dimanche 8 novembre 2020

Les Parlements contre le Roi. 30 ans d'une lutte de l'aristocratie contre l'absolutisme royal

    Je me suis rendu compte qu'il était vraiment nécessaire de consacrer un article aux trois décennies qui avaient précédé la Révolution, afin de mieux comprendre l'origine de celle-ci.

    Cela nous permettra de mieux comprendre, par exemple, pourquoi, le 3 novembre 1789, l'Assemblée nationale s'était trouvée dans l'obligation de mettre tous les parlements en vacance, c'est-à-dire de les supprimer ; ce que Louis XVI avait déjà été obligé de faire en 1788, mais pour une autre raison, bien sûr.

    Pendant presque trente ans en effet, l'aristocratie s'est mesurée au pouvoir royal, dans le but de préserver ses privilèges, voir même de les étendre. Ce faisant elle a non seulement réussi à empêcher toutes les tentatives de réformes qui auraient pu redresser la situation du royaume, mais elle a aussi très largement contribué à affaiblir le pouvoir du roi, ce qui, paradoxalement, a contribué à l'effondrement de la monarchie.

    Attention, cet article constitue un résume, un rapide survol ! Je ne suis pas rentré dans le détail de chaque fait évoqué pour le vérifier, comme je le fais pour mes articles sur la Révolution.😉

La cour de Louis XIV
L'absolutisme royal 

   L'absolutisme royal s'est établi progressivement dans le royaume de France, jusqu’à ce qu’il trouve sa forme la plus aboutie sous le règne de Louis XIV. Ses successeurs Louis XV et Louis XVI s’efforceront de le maintenir, mais ils se trouveront peu à peu confrontés à une réaction nobiliaire de l’aristocratie.

    L'absolutisme royal consacre les pleins pouvoirs du roi, puisque celui-ci considère qu'il les tient de Dieu. Sa personne est sacrée. Le roi dispose de la totalité des pouvoirs : exécutif, législatif, judiciaire. Il peut faire la paix ou la guerre, anoblir, battre monnaie, lever des impôts. Il peut faire emprisonner qui il veut sans jugement.

    L'absolutisme reposait sur un contrôle des nobles, que Louis XIV avait su attirer à Versailles pour en faire des courtisans dépendants de son bon vouloir.

    L'absolutisme se manifestait également par un contrôle de l’Etat dans tous les domaines y compris celui de l’économie.

La seule limite rencontrée par le pouvoir royal était les parlements (Nous allons y venir).

La réaction nobiliaire

    La réaction nobiliaire du XVIIIe siècle consista en une tentative de la noblesse de retrouver ses pouvoirs d'antan, c’est-à-dire occuper les plus hautes fonctions de la monarchie, voire la contrôler. De plus, la noblesse s’inquiétait du pouvoir grandissant de la haute bourgeoisie qui lui faisait concurrence. L’accession d’un roturier comme Necker à un poste ministériel en était un exemple flagrant. (Notons que Necker s'opposera en juin 1790 à l'abolition de la noblesse).

L'anti-absolutisme

    Cette réaction nobiliaire finit par constituer une sorte de grand mouvement anti-absolutiste dirigé contre ce qu’elle appelait le « despotisme ministériel ». La noblesse préférait bien sûr attaquer les ministres plutôt que le roi. Néanmoins ce sont bien des aristocrates qui les premiers ont présenté le pouvoir royal comme une tyrannie, et par conséquence le roi comme un tyran, pas le peuple. Peu à peu, mais pour d'autres motifs bien sûr, la bourgeoisie a finit par rejoindre elle aussi ce mouvement anti-absolutiste.

C'est principalement par au sein des parlements que l'anti-absolutisme s'opposa au roi.

Les Parlements

    Sous l’Ancien Régime, en dépit de leur nom, les Parlements n’avaient pas de vocation politique. Il ne s’agissait que de simples chambres de justice. S’étant vu confier la mission d’enregistrer les lois, ils s’étaient progressivement autorisés à adresser au roi des remontrances concernant celles qui leur paraissaient contraires aux lois fondamentales du royaume. S’il voulait obtenir à tout prix l’enregistrement d’une loi, le roi devait tenir « un lit de justice » devant les magistrats.

