(Hommage à Roger Rabbit) |
Le Tribunal du Chatelet "juge" Bezenval.
Souvenez-vous ! Le baron suisse Pierre Victor de Besenval de Brünstatt a déjà été "sauvé" deux
fois !
Une première fois de la vindicte populaire, à la suite de son
arrestation par les zélés miliciens de Villenauxe-la-Grande le 30 juillet dernier, où sont venus à son secours les bourgeois de la Commune de Paris, les députés de l'Assemblée nationale, le grand Necker et même par sa majesté Louis XVI qui
l'a autorisé à s'exiler !!!
Une seconde fois le 10 août lorsqu’il fut de nouveau arrêté par de mauvaises gens après avoir été reconnu près de Provins ! Son compatriote suisse, le grand Necker a de nouveau dû intervenir une nouvelle fois. Hélas, l’infortuné baron avait malgré tout été emprisonné un certain temps, au château de Brie-Comte-Robert avant d'être déféré devant le tribunal du Châtelet.
On l'accuse de presque rien.
De quoi l’accuse-t-on ? Mais de trois fois rien ! Juste du crime de lèse nation ! On le soupçonne d'avoir voulu assiéger Paris et d'avoir médité l'incendie de la ville et le massacre de ses habitants ! Une bagatelle ! Qui a donné ces ordres ? Hum, hum… D’autres questions ? (Besenval avait reçu le 4 juillet l’ordre du roi de rassembler ses troupes sur Paris pour le 13 juillet.)
Tout ce que l'on peut dire en faveur de M. de Besenval, c'est que, Suisse d'origine, il est depuis soixante ans au service du Roi et qu'il ne pouvait se supposer d'autres devoirs que celui d'obéir au Roi et à ses ministres. Il n’est d’ailleurs pas le seul à être accusé du crime de lèse nation, avec lui figurent depuis le 30 novembre sur le banc de l’indignité : Charles-Eugène de Lorraine, Charles Marie Auguste Joseph de Beaumont, comte d'Autichamp, Victor-François de Broglie, Charles Louis François de Paule de Barentin garde des Sceaux et Louis Pierre de Chastenet de Puységur ministre de la Guerre, pour leurs agissements répressifs à l’égard des Parisiens révoltés en juillet 1789.
Pauvre Favras !
J’allais oublier le marquis de Favras ! Ce dernier sera d’ailleurs le seul
à être condamné. Il sera pendu le 19 février 1790 en place de Grève à Paris.
Le Marquis de Favras aurait d’ailleurs pu être sauvé s’il avait parlé, attendu
que les complots dont on l’accusait avait été ourdis sous l’autorité du frère
du roi, le comte de Provence et même de la reine. Mais son confesseur, l’abbé
le Duc (fils naturel de Louis XV), lui aurait "conseillé" de se
soumettre au sort qui lui est réservé au nom de la famille royale et de sa
famille…
L'historien Albert Mathiez nous donne plus de détails :
"Quand le marquis de Favras, au mois de décembre 1789, avait comploté d'assassiner Bailly et Lafayette, d'enlever le roi, et qu’il avait été découvert par la trahison d'un de ses agents, Talon avait été chargé de l'instruction au Châtelet. Il avait rendu au roi et à Monsieur, à cette occasion, les services les plus signalés, il était intervenu auprès de l'accusé pour l'empêcher de mettre en cause les hauts personnages qui avaient encouragé et subventionné sa téméraire entreprise. Talon avait gardé secret le mémoire justificatif que Favras lui avait remis avant de marcher au supplice, mémoire dans lequel Favras affirmait qu'il n'avait fait qu'exécuter les ordres de Monsieur et de la Reine."
Le marquis de Favras, mort pour avoir obéi au roi. |
Le malheureux Favras fera donc diversion et les autres pourront discrètement s’éclipser.
Il y a la loi et l'ordre.
Vous aurez compris qu’en ce mois de décembre le tribunal du Chatelet est quelque peu embarrassé par ce sacré suisse sur lequel la justice populaire a déjà deux fois fait main basse pour l’expédier en prison !
Mais de quoi se mêle le Peuple ? Me direz-vous ! Peuple de Paris qui s’indigne vraiment de la facilité avec laquelle M. de Besenval se défend d'avoir concouru aux attentats qui manquèrent de terrasser les Parisiens la veille du 14 juillet.
Entre Besenval, les témoins (presque tous à décharge), et les juges du Châtelet, on jurerait assister à une aimable partie jouée d’avance ! L'opinion publique n'est pas dupe de cette comédie et parfois le public murmure dans la salle. Hier, le président a dû donner lecture de la loi martiale pour faire taire les éventuels candidats à la contestation.
On colporte, sur M. de Besenval, ce mot d'une femme du peuple : « Il faut que ce foutu gueux-là ait déjà été repris de justice. Voyez comme il se défend ? ! »
Et puis il y a l'ordre des choses...
Ne vous inquiétez pas pour la justice, elle sera fidèle à
elle-même en condamnant très sévèrement les émeutiers des 5 et 6 octobres qui
ont ramené le roi à Paris, à la grande satisfaction des députés, et qui en
récompense, croupissent dans les infâmes cachots du Chatelet.
Le grand Châtelet, réputé pour ses immondes cachots. |
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Bien cordialement
Bertrand