lundi 19 octobre 2020

19 Octobre 1789 : 1ère séance de l’Assemblée nationale à Paris, Bailly fait un sage discours.

Salle du Manège des Tuileries, (d'après Chenavar)
Source : Paris Musées

Petit rappel des faits…

    Suite aux journées des 5 et 6 Octobre, le roi étant revenu bon gré mal gré vivre à Paris dans le palais des Tuileries, l’Assemblée nationale a répondu à son invitation de le rejoindre à Paris. Une commission de six membres a été désignée dans la séance du matin du 9 octobre 1789, afin de trouver un local pouvant recevoir les 1318 députés des États Généraux. Il fallait que ce local fut suffisamment grand, que les voix y portent et que l’on puisse le chauffer sans trop de mal. Etaient membres de cette commission  : Guillotin, député du Tiers-État de Paris et ses faubourgs, en tant que médecin et hygiéniste, Vignerot du Plessis, duc d'Aiguillon, député de la noblesse d'Agen, Colbert de Seigneley, évêque et député de Rodez, La Poule, député de Besançon, Gouy d'Arsy, député de Saint-Domingue, et Lepeletier de Saint-Fargeau, député de la noblesse de Paris.


Le choix de la salle du Manège des Tuileries

    Après avoir visité une vingtaine d’établissements, la commission a fixé son choix sur la salle du Manège des Tuileries, située à proximité immédiate de la nouvelle résidence du roi. Elle a désigné l'architecte Pierre-Adrien Pâris afin de procéder aux modifications et aménagements pour permettre l'installation des parlementaires. Les travaux seront conduits par Pierre-François Lardant pour la maçonnerie, Pierre Francastel pour la menuiserie et Jacques Marqueré pour la serrurerie, tous issus des Menus-plaisirs. Évaluées initialement à environ 150 000 livres, les dépenses relatives à l'aménagement de la salle du manège s'élèveront à 168 152 livres.

Plan de l'architecte pour les travaux du Manège


    Construit en 1720 pour les leçons d’équitation du jeune Louis XV, 
le Manège longeait sur 120 mètres la terrasse des Feuillants. Il fut démoli en 1802 lors du percement de la rue de Rivoli. La porte d’entrée au Manège donnait sur le passage des Feuillants (actuelle rue de Castiglione) reliant la terrasse des Feuillants et la rue Saint-Honoré. Une plaque commémorative sur la grille du jardin des Tuileries, face au n° 230 rue de Rivoli, rappelle la présence des différentes Assemblées au Manège et la proclamation de la République dans ses murs ; à ce niveau, on est à mi-longueur de la salle, à l’emplacement de la tribune, le fauteuil du Président se situant donc au côté opposé.
    
     De 1789 à 1798, toutes les assemblées parlementaires de la Révolution siégeront dans cette Salle des Manèges (la Constituante, la Législative, la Convention, les Cinq-Cents). La royauté y sera abolie et la République y sera proclamée en 1792, l’esclavage y sera aboli le 4 février 1794.

    Cet article sur Wikiwand décrit bien l'histoire de ce haut lieu de la Révolution : Salle du Manège.

La salle du Manège des Tuileries
(entourée d'un cercle rouge, au milieu en bas)


Archevêché de Paris

Lieu provisoire, la grande chapelle de l’Archevêché

    En attendant la fin des travaux d’aménagement de la salle du manège, les députés se sont installés provisoirement dans la grande chapelle de l'ordination du palais de l'Archevêché de Paris. Mais celle-ci est inadapté à la réception d’autant de députés et le 26 octobre, une des tribunes installées à l'archevêché s'écroulera même en blessant quatre députés.



La Commune de Paris présente ses hommages à l’Assemblée

    Aujourd’hui 19 octobre 1789, à 10h du matin, l'Assemblée nationale constituante se réunit pour la première fois à Paris.

    En l’honneur de ce grand événement, une députation de la Commune de Paris conduite par le maire de Paris, Bailly, accompagné de Lafayette vient apporter ses hommages à l’Assemblée.