Lit de justice tenu par le roi en 1651 au Parlement de Paris
Source Paris Musées

    Afin d’affirmer son autorité, Louis XIV avait retiré le « droit de remontrance » aux Parlements en 1673. Mais à sa mort, en 1715, le Régent Philippe d’Orléans l’avait rétabli, probablement pour tenter de gagner les bonnes grâces des magistrats.

Lire cet article sur la lutte de Louis XIV contre les parlements

Quelques dates

    Cette liste n'est pas exhaustive, bien sûr. Si j'en ai le temps, je la complèterai par la suite. Son but est de vous décrire sommairement quelques étapes clés de cette étonnante lutte de l'aristocratie contre le pouvoir royal.

1764

    De 1764 à 1771, eu lieu ce que l’on appela « L’affaire de Bretagne », un conflit qui opposa, sous le règne de Louis XV, le procureur général du parlement de Rennes, La Chalotais, au duc d'Aiguillon, commandant en chef de la province de Bretagne. Le parlement de Bretagne refusait d’enregistrer de nouveaux impôts destinés à financer la de Sept Ans (mais pas seulement). Cette affaire eu un retentissement national.

Je vous conseille la lecture de l'ouvrage ci-dessous (en cliquant sur l'image) :

En marge ou au cœur de "L'affaire de Bretagne"?

1770

    En 1770, le Parlement de Rennes s’en prend au « triumvirat » ministériel, le chancelier Maupeou, le contrôleur général Terray et le secrétaire d'État d'Aiguillon. Louis XV casse la procédure intentée par les parlementaires rennais mais ceux de Paris leur viennent en aide en émettant un avis de remontrance au roi. Celui-ci est obligé de tenir un lit de justice, mais le Parlement de Paris riposte en énonçant de nouvelles remontrances reprises par les chambres de province.

1771

Maupeou


    Le 20 janvier 1771, le garde des sceaux Maupeou réussit à convaincre le roi de briser le Parlement de Paris en faisant arrêter et exiler les cent trente magistrats du Parlement de Paris.

    Le 13 avril 1771, malgré les protestations, Louis XV installe un nouveau parlement qui lui est acquis et qui entérine les réformes.

    Le 1er octobre 1771, le parlement de Provence situé à Aix est supprimé, ses membres exilés et remplacés par un nouveau corps de magistrature composé des officiers de la cour des comptes, qui réunissent toutes les attributions de l'une et de l'autre cour. C'est ce qu'on appela le Parlement Maupeou, du nom du chancelier de Louis XV qui opéra cette révolution. Cette nouvelle cour fut supprimée à son tour par Louis XVI, peu après son avènement au trône. L'ancien parlement et l'ancienne cour des comptes furent rétablis tels qu'ils existaient auparavant et reprirent leurs fonctions le 12 janvier 1775.

1772

Chrétien-François de Lamoignon de Bâville (Magistrat au Parlement de Paris en 1755, Président à mortier en 1758, exilé en janvier 1771 dans le Beaujolais), anime la résistance du Parlement contre la réforme du chancelier Maupeou en 1772.

1774

Maurepas

    À la mort de Louis XV, en 1774, son petit-fils et successeur, le jeune Louis XVI (20 ans), nomme ministre d'État Maurepas, qui avait été disgracié par Louis XV. Celui-ci fait renvoyer les trois ministres de Louis XV, Aiguillon, Terray et Maupéou qui, depuis trois ans, travaillaient, non sans un certain succès, au rétablissement des finances, et du pouvoir royal. Maurepas fait nommer Turgot aux finances, Malesherbes à la Maison du Roi et Vergennes, aux Affaires étrangères.

