mercredi 16 septembre 2020

16 Septembre 1789 : Ce matin à Versailles on discute sur l'inviolabilité de la personne du roi (et on pend un boulanger).

 Article mis à jour le 16 septembre 2023

Louis XVI

    L'Assemblée nationale travaille sans relâche à Versailles, du matin au soir ! Il s'agit là de la Révolution en perruques. L'autre Révolution, celle des affamés, se déroule elle aussi ce jour-là à Versailles (Voir en bas de l'article).

Du côté de la Révolution en perruques (Perruques portées aussi bien par les députés du Tiers état que ceux de la noblesse et du clergé.)

Débat à propos de l'inviolabilité de la personne du roi, de l'indivisibilité du trône et de l'hérédité de la couronne, de mâle en mâle...

    Le sujet abordé ce matin est d'importance, puisque l'on y traite de l'inviolabilité de la personne du roi, de l'indivisibilité du trône et de l'hérédité de la couronne, de mâle en mâle ! 

    Ces députés qui dans les faits viennent de déposséder le roi de son pouvoir, ne cessent de m'étonner par leur candeur. En effet ces hommes de bien ne cessent de prodiguer au roi des marques d'affection et d'estime, et ce, malgré les humiliations qu'ils lui ont fait subir ! A les lire, on à l'impression qu'ils viennent de libérer le roi du jour de la tyrannie ! Rappelons tout de même que le roi, lui, sait bien ce qu'il en est vraiment.

Le 3 septembre dernier, Louis XVI a en effet écrit une lettre fort touchante à l’un de ses conseillers, Monsieur Le Mintier, Evêque de Tréguier, lui demandant de venir au secours de l’Etat par ses exhortations & par ses prières. Cela pourrait sembler innocent mais cela va bientôt mettre le feu aux poudres dans l'Ouest du Pays.

Bientôt, 12 octobre prochainLouis XVI va confier à Monsieur de Fontbrune, (un agent secret recommandé par l’ambassadeur d’Espagne Fernàn Nañes), une lettre pour son cousin le roi d’Espagne Charles IV, dans laquelle il va écrire :

« Je me dois à moi-même, je dois à mes enfants, je dois à ma famille et à toute ma maison de ne pouvoir laisser avilir entre mes mains la dignité royale qu’une longue suite de siècles a confirmée dans ma dynastie…

« J’ai choisi Votre Majesté, comme chef de la seconde branche pour déposer en vos mains la protestation solennelle que j’élève contre tous les actes contraires à l’autorité royale, qui m’ont été arrachés par la force depuis le 15 juillet de cette année, et, en même temps, pour accomplir les promesses que j’ai faites par mes déclarations du 23 juin précédent. »

Vous avez compris. D'un côté, Louis XVI est tout sourire devant cette assemblée nationale baignant dans l'autosatisfaction et exprimant sans réserve son amour pour le roi qu'elle a dépossédé de presque tous ses pouvoirs réels ; et de l'autre, Louis XVI avertit qui de droit que depuis le 23 juin dernier, il n'a fait qu'agir et parler contre son gré.

Vous vous doutez bien que ce double jeu finira mal.

Le débat à l'Assemblée (Débat très houleux)

Tenu sous la présidence de Stanislas de Clermont Tonnerre, le débat va être très houleux. Mais il est très instructif sur de nombreux points. Vous allez mieux comprendre pourquoi Louis XVI écrira bientôt à son cousin le roi d’Espagne Charles IV...

Stanislas Marie Adélaïde, comte de Clermont Tonnerre (Président de séance)

Discussion sur l'inviolabilité de la personne du roi, l'indivisibilité du trône et l'hérédité de la couronne de mâle en mâle, lors de la séance du 16 septembre 1789

Source : https://www.persee.fr/doc/arcpa_0000-0000_1877_num_9_1_4994_t1_0002_0000_5

M. De Cazalès. S'il est une question qu'il importe de couvrir d'un voile religieux, à cause des inconvénients qu'elle entraîne, c'est celle que vous agitez relativement à la maison d'Orléans et à la maison d'Espagne, sur la succession à la couronne. Le vœu de l'Assemblée n'est certainement pas douteux, mais elle ne veut pas l'expliquer.

