vendredi 24 juillet 2020

24 Juillet 1789 : Intervention d'un député Breton, mais aussi et surtout Français

La France de 1789 et ses Généralités,
dont la Généralité de Rennes (La Bretagne)
Source : https://histoire-image.org/fr/etudes/carte-france-1789


    Je vous donne à lire aujourd’hui, un extrait de l’intervention de Monsieur de Glezen, député de Bretagne, devant l’Assemblée nationale.

    Elle est intéressante parce que l’on devine au travers de celle-ci, un nouveau projet de faire société dans le royaume, celui de constituer une Nation, la Nation française. La députation Bretonne élue par le bas clergé et le peuple, présente à l’Assemblée nationale ayant été contesté par la noblesse et le haut clergé de ladite Bretagne.


    Avant l’intervention de Monsieur de Glezen, Monsieur de Beaumetz a rappelé que : « Tous les citoyens aujourd’hui ont les mêmes droits ; ce n’est pas un corps particulier qui doit jouir de l’avantage de la représentation au préjudice de l’universalité des citoyens ; c’est la Bretagne entière qui demande à être représentée et qui doit obtenir ce droit » et il conclut par l’admission de la députation bretonne.

    J’aime particulièrement le passage suivant dans l’intervention de ce député breton, à l’attention de ses concitoyens de bretons : 

"Oubliez, s’il est possible, jusqu’au nom même qui vous enorgueillit ; il désigne sans doute un peuple invincible, il exprime le besoin impérieux de la liberté, il caractérise le plus ardent amour de la liberté. Mais ces sentiments sont aussi vifs, aussi exaltés dans toutes les parties du royaume qu’en Bretagne.

Considérez, ou plutôt essayez de croire ce qu’on fait les intrépides conquérants de la Bastille ! Ah ! Le plus beau nom, celui qui rallie aujourd’hui toutes les provinces, et que vous êtes dignes de porter, c’est le nom de Français !"

    Voilà, en quoi consistait ce nouveau projet de faire Nation, pour ces hommes de 1789. Ne soyez pas dupes. Toutes les ignominies que l’on vous racontera sur la République écrasant les Provinces, sont des forgeries des nostalgiques de l’ancien régime. Ce sont les rois qui ont colonisé une à une les provinces du royaume, l'arme à la main (parfois par mariages). Le projet de la République a été de rendre solidaires entre elles, toutes les parties de cette France mosaïque. Rien à voir non plus avec ce que l’on appellera ultérieurement le nationalisme.

    Mais bien sûr, de tout cela nous reparlerons bientôt. Voici donc l’intervention de Monsieur de Glezen, député de Bretagne :

"Messieurs, la décision que vous allez prononcer sur la protestation d’une partie du clergé et de la noblesse de Bretagne, contre la députation du clergé et du peuple de cette province, eût été, ces jours derniers, bien plus intéressante pour nous. Agités tour à tour par l’espoir et la crainte, nous l’eussions attendue avec plus d’ardeur encore et de sollicitude. Vous avez plus, Messieurs, de dangers à courir. Votre patriotisme et votre courage les ont dissipés. Vous avez triomphé, par une constance inébranlable, de tous les obstacles qui s’opposaient au bien public. La constitution est censée faite ; oui, Messieurs, elle est censée faites, puisque le Roi s’en est remis à la sagesse de l’Assemblée nationale pour rétablir l’ordre et le calme dans le royaume, et créer, pour ainsi dire, la félicité générale, d’où dépend son propre bonheur. Le serment que nous avons eu l’honneur de prêter avec vous se trouve donc rempli.

Si vous pouviez juger invalides les titres qui nous appellent à partager les fonctions et les travaux dont vous allez vous occuper pendant le reste de la session, nous aurions toujours eu la gloire d’être associés aux périls qui vous menaçaient, et nous jouirions, en retournant dans notre province, de la douce satisfaction de présenter à nos concitoyens le tableau fidèle de votre héroïque fermeté et de vos vertus.

Pénétrés de l’admiration qu’elles nous ont inspirée, nous leur dirions avec transport, avec enthousiasme : Nous avons vu l’Assemblée nationale la plus auguste qui ait jamais existé dans l’univers, l’élite des hommes les plus éclairés d’un vase empire, disputant de zèle et d’activité pour établir sur des bases éternelles la félicité de vingt-cinq millions d’hommes.

Nous leurs dirions : Braves Bretons, vous venez de proclamer les arrêtés de l’Assemblée nationale, et celui qui concerne la perception et la durée de l’impôt. Cet hommage rendu solennellement à ses décrets prouve que vous unissez pour toujours vos destins à ceux de la France. Loin de songer en effet, à détruire vos droits, vos franchises, l’Assemblée nationale veut, au contraire, les étendre et les consacrer par une contestation générale pour tout le royaume ; sous cette puissante égide, ils ne seront plus que inviolables. Nous leur dirons : Oubliez, s’il est possible, jusqu’au nom même qui vous enorgueillit ; il désigne sans doute un peuple invincible, il exprime le besoin impérieux de la liberté, il caractérise le plus ardent amour de la liberté. Mais ces sentiments sont aussi vifs, aussi exaltés dans toutes les parties du royaume qu’en Bretagne. Considérez, ou plutôt essayez de croire ce qu’on fait les intrépides conquérants de la Bastille ! Ah ! le plus beau nom, celui qui rallie aujourd’hui toutes les provinces, et que vous êtes dignes de porter, c’est le nom de Français !

Cependant, Messieurs, nous osons nous flatter d’être honorés de vos suffrages et de voir confirmer notre élection. Ceux qui ont proscrit d’avance les antiques usages contraires aux droits de l’homme et du citoyen, ne peuvent pas faire cause commune avec les privilégiés de Bretagne. L’Assemblée la plus juste, la plus patriotique, rejettera pas la députation d’une grande province parce qu’un petit nombre d’individus a refusé d’y concourir, et que pour la première fois depuis des siècles le peuple a choisi ses représentants.

(On applaudit)

Les députés de Bretagne sortent de la salle.

L’Assemblée délibère sur la protestation de la noblesse et d’une partie du clergé. Elle est unanimement déclarée mal fondée.

Messieurs les députés de Bretagne sont invités à renter dans la salle. Ils apparaissent au milieu des applaudissements universels.


Le compte rendu dans son entier est accessible par le lien ci-dessous : 


Post Scriptum : 

    Je n’ai hélas pu vous trouver un portrait de Monsieur de Glezen et j’en suis désolé. Quant à des illustrations relatives à la Bretagne de cette époque, j’ai fini par renoncer momentanément, car on touche à l’irrationnel lorsque l’on effectue ce genre de recherches sur le WEB (Beaucoup de trolls chouans dans le bocage).

    Voici juste un dernier aperçu de cette France mosaïque de 1789, avec la carte ci-dessous montrant les récentes acquisitions territoriales de Louis XIV.


   



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Bertrand