    Maurepas commet l’erreur de rappeler les Parlementaires, qui avaient été suspendus par Maupeou en 1771. Le Parlement reprend alors très vite sa politique d'obstruction, et entreprend de bloquer toutes les réformes tentées par Louis XVI.

1776

Turgot

    Le 12 mai 1776, le roi se sépare de Turgot et annule ses réformes sous la pression des privilégiés et de la Cour. Ces privilégiés (essentiellement les parlementaires et la haute aristocratie) rejettent tout changement. Ils dénoncent dans la volonté de réforme du roi une manifestation de tyrannie...

    Turgot est remplacé par le contrôleur général Clugny de Nuits. Mais le décès de celui-ci donne l’occasion à Necker d’obtenir son premier ministère. Il est nommé conseiller des Finances et « directeur général du Trésor royal ». Necker recevra le titre de « directeur général des Finances » le 29 juin 1777

1781

Necker

    À la fin du mois d’avril 1781, le Parlement de Paris refuser d’enregistrer l’édit de création d’une nouvelle assemblée provinciale en Bourbonnais. La création de ces assemblées répond notamment à l’objectif de priver les parlements d’une partie de leurs prérogatives extra-judiciaires. Necker a exposé son projet dans un mémoire manuscrit remis confidentiellement au Roi. Un pamphlet, adressé le 20 avril 1781 à six membres du Parlement de Paris, révèle les intentions de Necker en citant ce mémoire. Les parlementaires se révoltent. Convoqué au château de Marly, le Premier président d’Aligre se voit intimer par Louis XVI, sur un ton sec, d’interdire toute discussion du mémoire. Néanmoins, Louis XVI est ébranlé par le retournement de l’opinion, et son ministre Maurepas préconise le renvoi de Necker.

1786

Calonne

    Le 20 août 1786, Charles Alexandre de Calonne, contrôleur général des finances et de fait premier ministre, remet à Louis XVI un mémoire sur le déficit financier ; il préconise comme indispensable une réforme de l'Etat sur un triple plan :

 - Plan fiscal : tendance à l'égalité devant l'impôt et à l'unification ;

 - Plan économique : liberté du commerce des grains, suppression des douanes intérieures ;

 - Plan administratif : création d'assemblées municipales (élues par tous les propriétaires ayant au moins 600 livres de revenu), qui éliraient des assemblées de district, lesquelles éliraient à leur tour des assemblées provinciales ; toutes ces assemblées demeurant d'ailleurs purement consultatives.

    Au lieu de soutenir Calonne et d'imposer son plan de réformes, Louis XVI tergiverse et cherche, pour vaincre la résistance prévisible des parlements, à obtenir le soutien de la Noblesse.

    Nous verrons que ces trois mesures feront partie des toutes premières prises par l'Assemblée nationale en 1789.

    Calonne dira au roi : « Ce qui est nécessaire pour le salut de l’État serait impossible par des opérations partielles, il est indispensable de reprendre en sous-œuvre l’édifice entier pour en prévenir la ruine… Il est impossible d’imposer plus, ruineux d’emprunter toujours ; non suffisant de se borner aux réformes économiques. Le seul parti qu’il reste à prendre, le seul moyen de parvenir enfin à mettre véritablement de l’ordre dans les finances doit consister à vivifier l’État tout entier par la refonte de tout ce qu’il y a de vicieux dans sa constitution. »

Calonne ajoutera en trois ans 653 nouveaux millions aux emprunts précédents.

1787

22 Février 1787

    Sachant que son projet va se heurter à l’opposition du Parlement, Calonne convoque une assemblée de notables qui se tiendra jusqu’au 25 mai. Cette assemblée sera composée de 114 membres désignés par le roi, dont 7 princes de sang, 36 ducs et pairs ou maréchaux de France, 33 présidents ou procureurs généraux de parlements, 11 prélats, 12 conseillers d'Etat, 12 députés des "pays d'Etat", 25 maires ou échevins des principales villes, etc. 

Assemblée des notables du 22 février 1787
Estampe vendue chez Basset, à Paris,
rue Saint Jacques, au coin de celle des Mathurins !
Calonne face aux notables...

