son enthousiasme pour la Révolution s’éteindra cependant après les événements des 5 et 6 octobre au cours desquels la vie de la reine avait été menacée (il aurait été amoureux de celle-ci quelques années auparavant). Ayant participé au complot ourdi par le marquis de Favras pour faire fuir la famille royale, le comte s’enfuira en Suisse après l'exécution du Marquis le 17 Février 1790. Ce sera le début d'une nouvelle vie pleine de rebondissements.
Motion portée par le comte.
Voici l'extrait des archives parlementaires relatant cette séance de la Noblesse.
M. d'Entraigues propose d'autoriser les commissaires
conciliateurs à annoncer à ceux du tiers-état la renonciation de la noblesse à
ses privilèges pécuniaires.
Cette motion trouve des contradicteurs qui sont fondés sur ce que cette renonciation ne peut être générale et indéfinie ; qu'il sera nécessaire de la particulariser, ce qui ne fera qu'augmenter les sujets de discussion avec l'ordre du tiers, et ensuite sur ce que leurs cahiers leur enjoignent de ne faire cette renonciation qu'après que la constitution sera établie.
Il est arrêté, à la majorité de 143 voix contre 62, que les commissaires de la noblesse seront chargés d'annoncer à ceux du tiers-état que la plus grande partie des cahiers dont sont chargés les députés de la noblesse, portant renonciation à tous ses privilèges pécuniaires, relativement aux impôts, tels qu'ils seront fixés par les États généraux, l'Assemblée est dans la ferme résolution d'arrêter cette renonciation, après que chaque ordre délibérant librement aura pu établir les principes constitutionnels sur une base solide.
La séance est levée.
Source :
https://www.persee.fr/doc/arcpa_0000-0000_1875_num_8_1_5884_t2_0044_0000_18
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Je vous remercie pour ce commentaire.
Bien cordialement
Bertrand