Cependant il me paraît, d'un autre côté qu'il ne convient pas à la dignité de cette Assemblée ! De se renfermer dans un silence qui pourrait devenir un moyen en faveur de l'un ou de l'autre des concurrents ; il me semble que l'on pourrait ajouter à l'article contesté la phrase suivante :

Le cas advenant où la branche d'Orléans opposerait une exception à ces principes et la renonciation faite par Philippe V, stipulée dans le traité d'Utrecht, à la maison d'Espagne, il sera statué par une Convention nationale convoquée à cet effet.

Cette phrase me paraît concilier toutes les opinions, en laissant intègres les droits des deux parties ; elle me paraît aussi prévenir le danger de perdre un allié, de voir notre commerce rompu avec lui ; enfin, elle prévient le malheur des guerres civiles, en décidant à l'avenir ce que la nation doit faire.

(Cette proposition est applaudie.)

Pierre Nicolas de Haradener, vicomte de Macaye

M. Le vicomte de Macaye, député du Labour (le Labourd est une partie de la province Basque de Macaye), représente que la question que l'on agite actuellement est une question oiseuse. De longtemps, dit-il, la famille royale ne sera éteinte ; les héritiers du Trône sont nombreux et en bonne santé. Mais il y a des considérations politiques qui doivent écarter celte question. Le commerce avec l'Espagne est considérable ; nous tenons d'elle ces belles laines que l'on sait si bien employer dans nos manufactures ; l'Espagne fait circuler en France les trésors du Pérou ; les provinces voisines de l'Espagne font avec nous un commerce considérable de bœufs, de chevaux, etc. La jeunesse de ces provinces se répand dans l'Espagne, y exerce les métiers de charpentier, de maçon et revient passer l'hiver en France, chargée d'argent ; la Navarre partage également tous ces avantages. Il faut donc mettre d'autant plus de circonspection, dans la solution de cette question, que dans ce moment un habile négociateur anglais (celui qui a conclu le funeste traité de commerce entre la France et l'Angleterre) cherche à enlever à la France le commerce espagnol. (On applaudit dans toutes les parties de la salle.)

Charles François Bouche
M. Bouche. La question que l'on agite relativement à la succession à la couronne est très impolitique ; il est étonnant que, sans intérêt, sans nécessité, on se livre à des débats aussi dangereux.

Le commerce est très étendu entre nos provinces méridionales et l'Espagne. En 1784, le conseil de Madrid fit enlever 190,000 bêtes à cornes dans les provinces voisines des Pyrénées, ce qui a répandu beaucoup d'argent.

Cependant ce commerce est encore très resserré ; les deux seules voies sont Perpignan et Bayonne. Il y a douze ans bientôt que la cour de France sollicite l'ouverture des autres barrières, ce qui ferait un grand bien pour le commerce.

Décider la question ce serait nuire considérablement aux provinces du Midi. Du côté politique les inconvénients sont incalculables ; et d'après les réflexions que je viens de présenter, il me paraît qu'il faut abandonner la question sur l'exclusion ou l'admission de la maison d'Espagne à la succession à la couronne de France.

Je présenterai pour sortir d'embarras un moyen qui fera voir que l'on n'a pas cédé à la crainte, car la France n'est pas faite pour céder à ce motif. Mais j'ai quelques réflexions préalables à faire, et je réclame votre attention.

Par édit du mois de juillet 1714, Louis XIV appelle à la succession du trône les princes légitimés, au défaut des princes légitimes.

En 1717, cet édit a été révoqué, et il est dit que le roi est supplié de ne rien préjuger sans les Etats généraux. Dans ces édits, ainsi que dans la déclaration de 1723, le prince déclare que la nation a le droit de se choisir un roi, dans le cas de défaillance des enfants mâles de la maison régnante.

Certainement ce droit appartient d'une manière incontestable à la nation française.

L'extinction de la maison régnante ne transmettrait pas à la nation le droit d'élire un roi, mais il lui en donnerait l'exercice.

Dans les premiers temps, la couronne était élective. Plusieurs rois de la première, et même de la seconde race, prenaient le titre d'élus. Ce furent les grands et le clergé qui rendirent le trône héréditaire ; et Hugues Capet fut porté sur le trône au préjudice des enfants de Louis V.