    Dès son ouverture, l’Assemblée des notables s’écarte des vues du ministère. Seul le comte d’Artois et certains grands seigneurs libéraux comme La Fayette, d’Estaing, La Rochefoucauld le soutiennent ainsi que quelques aristocrates réformistes.
    Les parlementaires, rangés derrière le premier président du Parlement de Paris, Etienne François d’Aligre, qui déteste Calonne, mènent l’opposition, appuyés par le clergé. Les discussions difficiles qui s’engagent prennent des allures inquiétantes. L’un des parlementaires les plus véhéments, le procureur général de Castillon, déclare que seuls les états généraux peuvent admettre le bouleversement qu’entraînerait le nouvel impôt proposé par le ministère : la « subvention territoriale ». Le lieutenant civil Angran d’Alleray renchérit, disant que cette subvention est une « vexation » à l’égard des ordres supérieurs, car elle porte atteinte à leurs privilèges.

    Les notables rejetteront en bloc toutes les réformes de Calonne (un programme calqué sur celui de Turgot). Cet échec conduira au renvoi de Calonne.

Plan d'aménagement de l'Assemblée des Notables


    De 1787 à 1788, Brienne reprendra à son compte les édits de Calonne. Il renverra les notables, mais se retrouvera en conflit avec le Parlement, qui l’empêchera de faire passer sa réforme

2 Juillet 1787

Loménie de Brienne

    Le Parlement de Paris suivi de la Cour des aides et de la Cour des comptes refuse à Brienne l’enregistrement de l’édit qui assujettissait au timbre les pétitions, quittances, lettres de faire-part, journaux, affiches, etc. Ce refus d’un nouvel impôt les rend populaires auprès du peuple.

16 Juillet 1787

    Le Parlement de Paris déclare que seule la Nation réunie dans ses Etats Généraux peut consentir un impôt perpétuel. Son véritable objectif est de prendre en charge cette fonction (Les Etats Généraux ne formant pas une assemblée régulière ne pouvant l’assumer). Le Tiers-état s’est lui aussi déclaré favorable à cette convocation des États Généraux car il espère que les réformes iront dans son sens.

6 Août 1787

Lit de justice de Louis XVI imposant l’enregistrement de l’impôt sur le timbre.

Lit de justice du 6 aout 1787
Source BNF Gallica

7 Août 1787

    Le Parlement déclare nul le Lit de Justice. Calonne redoute que le Parlement ordonne son arrestation pour informer contre lui au sujet de la réforme monétaire de 1785, dans laquelle il est accusé de malversations et il quitte la France pour l’Angleterre où il est fort bien accueilli.

14 Août 1787

    Louis XVI, par l'intermédiaire de Brienne, fait exiler les parlementaires parisiens à Troyes pendant la nuit du 14 au 15. La ville de Troyes leur fait un accueil triomphal et les Parlements provinciaux se solidarisent avec le Parlement de Paris.

15 au 18 Août 1787

    Des émeutes populaires éclatent à Paris pour soutenir les Parlements. La négociation entre Loménie de Brienne et les parlements aboutit à un compromis : le gouvernement envisage de convoquer les États Généraux, mais demande du temps et des moyens financiers pour présenter en 1792 un bilan satisfaisant (novembre).

18 Août 1787

Lit de justice de Louis XVI imposant l'exil du Parlement de Bordeaux à Libourne.

4 Septembre 1787

    Brienne suggère un compromis financier, comportant l'abandon de la subvention territoriale ; le Parlement l'accepte et est rappelé : mais la banqueroute menace de plus belle.

19 Septembre 1787

    Séance royale du Parlement pour l'enregistrement de l'édit (prorogation de l’impôt des deux vingtièmes) et du lancement d'un emprunt. Le Parlement réclame les Etats Généraux pour 1789. Le roi répond par l'ordre pur et simple d'enregistrer. Le Duc d'Orléans proteste ; Louis XVI lui répond : "C'est légal parce que je le veux". Le Parlement annule l'enregistrement comme illégal. Brienne fait arrêter deux conseillers (Fréteau et Sabatier) par lettre de cachet. (Fréteau deviendra l'un des présidents de l'Assemblée constituante). Le duc d'Orléans que la foule avait porté en triomphe, est exilé à Villers-Cotterêts.

