jeudi 17 décembre 2020

17 Décembre 1789 : Gravure de la représentation de la cocarde. Vraiment M. Prudhomme ?

 

Source : Musée Carnavalet
Deux étrangetés.

    Cette gravure est extraite du journal "Les révolutions de Paris" de Monsieur Prudhomme. Son titre est le suivant : « REPRESENTATION DE LA COCARDE NATIONALE dont le relief est blanc sur un fond bleu entouré de rouge. »

Elle comporte deux étrangetés.

1/ La légende nous dit que ladite cocarde a été acceptée par Monsieur Le Marquis De La Fayette le 17 décembre 1789. (C’est la raison pour laquelle je l’affiche sur la page de cette date). Mais pourquoi cette date du 17 décembre, alors que la présentation au roi de la première cocarde a eu lieu le 17 juillet 1789 (en présence de La Fayette)?

2/ J’ai beau regarder et regarder encore, je ne vois pas de cocarde sur cette gravure…

Étonnant, non ? Il y a parfois des surprises de ce genre sur les estampes...

Bailly et La Fayette accueillant Louis XVI à l'Hôtel de Ville

Vérifications infructueuses

    J’ai voulu vérifier dans le journal de Prudhomme. Mais je n’ai rien trouvé, ni dans le numéro de la semaine du 12 au 19, ni dans celui de la semaine du 19 au 26 décembre.

Mystère non résolu.

    Je n'ai pas trouvé de réponses au mystère de cette gravure. Mais c’est une bonne raison pour que vous lisiez ou relisiez mon passionnant article sur le 17 juillet 1789, c’est-à-dire le jour de la cocarde. Vous découvrirez alors que tout ce que l’on vous à dit jusqu’à présent sur les trois couleurs devenues nationale, n’est pas tout à fait vrai !

Cliquez sur la cocarde !

Digression indispensable

Parlons du journal de M. Prudhomme : "Les révolutions de Paris"

1er numéro du journal
en date du 15 juillet 1789
.
    Au cours de mes recherches, j’ai découvert avec grand intérêt les analyses publiées dans ce journal. Dans le numéro de la semaine du 12 au 19, on y explique bien le problème posé par le projet de transformer la caisse d’escompte en caisse nationale. Et dans le numéro suivant, le rédacteur raisonne plutôt brillamment sur le meilleur moyen de faire de bonnes lois, malgré la haine (contre les Juifs), les opinions (contre les comédiens) et les préjugés (contre les bourreaux). On y trouve même abordée la question de la légitimité de la peine de mort.

    Le créateur de ce célèbre journal, et son premier rédacteur, fut un écrivain assez obscur, nommé Tournon. Mais le journal "Les révolutions de Paris" dût son succès à son éditeur, Louis Marie Prudhomme, qui n'en était pourtant que le directeur-propriétaire, et à son principal rédacteur, le jeune et brillant Elisée Loustallot. (Tournon se brouilla assez tôt avec Prudhomme, et il quitta le journal après la publication du n° 15). Grâce au talent de Loustallot, le journal eu rapidement du succès (200.000 lecteurs dès ses début). Loustallot avait pris part à de nombreux événement révolutionnaires. Il défendait tout particulièrement les droits de l'homme et la liberté de la presse. Hélas le malheureux mourut très jeune le 19 septembre 1790, à l'âge de 28 ans.  Parmi les rédacteurs qui succédèrent à Loustallot, figurèrent entre autres, Fabre d'Églantine, Léger-Félicité Sonthonax (abolitionniste réputé), Sylvain Maréchal (Anticlérical) et Pierre-Gaspard Chaumette.


De la bonne façon de faire une bonne législation.

A titre d'exemple sur la qualité des articles de ce journal, je vous propose de lire cet extrait édifiant du numéro relatif à la semaine du 19 au 26 décembre :

Louis Marie Prudhomme

"Il y a trop de lumières répandues dans toute la France, pour que ses législateurs puissent user des fraudes utiles et pieuses des Lycurgue, des Moïse et des Numa. Ce n’est que par la simple et froide raison, par l’évidence du bien, qu’ils peuvent fonder leur ouvrage ; moyen solide, sans doute, mais qui suppose un peuple composé d’hommes également éclairés, également vertueux.

Un tel peuple n’existe point, et n’existera vraisemblablement jamais. Il faut donc faire la constitution pour le peuple puisqu’on ne peut faire le peuple pour la constitution ; doit, à l’exemple de Solon, lui proposer, non pas les meilleurs lois possibles, mais les meilleures qu’il puisse supporter.

L’esprit de législation consiste donc à distinguer les coutumes, les abus, les préjugés que l’on peut attaquer à force ouverte, de ceux qu’il faut miner sourdement. Cet esprit ne suppose pas seulement la connaissance du cœur humain ; il suppose une étude profonde du peuple qui est à constituer.

Préparer des moyens de détruire ses préjugés, et le vices qui lui sont chers, en paraissant s’y accommoder, est la seule magie législative qui soit possible et permise. La conduite et les principes des citoyens, sur lesquels tous les yeux sont fixés, développe bien vite le germe de la sagesse que contient une loi prévoyante."




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Bien cordialement
Bertrand