Nous n'avons pas besoin sans doute de tous ces exemples pour constater nos droits.

Mais il est à propos de garder le silence sur les prétentions de la maison d'Espagne ; et si un elle voulait les faire valoir, vous auriez pour vous le traité d'Utrecht, et toutes les puissances de l'Europe intéressées à ce traité.

Vous n'ignorez pas qu'en 1714, le fils de Philippe V a prétendu que son père n'avait pu faire de renonciation. Ainsi, quelles que soient les intentions de la maison d'Espagne, le parti du silence est le seul convenable.

Voici donc ce que je propose :

En cas de défaillance d'enfants mâles et légitimes dans la maison régnante de Bourbon de France, la nation en décidera.

Pierre Long
M. Long fait une autre observation ; il la présente comme devant rompre le nœud de la difficulté.

Vous allez statuer sur l'ordre de la succession à la couronne ; il ne sera seulement pas pour la maison régnante, mais pour toutes les autres maisons.

Ce ne sera pas une règle particulière, mais un principe général. Cependant vous la restreignez à la seule maison de Bourbon. Il faut se contenter de dire que le Trône est héréditaire et non éligible, et il ne faut pas surtout restreindre cette règle à la maison de Bourbon.

M. le comte de Mirabeau. Sans prétendre préjuger le procès entre la branche d'Orléans et la maison de Bourbon, je puis dire, après avoir été contre l'amendement de l'un des préopinants qui est contraire à la délibération : il n'y a lieu à délibérer, puisque l'amendement suppose qu'il y a lieu à délibérer, que ces deux objets sont contradictoires.

Après cette déclaration, je pense qu'il ne paraît pas sage de laisser de côté cette question ; Je demande si, sous le règne d'un prince déclaré restaurateur de la liberté, l'on doit abandonner un droit qui appartient à la nation. L'on ne doit sans doute pas commencer par traiter cette grande question aussi superficiellement, aussi légèrement.

J'ai eu l'honneur de vous demander si vous persévérez dans la sage condition politique de déclarer qu'il n'y a lieu à délibérer. Si vous y persévérez, je demande de nouveau la division de la rédaction ; si vous trouvez que la question doit être examinée, nous sommes prêts, aux yeux de l'Europe et de la nation, à laquelle une portion quelconque ne peut donner un roi, nous sommes, dis-je, prêts à délibérer.

(La discussion cesse, on présente une foule d'amendements, et les observations de M. De Mirabeau sont inutiles.)

Guy Jean-Baptiste Target
M. Target propose l'amendement suivant : Sans entendre rien préjuger de l'effet des renonciations sur lesquelles, le cas arrivant, une Convention nationale prononcera.

Second amendement. Le cas de défaillance arrivant, il sera statué par une Convention nationale convoquée à cet effet.

Troisième amendement : Le Trône est héréditaire de mâle en mâle, par ordre de primogéniture, à l'exclusion perpétuelle des filles et de leurs descendants ; le Trône est occupé par l'auguste maison de Bourbon.

Quatrième amendement : En cas d'extinction de la famille actuelle régnante, une Convention nationale décidera sur les contestations qui pourraient s'élever sur l'ordre de la succession à la couronne.

Cinquième amendement : Sauf à une Convention nationale à statuer, sur l'admission ou l'exclusion des princes étrangers.

Sixième amendement : L'ordre pour la succession au Trône, tel qu'il a été suivi jusqu'à présent, sera solennellement confirmé.

Charle Maurice de Talleyrand
Septième amendement de M. De Talleyrand, évêque d'Autun : Et dans le cas douteux, la nation jugera.

La séance devient très tumultueuse. Plusieurs personnes veulent encore discuter la question ; mais l'Assemblée est impatiente d'aller aux voix.

On témoigne un empressement marqué pour la motion de M. Target ; d'autres réclament celle de M. L'évêque d'Autun.

Enfin on revient à celle de M. Target. Ce choix ne se fait que lentement et au milieu du plus grand désordre.

La motion de M. Target est divisée, et l'on s'en tient à ces mots : Sans rien préjuger sur l'effet des renonciations.