Veuillez trouver, ci-dessous l’adresse lue par Bailly :

 Source :  https://www.persee.fr/doc/arcpa_0000-0000_1877_num_9_1_5194_t1_0458_0000_10


Jean-Sylvain Bailly

"Messieurs, nous apportons à l'Assemblée nationale les hommages de la commune de Paris ; nous venons renouveler à cette auguste Assemblée et l'expression d'un respect profond et l'assurance d'une soumission entière. Nous avons toujours désiré l'honneur que nous recevons aujourd'hui, celui de voir les représentants de la nation réunis dans le sein de la capitale, et y délibérant sur les grands intérêts de l'Etat.

Nous osons dire, Messieurs, que nous sommes dignes de cet honneur ; nous le sommes par le respect et la soumission dont nous venons vous offrir l'assurance, mais nous le serons surtout par notre fidélité à maintenir la liberté de vos grandes et importantes délibérations. La ville de Paris n'a point d intérêt particulier ; tout Français ne connaît dans ce moment que celui de la patrie. Nous demandons, comme toutes les provinces, que vous donniez à cet empire une Constitution durable qui maintienne sa prospérité, et qui fasse le bonheur de tous. Voilà notre intérêt, ce sont nos vœux.

S'il nous est permis de le rappeler ici, la ville de Paris s'est armée la première contre les ennemis de l'Etat, et en faisant ce premier acte de liberté, elle a fait disparaître les soldats dont l'Assemblée nationale et la capitale étaient environnées ; elle a assuré sa liberté en assurant la vôtre. Sa gloire sera que la félicité de la France ait été opérée dans son sein. La Révolution qui a été commencée par le courage doit être achevée par la sagesse.

Votre sagesse, Messieurs, est de peser et de fixer la destinée de l'empire. Notre devoir, à nous, est de veiller pour vous, de vous entourer du repos et de la tranquillité. Tout citoyen sera soldat pour composer votre garde nationale ; et la commune que vous voyez devant vous, tous les habitants de celte capitale sont prêts à répandre jusqu'à la dernière goutte de leur sang pour votre sûreté, pour l'inviolabilité de vos personnes et pour la liberté de vos délibérations. Si la capitale n'a pas encore joui de tout le calme que les bons citoyens désirent, c'est que les grandes agitations d'où la liberté doit éclore ne peuvent s'apaiser tout à coup. Le mouvement une fois imprimé ne cesse que par degrés, mais il est des circonstances heureuses qui accélèrent un repos nécessaire.

Nous pouvons dire à cette auguste Assemblée que le retour du Roi à Paris y a répandu le bonheur, que sa présence chérie y établit une paix durable. Il n'y a plus de mouvement que pour se porter autour de lui, et cette paix si désirable est aujourd'hui assurée par votre présence. La paix est le fruit de la sagesse ; si la paix n'existait point encore, elle naîtrait du respect que vous inspirez. Qu'apportez-vous ici ? La durée de cet empire par les lois, sa prospérité par les lois, et le bonheur de tous par les lois.

En considérant le Sénat imposant et vénérable auquel j'ai l'honneur de porter la parole, je crois voir les lois personnifiées et vivantes, ces lois simples et éternelles qui vont s'étendre dans toute la France et dans tout l'avenir, pour le bonheur universel. La paix sera dans tous les temps l'ouvrage de ces lois, la paix sera le fruit du respect et de l'amour. La loi et le Roi, voilà tout ce que nous devons respecter ; la loi et le Roi, voilà tout ce que nous devons aimer."

 

Un mot sur la « Commune » de Paris.

    Ne confondons pas la sage Commune bourgeoise de 1789 avec la turbulente Commune populaire de 1871 ! Nos députés révolutionnaires de 1789 sont anglophiles, raison pour laquelle ils ont choisi de remplacer l’expression "Tiers Etat", par "Commune", en référence à la chambre des communes des Anglais (House of Commons). N’oublions pas que nos amis Anglais avaient déjà deux révolutions d’avance sur nous. La dernière datant de 1689.



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Bertrand