vendredi 14 août 2020

14 Août 1789 : Où il est question de "la fermentation du peuple" et du moyen d’y remédier.

 

Les pauvres de Paris buvant le café près du Pont au Change
(Rien à voir avec le sujet traité, sauf si ceux-ci "fermentent")

    Ce vendredi 14 août 1789, les députés de l’Assemblée nationale se posent les questions suivantes :

1°L’Assemblée nationale sera-t-elle permanente ou périodique ?

2° Quelles seront les qualités des éligibles, soit dans l’Assemblée nationale, soit dans les assemblées secondaires ?

3°Quelle sera l’influence de l’autorité royale en matière de législation ? Aura-t-elle le droit de véto ? Ce droit sera-t-il limité ou illimité, absolu ou suspensif ?

4° L’Assemblée nationale sera-t-elle composée d’une ou de deux chambres ? S’il y en a deux, comment seront-elles composées ? Quels seront leurs droits, leurs pouvoirs et leur influence réciproque ?

    Vous voyez là qu’il ne s’agit pas de petites questions ! La troisième posera même un sacré problème plus tard et causera indirectement la perte du roi.

    Néanmoins, avant de délibérer sur ces questions majeures, un Monsieur de Volney attire l’attention sur un travail réalisé par un comité. Celui-ci porte sur l’organisation des assemblées secondaires, c’est-à-dire, les assemblées de Province.

Écoutons l’échange qui s’en suit :

Monsieur de Volney (député du tiers état) :

« Il parait que dans ce moment-ci nous avons besoin de force et d'action. Nous avons, à la vérité, l'autorité de l'opinion ; mais cette n'est que morale. Nous ne pouvons faire exécuter nos décrets que par le secours des municipalités ; elles seules sont en action ; mais municipalités sont encore sous la verge du despotisme ; ce sont des établissements élevés sur les ruines de la liberté publique, et dans la dépendance du pouvoir exécutif. Il me paraît donc que dans le principe nous devons nous occuper d’organiser les assemblées paroissiales, les assemblées municipales, les assemblées provinciales et enfin l'Assemblée nationale.

Il est important et nécessaire de mettre sur-le-champ ces assemblées en activité. Par-là vous serez certain de votre autorité, vos décrets seront exécutés ; par-là vous ferez facilement consommer l'opération d'établir par égalité la perception des impôts pour les six derniers mois l'année.

Une circonstance me paraît influer sur projet. Il faut préparer le plan de toutes les assemblées graduelles ; il faut donner des ordres pour leur établissement ; tout cela nécessite au moins un délai de deux mois. Ainsi toutes les assemblées seront, dans le courant d'octobre, en activité, c'est à-dire à l'époque où l'on renouvelle les rôles.

Ce moyen me paraît seul suffisant pour apaiser la fermentation du peuple. Aussi j'appuie la motion de M. Duquesnoy dans la première partie. L'amendement que je propose, c'est de former des assemblées de divers grades avant de s'occuper de la Constitution. Mais je regarde comme nécessaire de s'occuper avant tout des assemblées secondaires, et de rétablir en quelque sorte le pouvoir exécutif de l'Assemblée. Il faut donc former les assemblées paroissiales, former les assemblées municipales, les assemblées provinciales, et enfin l'Assemblée nationale. Tel est l’ordre des choses, tel est celui que je propose. »

M. Duquesnoy (député du tiers état) appuie la proposition de M. Volney, et il consent que la partie de sa motion qui y a quelque rapport soit rédigée dans les termes proposés par ce dernier.

(Concernant M. Duquesnoy, je vous recommande la lecture de cet article, de sensibilité royaliste, mais néanmoins fort bien écrit et bien documenté : https://www.periegete.com/le-journal-dadrien-duquesnoy-1759-1808-ou-lenthousiasme-et-leffroi-de-la-revolution-de-1789/)

M. Crénière (député du tiers état) dit qu'avant de s'occuper la discussion des diverses motions il est intéressant de connaître le travail des comités ; en conséquence, il demande, quant à présent, la question préalable sur ces motions amendements.

Duc Mathieu Montmorency
(Lisez la devise au-dessus)
M. de Montmorency (député de la noblesse) :

"En appuyant cet avis, remarque que la motion faite est contraire à la marche que l'Assemblée s'était prescrite et à l’ordre de travail déjà établi ; il ajoute qu'il est propos d'engager le comité de Constitution à présenter incessamment son travail sur la constitution et ses vues sur l'établissement des assemblées secondaires."

M. Prieur (député du tiers état) :

"Tous les jours l'Assemblée des décrets ; à qui en confiera-t-elle l’exécution ? Ce sera sans doute aux municipalités. La plupart de celles qui existent sont vénales, et ont perdu toute autorité et toute confiance. Il faut donc s'empresser de créer des municipalités nationales ; il n'est pas moins important d'établir des assemblées provinciales nationales, pour donner des instructions locales, dont les représentants de la nation ont un besoin fréquent. Sous ces deux rapports, l'amendement de M. de Volney doit être adopté. Je demande que le comité de rédaction soit chargé de présenter incessamment un travail sur ce sujet.

Le pouvoir judiciaire, ébranlé par l'arrêté du 4, qui abolit la vénalité des charges, doit fixer aussi l'attention de l'Assemblée. Il faut charger le comité de rédaction de présenter sans délai les bases d'un travail qui ait pour but de lui rendre son énergie.

Quand même la déclaration des droits de l'homme serait retardée, les principes qu'elle doit consacrer vivraient toujours dans nos cœurs, et ce délai ne compromettrait point la chose publique."

M. Regnaud (député du tiers état) : 

"J'appuie la motion. Elle offre à l'Assemblée le seul parti que sa sagesse et son amour du bien public puissent adopter. Le comité de Constitution offre en général plus de discussions que de résultats ; il doit se borner maintenant à préparer le travail sur les quatre questions présentées."

M. le baron de Montboissier (député de la noblesse) propose, pour faciliter le travail : 

« Que les députés de chaque généralité soient autorisés à se réunir et à préparer ainsi les éléments des assemblées secondaires ».

M. de Clermont-Tonnerre (député de la noblesse) annonce que lundi le comité de Constitution présentera un travail très-considérable, et propose de renvoyer après ce rapport l'examen de la notion de M. Duquesnoy. Il observe qu'en suivant une autre marche, ce serait remonter des conséquences aux principes.

Source : 

https://www.persee.fr/doc/arcpa_0000-0000_1875_num_8_1_4855_t2_0436_0000_3

Post Scriptum :

Manquent à ma galerie de Portraits, Jean-Baptiste Crenière né le 10 juin 1744 à Vendôme et Charles-Philippe-Simon de Montboissier-Beaufort-Canillac, dont je n'ai trouvé que les armoiries.

 

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Bertrand