Reprise de la discussion du 16 septembre 1789 sur l'inviolabilité de la personne du roi, l'indivisibilité du trône et l'hérédité de la couronne de mâle en mâle

Source : https://www.persee.fr/doc/arcpa_0000-0000_1877_num_9_1_4994_t1_0003_0000_5

M. le comte de Mirabeau. Il me paraît indigne de l'Assemblée de biaiser sur une question de l'importance de celle qui nous occupe. Autant les circonstances ont pu nous, permettre, et peut-être dû nous inviter à nous abstenir de cette affaire, autant, si nous en sommes saisis, il importe qu'elle soit jugée, et ce n'est pas sur des diplômes, des renonciations, des traités, que vous aurez à prononcer c'est d'après l'intérêt national.

En effet, si l'on pouvait s'abaisser à considérer cette cause en droit positif, on verrait bientôt que le procureur le plus renommé par sa mauvaise foi n'oserait pas soutenir contre la branche de France, ni vous refuser le jugement que le monarque le plus asiatique qui ait jamais régné sur la France vous a renvoyé lui-même.

Plusieurs voix ; A l'ordre ! (Rappel à l'ordre)

M, Le comte de Mirabeau. Messieurs, je ne sais comment nous concilierons le tendre respect que nous portons au monarque, honoré par nous du titre de restaurateur de la liberté, avec cette superstitieuse idolâtrie pour le gouvernement de Louis XVI, qui en fut le destructeur ; Je suis donc dans l'ordre, et je continue.

Je défie qu'on ose me nier que toute nation a le droit d'instituer son gouvernement, de choisir ses chefs, et de déterminer leur succession.

Plusieurs voix demandent qu'on aille aux voix. (C’est-à-dire voter)

M, Le comte de Mirabeau. Je déclare que je suis prêt à traiter de la question de fond, à l'instant même, à montrer que si toute nation à intérêt à ce que son chef se conforme à ses mœurs, à ses habitudes, à ses convenances locales, qu'il soit sans propriétés ni affections étrangères, cela est plus vrai pour les Français que d'aucun autre peuple ; que si le sacerdoce veut de l'inquisition, et le patriarcat de la grandesse, la nation ne veut qu'un prince français ; que les craintes par lesquelles on cherche à détourner notre décision sont puériles ou mal fondées ; mais que l'Europe, et l'Espagne surtout, n'ont point dit avec Louis XVI : il n'y a plus de Pyrénées ; qu'en laissant maintenant la question indécise, s'il y a une question, on répandra des germes innombrables de discordes intestines ; et qu'enfin je ne pourrai que conclure, si il y a une question, à ce qu'elle soit jugées, s'il n'y en a pas, à ce que la rédaction de l'article soit refaite hors de l'Assemblée ; car ici elle consommerait trop de temps, et n'atteindrait jamais un certain degré de perfection, les douze cents représentants fussent-ils douze cent écrivains excellents.

(On allait aller aux voix lorsque les uns ont demandé la question préalable sur les amendements.)

Un autre membre veut que les détails de la question présente soient retranchés du procès-verbal.

L'Assemblée retombe dans la confusion et reste longtemps dans l'inaction.

La question préalable sur les amendements est redemandée.

M. Le Président dit que le règlement n'en parlant pas, il doit consulter l'Assemblée.

Bon Albert Briois de Beaumetz

M. Le comte de Mirabeau et M. De Beaumets veulent parler sur l'amendement ; mais l'Assemblée refuse de les entendre, et l'on décrète qu'il n'y aura pas de discussion sur l'amendement.

Ce décret est censuré par plusieurs membres ; ils réclament la liberté de la parole.

Un membre demande l'ajournement, puisque l'Assemblée défend la discussion.

M. Target offre de retirer son sous-amendement ; mais ni l'un ni l'autre ne sont écoutés.

Enfin, dans un court moment de calme, on lit les articles rédigés hier par M. Desmeuniers , avec cette addition sur la fin de l'article neuvième : « sans entendre rien préjuger sur l'effet des renonciations. »

On propose d'aller aux voix par assis et levé ; d'autres demandent l'appel nominal ; de violents murmures se font entendre.

Enfin l'appel nominal est décidé, et il est arrêté que l'on opinera par oui ou non.

