mercredi 26 août 2020

26 Août 1789 : Le jour de la Déclaration !

    Aujourd’hui, je gage que vous allez voir passer quelques articles sur la fameuse déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

    J’aime beaucoup mes concitoyens, qui comme moi, affichent cette déclaration chez eux, bien en évidence.

    Nous avons vu ensemble que depuis plusieurs jours, les députés de l’Assemblée nationale constituante travaillaient sur le projet de déclaration des droits de l’homme. Celui-ci devra figurer en préambule de la future constitution.

    Le 19 août dernier (voir ma publication de cette date), ils ont retenu parmi tous les projets, celui émanant du 6ème bureau, ou comité des cinq. Les cinq membres de ce comité, élus le 17 Août 1789 étant :

  • Jean-Nicolas Démeunier, (Noblesse)
  • L'évêque de Langres Antoine-Hubert Wandelaincourt, (Clergé)
  • François Denis Tronchet, (Tiers-état, élu de Paris)
  • Honoré-Gabriel Riqueti de Mirabeau (Noble, mais élu du Tiers -état de Aix et Marseille)
  • Claude Redon (Tiers-état de Riom)

    Depuis le 20 août, jusqu’à ce jour, 26 août, chaque article de ce texte est donc discuté et finalisé, au cours de longs débats, puis voté.

    Souvenez-vous, le 21 Août ils ont défini ce qu'était la Liberté, et le 23 Août, ils ont proclamé la liberté des opinions religieuses !

    Aujourd’hui, 26 Août, la discussion va s’interrompre après l’adoption de l’article 17 sur le droit de propriété qui en constituera le dernier article, afin que les débats puissent enfin porter sur la Constitution elle-même.

    La propriété, ce droit inviolable qui constitue l’objet du dernier article, fait partie des quatre droits, dits naturels et identifiés comme tels par la philosophie des Lumières. Ces droits sont :

  • la liberté ;
  • la propriété ;
  • la sûreté ;
  • la résistance à l'oppression.


    Rien à redire sur le droit à la liberté, bien sûr. Pour ce qui concerne le droit à la sûreté et celui de la résistance à l’oppression, on comprend que les limites que l’on va y fixer ne seront pas sans conséquences. Je vous renvoie à mon article du 18 Août sur l’étonnant discours de Mirabeau sur le droit évident pour tout citoyen à posséder des armes !

Etonnant, non ?


    Pour ce qui est du droit à la propriété, encore plus évident et surtout indiscutable, il me semble nécessaire d’y apporter une petite remarque où deux...

    Vous aurez constaté que les hommes de couleurs sont exclus de cette déclaration des droits de l’homme, puisque l’esclavage n’est pas aboli. Le problème vient peut-être du fait que certains députés sont propriétaires d’esclaves ou se sont enrichis par ce sinistre commerce.
    Notons au passage que le 20 août 1789, des propriétaires de Saint-Domingue résidant en France, nobles et roturiers, "traditionalistes réformateurs", ont constitué à Paris une "Société correspondante des colons français", communément appelée Club Massiac, du nom de l'hôtel où elle se réunit. Ces hommes sont hostiles à toute représentation des colonies à l'Assemblée nationale et ils souhaitent traiter des affaires coloniales directement avec le ministère, et ce, dans la plus grande discrétion (lobbying ?).


    Il faudra attendre 1794 et la Convention Montagnarde de Robespierre (Oui, oui, l’horrible monstre Robespierre, etc, etc.) pour que ledit esclavage soit enfin aboli. C’est en effet Robespierre, qui le premier, théorisera un droit naturel à l’existence, dans ce que l’on pourrait appeler une démarche de reconquête du droit naturel. Il soulignera les contradictions résultant de la déclaration des droits de l’homme de 1789.

Écoutons-le préciser sa pensée dans un exemple célèbre, exposé devant la Convention le 24 avril 1793 :

« Posons donc de bonne foi les principes du droit de propriété ; il le faut d’autant plus qu’il n’en est point que les préjugés et les vices des hommes aient cherché à envelopper de nuages plus épais.