19 Novembre 1787

    Louis XVI impose au Parlement l’enregistrement par lit de justice un emprunt de quatre cent vingt millions. Le duc d'Orléans et deux conseillers du parlement qui s'opposent à cet emprunt sont exilés, mais bientôt après rappelés.

1788

4 Janvier 1788

    Sur la proposition d'Adrien Duport, (un des premiers nobles à rejoindre le Tiers Etat le 27 juin 1789), le Parlement vote un réquisitoire contre les lettres de cachet et réclame la liberté individuelle comme un droit naturel.

3 Mai 1788

    Le Parlement de Paris se sent menacé de suppression par le gouvernement. Il promulgue pour se protéger un arrêt qui expose les lois fondamentales de la monarchie et fait des corps intermédiaires liés à la société d’ordre, le caractère essentiel de la constitution monarchique. Le Parlement publie une « déclaration des droits de la Nation » et réclame à nouveau la convocation des états généraux en espérant qu'ils contraindront le roi à respecter les exemptions fiscales des privilégiés.

Tous les privilégiés, y compris le haut clergé, se solidarisent avec le Parlement de Paris.

5 Mai 1788

    Début de la réunion de l’assemblée du clergé. L’assemblée du clergé refuse d’entériner les reformes du 8 mai et condamne l’octroi de droits civils aux non-catholiques.

Le capitaine des gardes arrêter en pleine séance les conseillers au Parlement de Paris, Duval d’Eprémesnil et Goislard de Montsabert.

Arrestation de Goislard de Monsabert et D'Eprémesnil

8 Mai 1788

    Le garde des sceaux Chrétien-François de Lamoignon et le contrôleur général des finances Étienne Charles Loménie de Brienne tentent une ambitieuse tentative de réforme de la justice. À leur initiative, le Parlement se réunit en séance plénière en présence du roi. Au cours de ce lit de justice, Louis XVI enlève aux parlementaires leur droit de remontrance et confie le droit d'enregistrement à une cour plénière.

    Quarante-sept tribunaux de grand bailliage, vont remplacer les Parlements. Ils devront appliquer un nouveau code d’instruction criminelle qui supprimera la « question préalable », c’est-à-dire la torture. L’enregistrement des lois reviendra à une cour plénière dont les membres seront choisis par le roi (Réforme de Lamoignon).

9 Mai 1788

    La cour plénière se réunit le 9 mai, mais de nombreuses personnalités refusent d’y siéger. Les Parlements résistent à leur mise en vacance et sont soutenus par des émeutes populaires à Paris (19 juin), Toulouse et Rennes.

20 Mai 1788

    Le Parlement de Grenoble ayant protesté contre les édits de Lamoignon, il est mis en vacances mais se réunit néanmoins le 20 mai 1788 chez son président, Bérulle, lequel proclame que, si les édits de Lamoignon étaient maintenus, « le Parlement du Dauphiné se regarderait comme entièrement dégagé de sa fidélité envers son souverain ».

7 Juin 1788 « Journée des Tuiles » 

    Le lieutenant général de la province confie à des patrouilles de soldats des lettres de cachet à remettre aux parlementaires pour leur signifier un exil sur leurs terres. Mais le tocsin sonne. La population est rameutée par les auxiliaires de justice, particulièrement fâchés de perdre le Parlement, qui est leur gagne-pain. Des Grenoblois s'emparent des portes de la ville. D'autres, montés sur les toits, jettent des tuiles et divers objets sur les soldats. Vers la fin de l'après-midi, les émeutiers, maîtres de la ville, réinstallent les parlementaires dans le palais de justice.