Jean-Louis Claude Emmery de Grozyeulx
M. Emmery prétend que c'est presser sa conscience ; que, d'un côté, il ne peut refuser le oui sur les principes de l'hérédité, de l'indivisibilité et de l'inviolabilité ; et que, de l'autre, il est forcé de dire non quant à la rédaction ; il dit qu'il faut décréter les principes, et aller aux voix sur la rédaction.


 

Jean-Jacques Duval d'Epremesnil

M. Duval d'Éprémesnil observe que c'est demander la division de l'arrêté de M. Le comte de Mirabeau, déjà refusée.

(Mouvement d'humeur entre MM. De Mirabeau et d'Eprérnesnil. L'Assemblée devient plus tumultueuse que jamais. Chacun veut faire triompher son opinion.)

M. Le Président rappelle à l'ordre. Ce n'est qu'une erreur de mots, dit-il, et il serait bien malheureux si le caractère français empêchait la correction d'un mot.

M. Le Président avait interrompu M. Emmery. On lui conteste le droit d'interrompre ; il s'excuse en disant que c'était pour rétablir le calme ; et ses efforts pour ramener l'ordre sont inutiles. Il propose d'aller aux voix par assis et levé sur les principes, et par appel nominal sur la rédaction. Un grand nombre de membres consentent à cette proposition ; d'autres veulent un moyen tout à fait contraire.

Au milieu de cette opposition, le président s'écrie qu'il emploiera tout son zèle et toute sa fermeté à maintenir le bon ordre dans l'Assemblée.

Sur la proposition de M. Le président, on va aux voix.

Deux épreuves sont faites : toutes deux sont douteuses. La première parait être en faveur de l'opinion de M. Le président ; et la seconde contre son opinion. Il décrète l'appel nominal ; mais personne n'entend la prononciation du décret. Les uns le contestent, les autres le soutiennent. On demande que l'on aille aux voix par l'appel

Joseph Ignace Guillotin

M. Guillotin et M. Le duc de Liancourt réclament, mais inutilement ; leurs voix sont étouffées par les murmures. Enfin on se sépare à quatre heures.

MM. Les curés, ayant observé l'austérité du jeûne, demandent que la séance soit levée.

M. Le président renvoie à demain la question de la validité du décret sur l'appel nominal.

M. Le Président, après avoir dit que le comité de rédaction s'assemblerait demain pour donner la dernière forme aux articles et aux amendements sur les subsistances, décrétés hier dans la séance du soir, rend compte d'une lettre de M. Gaume, aumônier de la manufacture de Sèvres, qui, pour concourir à la libération des dettes de l'Etat, a envoyé 300 livres, somme équivalente à une année de ses honoraires ; d'une seconde lettre de M Lemoine, avocat en Parlement, qui, d'après les mêmes vues, a envoyé 100 pistoles, avec le projet d'établissement d'une caisse nationale, où tous les individus pourraient verser leurs contributions volontaires.

L'Assemblée témoigne sa satisfaction sur ces offres patriotiques, ainsi que sur celles dont on a rendu compte dans la séance du matin.

Du côté de la Révolution des affamés.

    Ce même jour, à Versailles, un boulanger, animé peut-être de très bonnes intentions, a imaginé de préparer deux sortes de pains : l'un à dix- huit sous les quatre livres, l'autre à douze. Il comptait sans doute gagner assez sur la première, pour perdre un peu sur la seconde.

    Mais le peuple ne l'a pas pris ainsi. Des bandes, en partie soudoyées (par qui ?), ont fait le siège de sa boutique, y ont pénétré de force, brûlé des effets, saisi « le traître », qu'ils ont pendu, mais qui a été décroché à temps, et finalement emmené soi-disant en prison, c'est-à-dire en lieu sûr, par la garde nationale de Versailles.

Charles-Henri d'Estaing
    Le comte d'Estaing, qui commande cette garde, s'est emparé de vingt et un mutins, dont sept ont été relâchés. Il est question de faire un exemple des autres. Ces tristes événements se sont passés en quelque sorte sous les yeux du Roi et de l'Assemblée.

Source : "Journal d'un bourgeois de Paris pendant la Révolution française"



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Je vous remercie pour ce commentaire.
Bien cordialement
Bertrand