« Demandez à ce marchand de chair humaine ce que c’est que la propriété ; il vous dira, en vous montrant cette longue bière qu’il appelle un navire, où il a enchaîné et ferré des hommes qui paraissent vivants :

“voilà mes propriétés, je les ai achetées tant par tête.”

Interrogez ce gentilhomme qui a des terres et des vassaux, ou qui croit l’univers bouleversé depuis qu’il n’en a plus ; il vous donnera de la propriété des idées à peu près semblables.

Interrogez les augustes membres de la dynastie capétienne ; ils vous diront que la plus sacrée de toutes les propriétés est, sans contredit, le droit héréditaire, dont ils ont joui de toute antiquité, d’opprimer, d’avilir et de pressurer légalement et monarchiquement les 25 millions d’hommes qui habitaient le territoire de la France, sous leur bon plaisir.

« Aux yeux de tous ces gens-là, la propriété ne porte sur aucun principe de morale. Pourquoi votre déclaration des droits semble-t-elle présenter la même erreur ? »

    Selon Robespierre, le droit de propriété doit être subordonné aux principes humanistes de liberté et de réciprocité du droit (égalité) :

« En définissant la liberté, le premier des biens de l’homme, le plus sacré des droits qu’il tient de la nature, vous avez dit avec raison qu’elle avait pour bornes les droits d’autrui : Pourquoi n’avez-vous pas appliqué ce principe à la propriété qui est une institution sociale ? Comme si les lois éternelles de la nature étaient moins inviolables que les conventions des hommes. Vous avez multiplié les articles pour assurer la plus grande liberté à l’exercice de la propriété, et vous n’avez pas dit un seul mot pour en déterminer le caractère légitime, de manière que votre déclaration paraît faite non pour les hommes mais pour les riches, pour les accapareurs, pour les agioteurs et pour les tyrans. Je vous propose de réformer ces vices en consacrant les vérités suivantes :

« Article 1er - La propriété est le droit qu’a chaque citoyen de jouir et de disposer de la portion de biens qui lui est garantie par la loi.

« Article 2. - Le droit de propriété est borné comme tous les autres, par l’obligation de respecter les droits d’autrui.

« Article 3. - Il ne peut préjudicier ni à la sûreté, ni à la liberté, ni à l’existence, ni à la propriété de nos semblables.

« Article 4. - Toute possession, tout trafic qui viole ce principe est illicite et immoral. »

    Par ces 4 articles, Robespierre théorisait la séparation du droit naturel et de la propriété privée des biens matériels. La propriété n’était plus reconnue comme un droit naturel, mais comme une institution sociale.

    Je suis désolé d’avoir gâché le plaisir de certains en évoquant Robespierre (Oui, oui, l’horrible monstre Robespierre, etc, etc.). Mais peut-être comprendrez-vous mieux au fil de mes modestes publications, pourquoi cet homme est devenu l’un des hommes politiques les plus calomniés et haïs de l’histoire de France.

    Même si cette déclaration des droits n'était pas parfaite, même si comme le disent certains, elle était largement inspirée des déclarations anglaise et américaine, cette déclaration n'en reste pas moins un texte important dans l'histoire. 

Alors merci et bravo aux amis qui l'ont affichée chez eux !


Important !

Pour celles et ceux qui pensent que les Femmes ont été oubliées, je conseille de vite lire l'article suivant qui s'intitule :"Les femmes sont des hommes comme les autres".


Voici une version de 1789.

Voici une version de 1793


Post Scriptum :

    Concernant l'abolition de l'esclavage, je pense que je vais vous étonner en vous apprenant que 20 ans avant l'abolition en 1794, le jeune Louis XVI avait questionné en 1775 son ministre Turgot, pour s'enquérir de ce qu'il en coûterait à l'Etat de mettre fin à cette pratique. Il pensait au remboursement des propriétaires. (Rappelez-vous, la propriété est sacrée). Mais cela fera prochainement l'objet d'un article spécial...

 

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Bertrand