La journée des tuiles

     A noter que depuis, le Dauphiné se glorifie de cette émeute qu’il considère comme une des prémices de la Révolution. Lire l'article du 7 juin 1788.

11 Juin 1788

A Dijon, l'installation des nouvelles juridictions provoque une insurrection.

12 (ou 13) Juin 1788

Exil du Parlement du Dauphiné.

    A noter que selon cette source, le peuple dauphinois aurait été parfaitement insensible à la déchéance de ce parlement aristocratique. Il n'aurait pas répondu pas à l’appel de Vizille : 194 paroisses seulement étaient représentées sur les 1212 que comptait le Dauphiné.

Source : Un parlement de province (page 343)

14 Juin 1788

    Les notables grenoblois des trois ordres se réunissent à l'Hôtel de Lesdiguières et demandent le rappel des magistrats et la convocation des États de la province et des États généraux du Dauphiné.

19 Juin 1788

    A Pau, le peuple, manipulé par les nobles réunis ce jour-là en assemblée, réclame au cours d’une émeute la réouverture du Parlement.

Source : Internet Archive

21 Juillet 1788, L'Assemblée de Vizille

Claude Perier


    À l'initiative des avocats Barnave et Mounier, les représentants du Dauphiné, au nombre d'environ 540, se réunissent au château de Vizille, propriété du riche industriel Claude Perier. Ils appellent à refuser le paiement de l'impôt et demandent aux autres assemblées provinciales d'en faire autant. C'est la première manifestation de révolte contre l'autorité royale.
Lire l'article 21 juillet 1788


8 Août 1788

Louis XVI décide de convoquer les Etats généraux, assemblée extraordinaire réunissant les trois ordres de la société (noblesse, clergé, tiers état), pour résoudre la crise financière due aux dettes du Royaume.

21 Septembre 1788

Le Parlement de Paris réclame les procédures de 1614 aux États généraux.

23 septembre 1788

    Rappelé par le roi en remplacement de Calonne dont la politique est un échec, Necker est nommé « directeur général des finances » le 25 août 1788, puis ministre d’état le 27. Le 23 septembre, Necker fait rappeler le Parlement de Paris, dont les membres avaient été exilés.

25 Septembre 1788

    Le Parlement de Paris prend un arrêt aux termes duquel les états généraux doivent être « régulièrement convoqués et composés suivant la forme observée en 1614 » (vote par ordre) autrement dit avec trois ordres très inégalement représentés. Ce n'est pas précisément ce que souhaite le Tiers Etat !

6 Novembre 1788

    Le roi convoque la seconde Assemblée des notables pour traiter quelques questions préliminaires sur l'organisation des États. L'Assemblée refuse le doublement du tiers état.

27 Novembre 1788

    Passant outre le refus de l'assemblée du 6 novembre, Louis XVI décide doublement du tiers état. Le tiers état aura autant de députés que les deux autres ensemble (noblesse et clergé).

5 Décembre 1788

Le Parlement accepte le principe du doublement de la représentation du Tiers-État.

12 Décembre 1788

La seconde Assemblée des notables est congédiée par le roi, sans avoir rien accompli.


1789

1er Janvier 1789

    La dette de la France se monte à 4 milliards et demi. Elle a triplé pendant les quinze du règne de Louis XVI. (Les dépenses pour la guerre américaine ont été évaluées à 2 milliards).

Les élections aux Etats généraux débutent pour s’achever en Mai.

    Les sujets du roi ayant le droit de voter doivent être inscrits au registre des contributions (3 à 4 millions de Français sont donc exclus). Ils doivent payer une somme d’impôts équivalente à 3 journées de travail. Les municipalités ayant liberté de fixer le plafond, celui-ci est 6 journées de travail à Paris.

Pour être éligible, il faut payer 10 journées de travail.

    En Provence, en Béarn, en Bourgogne, en Artois, en Franche-Comté, les ordres privilégiés soutenus par les parlements locaux profitent de la session des états pour se livrer à des manifestations violentes contre les exigences du Tiers Etat.

7 Janvier 1789

La noblesse de Bretagne se fait menaçante.

    Le comte de Thiard porte à l’assemblée de Bretagne un ordre du roi qui en suspend les opérations jusqu’au 5 février suivant : « afin de mettre messieurs du tiers en mesure de réclamer une modification à leur mandat impératif, si leurs commettans jugeaient à propos de l’accorder. Le troisième ordre quitta immédiatement la salle, aux applaudissemens du peuple, qui venait de s’introduire dans la tribune réservée au public ; il sortit le front serein et parfaitement assuré du sens des délibérations qu’on allait provoquer. La noblesse continua de siéger malgré l’invitation de quitter la salle qui lui fut adressée par le commandant, et le chevalier de Guer commit l’impardonnable faute de lui faire consacrer par un serment l’engagement de maintenir intégralement la constitution bretonne et de n’accepter, sous peine d’infamie, aucun mandat pour siéger au sein des états-généraux du royaume, s’il n’était délivré par les états de la province dans la forme traditionnelle. »

Source : Les Etats de Bretagne (page 179)

26 janvier 1789

    Les nobles excitent leurs valets et affidés. "des avis nombreux convoquèrent au champ Montmorin ce qu’on nommait alors les réclamans de la constitution noble. Plusieurs centaines de personnes s’y rassemblèrent, et les témoignages contemporains sont unanimes pour constater que la plus grande partie de l’assistance était formée par les porteurs de chaises et les domestiques des maisons nobles, qui avaient dépouillé leur livrée pour exercer avec une indépendance moins contestable leurs droits de citoyens"

    Ce qui risquait d'arriver arrive : " Sur la place du palais se trouvait un café, qui, dans ces jours agités, formait pour la bourgeoisie le centre habituel de ses réunions politiques. Une vingtaine d’étudians postés en curieux à la porte, ayant pris en présence de la manifestation une attitude peu sympathique, reçurent une volée de coups de poing et de coups de bâton, déplorables violences qui furent le prélude de scènes plus sanglantes. Ces jeunes gens étaient sans armes, mais ils ne tardèrent pas à s’en procurer, car deux heures après il n’existait plus un seul fusil de chasse chez les armuriers, et le dépôt des compagnies bourgeoises ne tardait pas à être forcé."

Source : Les Etats de Bretagne (Page 180)

    Par la suite, de toutes les villes de Bretagne, d’Angers, de Saint-Malo, de Nantes, des jeunes bourgeois accoururent pour défendre les étudiants rennais, qui étaient commandés par Moreau, le futur général. Les gentilshommes attaqués et poursuivis dans les rues, assiégés dans la salle des états, doivent quitter la ville et rentrer dans leurs manoirs. Ils jurent de dépit de ne pas se faire représenter aux états généraux.

Mallet du Pan


    Mallet du Pan écrit en janvier : « Le débat public a changé de face. Il ne s’agit plus que très secondairement du roi, du despotisme et de la Constitution ; c’est une guerre entre le tiers état et les deux autres ordres. » 



30 mars 1789

    A Besançon, le parlement ayant pris parti pour les privilégiés qui avaient voté une protestation virulente contre le règlement de Necker, la foule s’ameute et pille les maisons de plusieurs conseillers sans que la troupe n’intervienne pour les défendre. Son commandant, un noble libéral, le marquis de Langeron, déclara que l’armée était faite pour marcher contre les ennemis de l’état et non contre les citoyens.

Source : Révolution aristocratique en Franche Comté (page 268)


    La suite, vous la connaissez. La bourgeoisie n'avait plus qu'à s'emparer de ce pouvoir affaibli par tant d'années de conflit avec l'aristocratie.

    Cet article est imparfait et incomplet, mais l'idée était de vous donner un aperçu de "l'ambiance" avant 1789 ! 😉

    Ce sujet est également en partie abordé dans l'article concernant la préparation des Etats-Généraux en date du 1er Janvier 1789.

 



                                 





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Bien cordialement
Bertrand